Øpp. C’est le nouveau nom qu’a choisi Dominique Mangiatordi pour sa “nouvelle” start-up, officiellement constituée ce 1er novembre.
Il s’agit en fait d’une nouvelle structure dans laquelle il vient nicher les activités de développement des applis que Royal App Force avait encore en portefeuille après avoir vendu Peak Me Up à Efficy ainsi bien entendu que les futurs projets qui verront le jour. Ces derniers pourront potentiellement être de nature générique – marketing, gestion des ressources humaines, recrutement… – ou plus spécifique à certains métiers et secteurs.
Originalité de la nouvelle entité par rapport à Royal App Force: la volonté d’identifier très tôt, parfois même en amont de la genèse de l’idée, un partenaire industriel qui donne rapidement de l’ampleur au développement commercial.
Au sein de la nouvelle structure, Dominique Mangiatordi officiera surtout en qualité de “coordinateur et conseiller”. La direction générale opérationnelle, elle, sera assumée par Emma Bauden, sa chef de projet (française) chez Royal App Force, spécialisée à l’origine en marketing digital, qu’il avait croisée la première fois lorsque tous deux travaillaient pour HomeAdvisor.
Chose importante: Øpp sera bel et bien une société belge, basée à Liège, là où Royal App Force avait un pied en Belgique et un autre, plus important, à Aix-en-Provence. Emma Bauden, qui vit toujours à Aix-en-Provence, viendra régulièrement en Belgique, promet Dominique Mangiatordi.
Mère-porteuse
Hormis la gamification, les applis que développe Øpp ont deux traits caractéristiques en commun. D’une part, le fait qu’elles soient généralement codéveloppées avec un spécialiste du processus métier visé.
D’autre part, le fait qu’elles aient toutes vocation à être adoptées, à plus ou moins court terme, par un partenaire commercial, voire industriel. Une adoption qui, selon le cas, pourra prendre diverses formes. Une utilisation comme simple client – mais il n’y aurait là rien d’original dans l’approche commerciale d’Øpp. Un rachat pur et simple, comme ce fut le cas pour Peak Me Up, rachetée par Efficy et intégrée à son catalogue (l’appli continuera d’être commercialisée séparément mais sera aussi intégrée au CRM). Ou un partenariat commercial, avec possible entrée au capital.
La prochaine appli visera-t-elle la relation médecin-patient dans le contexte spécifique d’un suivi efficace des traitements?
Pourquoi se mettre, d’emblée, dans une optique de possible exit au niveau de chaque création? Dominique Mangiatordi l’explique en revenant sur le scénario de Peak Me Up. “Efficy était pour nous synonyme de plus grande force de frappe commerciale. Si nous avions continué seuls, nous aurions sans doute mis un an ou deux de plus pour atteindre le même point. Le marché évolue tellement vite… Un simple partenariat ne nous aurait pas permis d’aller aussi vite.”
Emma Bauden: “Identifier très tôt un partenaire business pour déboucher plus rapidement sur des contrats et augmenter le chiffre d’affaires.”
Emma Bauden confirme: “Généralement, Øpp apportera une idée, un concept, une expertise en développement. Mais nous recherchons d’emblée un partenaire business qui puisse nous accompagner dans le business development. Nous n’attendons pas forcément d’avoir identifier un tel partenaire pour lancer une appli mais nous voulons rester dans ce modèle qui est après tout sain puisqu’il débouche plus rapidement sur des contrats, permet de rentabiliser l’appli et d’augmenter le chiffre d’affaires.”
Si l’idée de base – gamification d’un processus – émanera donc généralement de l’équipe Øpp, l’inverse n’est pas exclu. Si une entreprise vient avec une idée qu’elle voudrait concrétiser, la société ne se fermera pas à cette opportunité.
Quel genre de “business partner” recherche Øpp? La taille n’a pas d’importance a priori, indique Emma Bauden. “C’est surtout l’expertise du partenaire, le feeling, l’envie, le fait de partager une même vision qui sont importants.”
Trois applis sur la rampe de lancement
Les trois premières applications que commercialisera Øpp étaient en gestation depuis un certain temps au sein de Royal Air Force. Nous avions déjà eu l’occasion de vous en brosser les principales caractéristiques.
HappyFormance est une solution de gestion gamifiée de ressources humaines (coaching, gestion d’équipe…). Elle s’inspire des concepts d’“entreprise libérée” et de décloisonnement des rôles, concepts prônés par Laurence Vanhée, spécialiste RH, co-conceptrice de l’application, et s’appuie sur le principe d’une gestion des objectifs professionnels (OKR – Objectives and Key Results) en mode collaboratif.
Les objectifs de chacun et ceux de l’équipe sont visibles par tous. La quête de ces objectifs est “ludifiée” via recours à des incitants du genre miles à collecter, bateau sur lequel tout le monde est embarqué – et qui doit se transformer de frêle esquif en fier paquebot, et en permettant à chacun de se glisser tour à tour, virtuellement, dans la peau d’un simple matelot ou d’un capitaine…
Cette première appli a fait ses débuts commerciaux en juin et a réussi à épingler quelques premières références (en majorité française) à son tableau de chasse. On y trouve par exemple la Société Générale (banque), la Maif (compagnie d’assurance) ou encore Thalys. Sans oublier ALD Automotive.
