Bruxellois et physicien de formation, Nicolas Pettiaux a fait de la recherche et de l’enseignement à l’Université libre de Bruxelles pendant 10 ans avant de rejoindre le privé puis l’administration. En 2003, il opère un retour aux sources vers l’enseignement (il est actuellement maître assistant à l’Ecole supérieure d’informatique à Bruxelles- HE de Bruxelles). C’est au cours de ses études qu’il va découvrir les logiciels libres, avant d’en devenir l’un des chantres les plus actifs en Belgique.
Nicolas Pettiaux est “tombé” dans le libre en 1987, lorsqu’il a repéré les travaux de Donald Knuth, “un mathématicien hors norme.” Voir notre encadré ci-dessous.
Son parcours
“Mon doctorat portait sur la modélisation d’ondes laser. A l’époque, on n’avait rien de fonctionnel pour la mise en page de documents scientifiques. Enfin si… j’ai découvert le langage TeX mis au point par Donald Knuth, un mathématicien hors norme qui a écrit une série de livres sur l’art de programmer, devenus aujourd’hui des ouvrages de référence. C’est pour avoir une bonne qualité de mise en page du deuxième volume de son “The Art of Computer Programming” qu’il a développé TeX. Et comme il n’était pas content des polices disponibles, il a mis au point son propre programme de création de polices de caractères, Metafont.
C’est de là que vient mon intérêt pour le libre. Il a laissé le code ouvert et l’a mis en circulation pour qu’on l’améliore. Il offrait un dollar hexadécimal pour tout bug découvert. La somme était dérisoire, environ 256 cents, mais cela a fini par être considéré comme une récompense aussi prestigieuse que le Nobel de l’informatique! La seule restriction que Knuth imposait à toute modification ou nouvelle version est qu’elle n’ait pas le même nom. Voilà pourquoi la version reprise et améliorée du logiciel de Knuth par un autre chercheur en mathématique, Leslie Lamport, s’appelle LaTeX”.
“Très vite, j’ai apprécié la liberté, les ouvertures dont le libre est synonyme pour les usages, les contraintes qu’il supprime. Rapidement, j’ai pris aussi conscience des aspects éthiques sous-jacents, qui sont sans doute plus importants encore. Ceci a été confirmé par la lecture de différents ouvrages, dont ceux de Richard Stallman que j’ai rencontré à plusieurs reprises.
Pour moi, les logiciels libres, comme les contenus libres auxquels ils sont intimement liés, vont de pair avec la mission de transmission sans limite des connaissances à laquelle je tiens et dans laquelle je m’investis.
J’aime faire adhérer les autres aux idées qui me sont chères et je me suis investi activement depuis 1998 dans la promotion de logiciels libres en Belgique, avec de très nombreuses “luttes” contre les brevets ou la normalisation abusive de formats de fichiers ou encore pour le logiciel libre, les ressources éducatives libres, le partage de données et de cours.
J’ai été très actif en Belgique dans la lutte contre les brevets logiciels, avec la victoire que l’on sait en 2005.” [Ndlr: en juillet 2005, le Parlement européen rejetait le projet de Directive de la Commission sur la brevetabilité des logiciels qui prévoyait notamment que les “inventions mises en œuvre par ordinateur” soient susceptibles d’être protégées par des brevets. Petit rappel des faits et des positions respectives via ce site]
Sur tous les fronts
Partout où il va, le libre pointe le bout de son code. “J’ai conseillé l’Unesco pour l’utilisation de logiciels libres. De janvier 2002 à juin 2003, j’ai été IT Manager à la COCOF [Ndlr: qui s’est largement mise au libre et a développé un système de gestion budgétaire encore en fonctionnement aujourd’hui, qui s’appelle NM, pour Non Marchand.]
Dans les années 2004-2005, j’ai formé les gens de Sabena Technics à Open Office.
En 2012, Oliver Schneider, aujourd’hui fonctionnaire général en charge de la simplification administrative à la Région wallonne [eWBS] et à l’époque directeur adjoint de l’ETNIC, m’a demandé de participer à la mise en place d’un projet de migration de l’administration de la Communauté française vers Libre Office.
Le hic, c’est que s’il avait réussi à faire accepter le projet, le budget, lui, n’a pas suivi!”
Nicolas Pettiaux: “Je suis préoccupé par les questions relatives à la défense des libertés individuelles dans un monde de plus en plus basé sur l’utilisation des technologies électroniques, et je participe au développement de biens communs informationnels, parmi lesquels le logiciel libre.”
Nicolas Pettiaux enchaîne ensuite les projets et interventions autour du libre. Ici, une conférence à l’ULB avec Richard Stallman; là, la promotion du langage Python dans les départements scientifiques de l’ULB. Là encore, la proposition d’organiser en 2013 les Rencontres Mondiales du Logiciel Libre à Bruxelles, et le montage du dossier de départ.
Nicolas Pettiaux fait partie de tous les réseaux qui touchent au logiciel libre – de l’April [Association pour la Promotion et la Recherche en Informatique Libre], la principale association du libre dans l’espace francophone, jusqu’à l’Association Francophone des Utilisateurs du Libre, en passant par la Free Software Foundation (Europe), la Quadrature du Net, Creative Commons ou OpenStreetMap.
“Ce ne sont que des structures. Ce qui compte, c’est de faire des choses, d’organiser des rencontres, de prendre langue avec les politiques. Comme avec le Pacte du libre, que tous les présidents de parti signeront, même si cet engagement sera peu suivi d’effets. Il faut sans cesse suivre les dossiers”. Prochaine rencontre prévue à l’agenda: le 23 juin, à l’Ecole Supérieure d’Informatique à Bruxelles où Nicolas Pettiaux organise une rencontre avec les échevins en charge des bibliothèques publiques et/ou de l’informatique des 19 communes, et les directeurs des bibliothèques publiques.
Au menu, les développements mutualisés grâce aux logiciels libres, les SIGB libres (systèmes intégrés de gestion de bibliothèques) tels que PMB comme alternative aux SIGB propriétaires (tels que Vubis) et, en clôture, des exposés de présentation de catalogues PMB belges.
Pour Nicolas Pettiaux, “choisir PMB au lieu de Vubis permettrait aux bibliothèques d’économiser des milliers d’euros par mois et de redevenir maîtres de leurs données.”
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