InnovaTech, basé à Gosselies, se définit comme le “coach en innovation technologique” pour un public de PME et de TPE. Née en 2002 sous l’appellation “CeRDT” (Centre de Promotion de la Recherche & Développement et de valorisation des Technologies en Hainaut), l’asbl a changé d’appellation en 2008 à la faveur d’une extension de ses activités à l’ensemble de la Wallonie.
Ses missions: pousser les (petites) entreprises à innover et, pour se faire, mener des activités d’information, de sensibilisation, de formation et d’accompagnement.
Nous avons rencontré Marie-Hélène Van Eyck qui a pris les rênes de l’asbl en janvier de cette année, à la suite du départ d’Axel Neveux qui en avait assuré la direction pendant 9 ans.
Pas de science sans économie
Marie-Hélène Van Eyck a bâti son parcours professionnel en engrangeant une série d’expériences pluri-formes. A la manière de briques que l’on assemble, voire réorganise, au fil du temps. L’une des premières choses sur lesquelles elle met l’accent est son goût pour les études. En fait pour la découverte constante de nouvelles choses, voire la confrontation à de nouveaux défis – “Je ne me sens jamais si bien que lorsque j’ai un challenge devant moi. Quand il est résolu, il faut que je m’en trouve un nouveau…” confie-t-elle.
Ce goût du nouveau l’a menée à engranger successivement un diplôme d’ingénieur chimiste, une maîtrise en finances à HEC, une expérience au sein d’un laboratoire de recherche et une autre dans la banque.
Son intérêt premier, précise-t-elle, allait davantage à la recherche appliquée que fondamentale- “parce que j’aime beaucoup la science mais aussi savoir qu’un jour cela va servir à quelqu’un”. Mais, dans le même temps, elle avoue “un fort attrait pour l’entrepreneuriat.” Compatible? Conciliable? “Mon coeur, longtemps, a balancé entre économie et technologie.”
Marie-Hélène Van Eyck: ‘Le métier de conseiller en innovation technologique est très riche, très exigeant mais il me convient très bien parce que je suis quelqu’un de défis.”
Le fait est que son diplôme d’ingénieur chimiste ne lui est guère d’une grande utilité dans sa décision d’accepter un poste de directrice d’agence dans une banque… Mais ce métier de la banque lui permet très tôt de tâter de la gestion d’entreprise, de se frotter à la problématique de la viabilité de projets: “quelle que soit l’entreprise, quel que soit le projet qu’on développe, le commercial est fondamental. Cet acquis allait me servir plus tard, chez InnovaTech.”
Après la banque, elle fait un retour au laboratoire universitaire CBMN (Centre de Biophysique Moléculaire Numérique) des Facultés de Gembloux où elle avait fait ses études. Elle y reste plus de 4 ans, chargée de lancer une spin-off (Biosiris). De quoi mettre en oeuvre son diplôme scientifique et ses compétences économiques et de gestionnaire. Ensuite Marie-Hélène Van Eyck refait un nouveau tournant à 180°. Direction… la banque et un poste de gestionnaire et coordinatrice de projets IT chez Dexia.
“J’y ’ai découvert ce qu’était une grande entreprise. C’était intéressant de pouvoir comparer la manière de travailler en petite et grande structure. En grande entreprise, pour trouver de nouvelles idées, pour évoluer, il faut être très structuré.” De cette expérience, elle en tire l’enseignement que certaines de ces méthodes (ou contraintes) seraient fort utiles pour les PME.”
“En reprenant certains trucs et astuces des grandes structures, on peut être très performant en petite entreprise. Par exemple: fixer des objectifs, les répartir dans la structure, entre les personnes, évoluer par objectifs, établir et suivre un plan d’actions, être rigoureux. C’est quelque chose que les petites entreprises doivent apprendre parce que cela leur permet d’évoluer plus vite.”
A la croisée des deux mondes
Mais l’opportunité qui, à ses yeux, lui permettra de réconcilier ses penchants pour les mondes de la science, de la recherche et de l’entreprise, vient en 2009, via une annonce passée par InnovaTech dans le Journal de l’Ingénieur. A l’époque, InnovaTech recherchait des “conseillers en innovation technologique qui auront notamment pour mission de “sensibiliser, accompagner et mettre en place une démarche d’innovation technologique au sein des TPE et PME peu ou pas innovantes; et de favoriser et privilégier les partenariats avec les prestataires du réseau de l’intermédiation scientifique et technologique en Région wallonne”.
“Ce job alliait les deux choses que j’aime: la création de produits, d’entreprise et le côté scientifique.”
En tant que coordinatrice de projets, il faut aussi motiver les gens, travailler avec d’autres équipes- IT, marketing, gestion de crédits… “C’est un challenge. Il faut être dans la motivation, au-delà des frontières hiérarchiques.’
Marie-Hélène Van Eyck: “Un petit entrepreneur ne doit pas attendre 15 jours pour avoir une réponse.”
“Le métier de conseiller en innovation technologique est très exigeant. Il faut connaître différentes matières. Il faut être un bon généraliste. Pour réussir un projet d’innovation, il faut en effet beaucoup de choses: voir s’il est faisable techniquement, s’il est économiquement tenable. S’il y a un marché, si l’entrepreneur peut trouver du financement. Il faut le protéger juridiquement. Il faut vérifier s’il correspond à l’entreprise et à l’entrepreneur qui le porte. Il faut pouvoir rebondir, lors d’un entretien, sur toutes ces thématiques. Notre rôle en tant que conseiller est de tirer les gens vers l’innovation. Or, il s’agit souvent de petites voire très petites entreprises qui ont peu d’argent et de moyens humains. qui n’ont pas l’innovation comme priorité. Ou qui n’avancent pas, même lorsque tous les signaux sont au vert, parce que la société n’a pas le temps, dans l’état actuel des choses, pour ce projet d’innovation. C’est là un deuxième défi: arriver à être l’effet moteur pour l’entrepreneur pour le dynamiser et le motiver.”
