Voici un peu plus d’an, le WeLL, living lab wallon dédié à l’e-santé, voyait le jour sur le site des WSL Labs à Liège.
Mission de ce Wallonia e-health Living Lab: favoriser et aider au développement et à la mise en oeuvre de solutions innovantes numériques dans le domaine de l’e-santé.
Et ce, comme le veut le principe-même d’un “laboratoire vivant”, en collaboration étroite avec les professionnels de la santé mais aussi et surtout avec les usagers eux-mêmes – depuis le stade de l’identification du besoin et de l’“idéation” (conception d’une idée de solution) jusqu’à son déploiement. Voir encadré ci-dessous pour plus de détails sur les trois axes d’activités.
Un an plus tard, le bilan du WeLL est annoncé comme plutôt satisfaisant: 13 projets au compteur (dont trois doivent encore être formalisés et attendent la signature finale des partenaires), des actions qui ont concerné divers acteurs à travers tout le territoire wallon (Liège, Namur, Mons…) et même Bruxelles, un démarrage du côté des projets commandités et réalisés pour le compte d’acteurs économiques (garants d’un début d’autonomie financière).
Tester les usages en télémédecine
Dans les prochains jours, nous reviendrons plus en détails sur plusieurs projets menés par exemple sur sollicitation du Réseau Santé Namur, de Médecins Sans Frontières ou d’un membre du Pôle de Compétitivité Biowin.
Trois contextes d’intervention
Le WeLL procède par projets – des idées plus ou moins mûries qui émanent d’acteurs de nature potentiellement très variée. Trois axes d’activités se côtoient (voire s’interpénètrent au fil de l’évolution des projets):
- l’innovation technologique à des fins de développement économique: amélioration de produits et services existants, identification ou validation de nouveaux marchés potentiels, définition de nouveaux marchés pour des technologies existantes, création de nouveaux produits ou services, pour répondre aux besoins d’acteurs du secteur de la santé et du bien-être; ces commanditaires finançant le projet
- l’innovation sociale et sociétale: identification de solutions pour des problématiques nouvelles émanant d’autres acteurs que le monde économique
- la création et le transfert de connaissances: sensibilisation, découverte et analyse des implications des nouvelles technologies, échange de bonnes pratiques
Le WeLL en chiffres après un an d’activités:
– 13 projets (dont 3 en phase de discussion et signature)
– une équipe de 5 personnes, dont 2 temps plein
– 22 ateliers de co-création et d’idéation
– des activités organisées dans 6 villes: Liège, Namur, Bruxelles, Mons, Charleroi, Louvain-la-Neuve
– une communauté de 425 personnes (ayant participé à un ou plusieurs ateliers; une dizaine sont quasi des permanents)
– un premier client commercial: Axa Assistance
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Concentrons-nous ici sur le projet en cours de réalisation pour le compte d’Axa Assistance, le premier client économique (payant) du WeLL (payant parce que des projets ont déjà été effectués pour des sociétés commerciales mais à titre gracieux dans la mesure où il s’agissait de start-ups…).
Axa Assistance, ce sont des services d’assistance dans le domaine automobile, des voyages (rapatriements de malades ou blessés, par exemple) mais aussi de la santé. Secteur assez nouveau pour cette société où elle explore le potentiel de nouvelles solutions en matière de soins intégrés (trajet allant de la prévention à la prise en charge) et de support aux patients souffrant de maladies chroniques. “Outils” à mettre en oeuvre: capteurs, objets connectés, télésurveillance, télédiagnostic…
Axa Assistance a commencé à offrir une solution intégrée de télémédecine (appli mobile, intégration de divers dispositifs de surveillance à distance, analyse médicale et soutien temps réel par une plate-forme animée par des professionnels de la santé) dans plusieurs pays.
Un projet a par exemple été mené avec succès au Portugal pour le suivi à distance de patients souffrant de maladies pulmonaires obstructives chroniques (MPOC).
La solution vient d’un tiers, à savoir une société canadienne, qui a développé l’appli mobile en collaboration avec Axa et qui assure le support et l’intégration des données de quelque 150 dispositifs (médicaux et fitness). Axa, pour sa part, assure le stockage des données et assure le volet humain, à savoir la plate-forme médicale, pour l’analyse médicale effectuée par une équipe d’infirmières et de médecins (des indépendants sous contrat Axa).
“Après 6 mois d’expérience portugaise, on a constaté une amélioration de l’état de santé des personnes, de leur style de vie et une réduction de 50% des réhospitalisations”, explique Glorys Santana Tapia, directrice produits chez Axa Assistance Belgique.
C’est cette expérience que la société veut reproduire en Belgique. Elle a donc fait appel au living lab WeLL afin de valider la transposition au contexte belge. “Nous sommes prêts à commercialiser la solution mais nous voulons prouver son utilité, démontrer qu’elle répond à des besoins réels [Ndlr: d’où l’importance d’une co-création avec les usagers], qu’elle améliore la qualité de vie du patient, le responsabilise et permet une réduction des réadmissions.”
Ce dernier argument s’inscrit évidemment dans le droit fil de la volonté du secteur des soins et des autorités publiques de réduire les durées d’hospitalisation, d’optimiser le parc de lits et de réduire les coûts pour la sécurité sociale.