Ces premiers convaincus jouent le rôle de clients-pilote et contribuent à “vérifier nos hypothèses”, souligne Dominique Mangiatordi.
Pour cette phase de lancement, le rythme d’adaptation (enrichissement, réorientation…) des fonctions de l’appli est soutenu: une nouvelle version par trimestre.
Deuxième application: SeeYa, actuellement en phase bêta finale. Elle a trouvé quelques cobayes en Belgique, notamment à la Chambre de commerce de Liège et à la Région wallonne.
SeeYa se définit comme une “solution d’accélération de réseautage professionnel”. Une sorte de Tinder appliqué à des contextes d’événements professionnels. En combinant la liste des participants à leurs infos de profil LinkedIn, l’appli permettra aux participants qui le désirent (pas de push agressif, tout se fait sur base de volonté déclarée) d’entrer en contact avec les autres, d’engager la conversation via messagerie instantanée.
SeeYa opèrera non seulement dans le cadre – et l’espace – d’un événement mais aussi dans un rayon d’action nettement plus large. Une fonction “radar” permettra en effet de repérer, quel que soit l’endroit (business) où l’on se trouve, des personnes de sa communauté de contacts se trouvant dans un rayon proche (minimum 500 m, sans limite supérieure). Mais, pour des raisons de respect de la vie privée, seule la distance sera mentionnée, pas l’endroit exact où se trouve la personne.
A elle, sur invitation (un simple swipe à l’écran du mobile), de répondre favorablement ou non à la sollicitation.
Jusque là, rien de très original. Le nombre d’applis de ce genre explose depuis quelque temps.
L’originalité et l’ADN de Øpp sera, ici encore, l’aspect ludique. Plus une personne sera “swipée”, invitée par d’autres pour une prise de contact, un échange, une rencontre, plus son degré de popularité gonflera. Plus une personne en suggèrera d’autres à sa communauté, plus elle gagnera des points. Et la gradation en popularité sera exprimée en… petites figurines animalières. Exemple: de simple lapin, il s’agira de se transformer petit à petit en loup blanc.
Recruter sympa
Troisième processus auquel Øpp s’attaque via la gamification: le recrutement par cooptation. Autrement dit, par recommandation d’un employé, d’un collègue. L’appli Hunterz a été développée en collaboration avec la société bruxelloise xpertize.be.
La métaphore ludique, ici, est celle… du chasseur de prime. Plus un employé recommandera – avec succès – de personnes pour un poste vacant, plus il collectera de points, avec l’espoir de gains bien réels octroyés par sa société. Que la personne recommandée soit finalement embauchée ou non, le coopteur demeure informé de l’évolution de la candidature.
“La cooptation gagne du terrain comme méthode de recrutement”, souligne Dominique Mangiatordi. “C’est à la fois une manière de réduire les coûts de recrutement et de favoriser l’implication des collaborateurs. Des études ont par ailleurs démontré que les personnes recrutées par cooptation ont tendance à rester plus longtemps dans l’entreprise…
Le problème de la cooptation est que cela restait jusqu’ici quelque chose de très ennuyeux et que les coopteurs ne restent pas forcément impliqués sur le long terme. La gamification de l’appli peut y apporter une solution…”
Deux premières sociétés ont acheté la solution: S2I, une société de services IT français, et, en Belgique, l’un des principaux bureaux conseil spécialisés en audit, gestion et fiscalité.
Deux applis par an
Pour l’avenir, Øpp veut garder un rythme de développement soutenu et parle de deux nouvelles applis par an.
Quelles seront les prochaines? La réflexion est encore en cours mais plusieurs thématiques semblent inspirer Dominique Mangiatordi. Notamment, la gamification des processus de relation médecin-patient dans le contexte spécifique d’un suivi efficace des traitements, et le phénomène des bots auxquels le co-fondateur d’Øpp désirerait insuffler davantage de personnalité. Jusqu’à déléguer à cet agent virtuel un maximum d’autonomie et de réalisme par rapport à l’utilisateur humain qu’il est sensé épauler.
MeusInvest ne lâche plus Mangiatordi
L’invest liégeoise suivrait plutôt Dominique Mangiatordi à la trace. Elle avait déjà investi dans Royal App Force et vient de renforcer sa participation dans Efficy, pour mieux suivre l’évolution de Peak Me Up. La revoici partenaire – minoritaire : 22% – au capital d’Øpp. Dominique Mangiatordi en est le principal actionnaire.
Autres actionnaires: la PDG, Emma Bauden, et Christophe Gossiaux, jusqu’ici responsable IT et développements chez Royal App Force.
Pour ses premiers pas, Øpp sous-traite ses développements à Globule Bleue et à une agence marseillaise.
Les 3 premiers recrutements – en cours à Liège – viseront l’engagement d’un(e) responsable business development, d’un(e) gestionnaire de projets mais aussi d’un profil développeur… “qui est appelé à entrer rapidement au capital”. Histoire d’en faire un élément majeur de l’équipe.
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