L’un des rôles essentiels d’un conseiller en innovation technologique est avant tout de se mettre à l’écoute de l’entrepreneur. “Il faut être dans l’empathie, créer un climat de confiance qui l’amène à dire certaines choses qui sont stratégiques pour son entreprise.”
Innover chez… InnovaTech
Compte tenu de son parcours et des compétences engrangées, elle découvre dans les méthodes et les approches en vigueur chez InnovaTech certaines choses qui, selon elle, pourraient être améliorées.
Elle se lance donc dans le développement de nouvelles méthodes, de meilleures pratiques. Elle contribue dès lors à la refonte de certains processus et activités. Le Club d’entreprise est repensé pour y intégrer davantage de stimulation. Des séminaires “Astuces pour innover” voient le jour. La carte des services est retravaillée, afin de mieux adapter le management de l’innovation à la cible. De nouvelles formations viennent s’ajouter au catalogue. Un nouveau cycle de formations “6 jours pour innover” s’articule en 12 modules qui abordent les thématiques de la stratégie d’innovation, de la créativité, de la gestion opérationnelle des projets d’innovation, de leur financement, celui de la propriété intellectuelle, des partenariats etc..
Autre initiative, aujourd’hui en préparation: des journées de stimulation à l’innovation en entreprise, destinées au personnel de PME.
Jusque là, InnovaTech proposait certes les mêmes outils mais n’offrait qu’un catalogue standard, peu malléable. “On a désormais inversé la vision. Nous partons de la question: que doit faire l’entrepreneur pour réussir son projet? On définit une guideline personnalisée sur laquelle viennent se greffer nos outils. L’entrepreneur doit donc d’abord développer une nouvelle idée, qui soit en accord avec sa vision de l’entreprise. Il doit prendre conscience qu’il doit faire preuve de créativité, générer beaucoup d’idées, ne pas s’arrêter à la première mais sélectionner la meilleure. On passe alors en projet d’innovation. Avec l’idée qu’il faut tout réussir d’un coup, travailler simultanément sur l’analyse et la faisabilité techniques du projet, sur le développement du marché, sur l’organisation du projet au sein de la société, sa planification interne. Analyser sa rentabilité, en liaison avec les choix technologiques. Rechercher des fonds, suffisamment tôt et pas uniquement quand l’argent vient à manquer. Travailler sur la stratégie de protection de l’idée- secret, brevet, marque… En fonction des besoins précis de l’entrepreneur, qui sont ainsi identifiés, nous proposons nos services.”
Cette adaptation a par ailleurs été jugée nécessaire pour “améliorer la réactivité et la performance des outils d’InnovaTech. “Un petit entrepreneur ne doit pas attendre 15 jours pour avoir une réponse. Il faut être extrêmement réactif. Côté performance, un audit réalisé en 5 jours n’est pas une bonne chose si on avait pu le faire en une journée. Le temps est crucial, très limité en PME. Il faut donner un maximum de valeur ajoutée en un minimum de temps. Il faut être hyper-efficace. Nous développons donc nos outils pour qu’ils soient le plus efficaces possible.”
Un esprit nouveau
Au-delà des méthodes et de l’offre de services, arie-Hélène Van Eyck a aussi apporté un souffle nouveau en matière de circulation interne de l’information et de transfert de connaissances entre les collaborateurs, afin que chacun soit davantage au fait de ce qui se fait en interne et en externe. Un système d’“inno-veille” a été instauré afin que tout le monde soit tenu au courant par ses collègues de ce qui paraît au sujet de l’innovation, des projets sur lesquels chacun travaille, tous secteurs confondus.
Marie-Hélène Van Eyck favorise aussi la responsabilité partagée. Chacun est responsable d’un projet, qu’il s’agisse de mettre au point une nouvelle méthodologie ou d’organiser un événement. Chacun est en outre responsable de faire évoluer ce projet. “Cela évite que tout repose sur mes seules épaules. J’applique donc un peu, au sein d’InnovaTech, le principe du coordinateur de projet. Mon rôle se limite alors à voir si cela fonctionne et à mettre de l’huile là où quelque chose coince. J’essaie ainsi de ne jamais être débordée, de déléguer au maximum, d’avoir du temps pour gérer les vrais besoins et les imprévus.”
Une capacité à dire non
“Ce qui est important c’est de parler vrai. Ce n’est pas toujours évident. Il faut oser dire non en annonçant les vraies raisons, avoir vingt secondes de courage. C’est ainsi qu’on instaure la confiance. Même si ce n’est pas facile de dire à un entrepreneur, sans pour autant le choquer, que son idée n’a pas de potentiel.”
En dehors du travail, toute l’attention de Marie-Hélène Van Eyck se reporte tout naturellement vers sa famille. “Quand je ne travaille pas, je m’occupe de mes enfants, 8 et 11 ans.” Et de son mari, ingénieur… “Mais le plus grande partie de notre temps libre c’est de se faire des soupers, des fêtes, rencontrer des gens…” Car Marie-Hélène Van Eyck est une passionnée de rencontres. Son rêve serait de faire le tour du monde. “Si j’avais le temps, je ferais le tour du monde. J’adore rencontrer les gens. Si j’avais le temps, je prendrais une année sabbatique, ma caravane et je me baladerais et m’arrêterais au hasard. Un jour, je le ferai…”
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