Glorys Santana Tapia (Axa Assistance): “Notre but n’est pas de remplacer le médecin mais de faciliter le suivi des patients à domicile. Il n’existe pas encore, sur le marché belge, d’offre commerciale pour un suivi intégré de pathologie précise, avec identification de situations d’alerte.”
Le projet-pilote devrait impliquer deux hôpitaux liégeois (le CHU et le CHR La Citadelle). Avec l’espoir d’étendre le déploiement à plus grande échelle après avoir remis un rapport positif auprès de la ministre Maggie De Block.
Pour le projet-pilote, Axa Assistance imagine d’effectuer une télésurveillance de patients souffrant de diabète, d’hypertension et/ou de MPOC. Au WeLL, on pencherait plutôt pour la télésurveillance de maladies cardiaques. Le choix final des pathologies télésurveillées sera fait par les hôpitaux-pilote.
Le scénario qui sera validé concernera aussi le schéma idéal de télésurveillance: en direct entre le patient et l’hôpital (voire son généraliste) ou par l’intermédiaire de la plate-forme Axa.
Dernier détail: le stockage des données se fera sur une infrastructure située pour l’instant à Paris mais pourrait être déplacé en Belgique “en cas de croissance de la volumétrie.”
Les autres projets
Au total, le WeLL compte donc actuellement 13 projets en cours, de durée variable (allant de quelques semaines à plus d’un an) en fonction de la problématique à résoudre.
Citons ainsi au passage:
– Image et Moi: pour un accès aisé des patients à leurs dossiers d’imagerie médicale
– Happy Mum: l’utilisation de technologies nouvelles (numériques notamment) pour lutter contre le “blues” des jeunes mamans
– Pharmily: start-up qui a développé une appli mobile pour le transfert d’information et les échanges entre patients et pharmaciens (notamment à des fins de pharmacovigilance et de recyclage de médicaments)
Deux projets en devenir, qui porteront sur la conception et le développement de nouveaux dispositifs médicaux dans les domaines de la neurologie/néphrologie et de la cardiologie. Chacun de ces projets est porté par un médecin hospitalier liégeois (au CHU et au CHR La Citadelle).
Deux ans pour convaincre
Dans le cadre du programme Creative Wallonia, le WeLL a été doté d’un financement public de 800.000 euros, devant couvrir ses deux premières années d’activités. Au-delà, le living lab devra en principe pouvoir voler de ses propres ailes en allant chercher ailleurs des sources de financement et de viabilité: projets de recherche (en ce compris européens), projets menés pour le compte d’acteurs économiques (qui détiendront tout ou partie de la propriété intellectuelle générée), services à destination des Pôles de Compétitivité, formations, sponsoring…
L’un des 3 premiers projets imaginés dès le lancement du WeLL fut un “Idéematon”. A savoir, un atelier de réflexion sur la meilleure manière de collecter – en ce compris via les nouveaux outils numériques – les besoins des patients et de faire dialoguer les différentes parties prenantes.
Depuis, il a été mis en pratique pour les besoins de Médecins Sans Frontières. Et pourrait trouver d’autres preneurs. “Cette problématique est commune à toutes les organisations”, souligne Laura Vigneron, directrice du WeLL. Dès lors, cet Idéematon pourrait à l’avenir se transformer en service récurrent, porteur de rémunération pour le living lab.
“Notre souhait est que les projets de l’axe économique alimentent l’axe social et vice versa”, déclare David Dalla Vecchia. “Un projet dans l’axe social peut parfaitement prendre tout son sens dans l’axe économique.” Cette fertilisation croisée est jugée nécessaire pour la viabilité à long terme du living lab. “Le financement du lab uniquement sur des projets économiques ne suffit pas.” … même s’il en est à la fois un levier majeur et une obligation future.
Dans l’état actuel des choses, au vu de l’évolution des activités, David Dalla Vecchia estime qu’un financement annuel à hauteur de 150.000 euros est viable, à condition bien entendu de consolider les autres sources.
S’appuyer sur l’écosystème
Pour identifier à la fois les besoins et problématiques, des projets qui pourraient lui être confiés, ainsi que des utilisateurs pouvant intervenir dans le processus d’idéation et de validation, le WeLL en appelle notamment à divers acteurs, tels que l’Infopole Cluster TIC et les pôles de compétitivité, à commencer par BioWin (biotechnologies) et MecaTech (génie mécanique, intéressé notamment par les dispositifs médicaux, capteurs…). A eux, dans une certaine mesure, de solliciter demandes et propositions. “Les Pôles de Compétitivité sont notamment intéressés par les activités de WeLL en raison de l’implication directe que nous assurons avec les utilisateurs finaux”, indique David Dalla Vecchia, directeur des WSL Labs.
Des contacts avec Biowin a déjà émergé par exemple le projet Brain Peace, mené avec Human Waves, spin-off de l’ULB. Nous y reviendrons dans un futur article. Par ailleurs, le WeLL et Biowin se retrouvent partenaires du Festival ImagéSanté (projection de films documentaires “jetant un regard croisé entre le cinéma, la science et la santé” mais aussi ateliers et conférences – Liège, du 14 au 19 mars).
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