ID2Move (nom qu’a finalement adopté le projet Diginnov) est un nouvel incubateur dédié aux drones (ou potentiellement à d’autres systèmes à pilotage autonome) qui est en passe de voir le jour à… Nivelles. Loin, déplorent certains, de toute infrastructure aéronautique pré-existante.
L’idée de créer de toutes pièces un site où incuber, tester, prototyper des solutions de type “systèmes autonomes” peut en effet paraître peu efficace alors que divers acteurs se sont déjà implantés près d’aérodromes et terrains d’aviation, notamment du côté de Saint-Hubert ou de Liernu.
Nivelles et l’animateur économique local qu’est CAP Innove (Nivelles) font donc le pari de créer un nouveau lieu, vers lequel attirer à la fois des porteurs de projets, des start-ups existantes qui s’y relocaliseraient, ainsi que des équipes académiques venues de l’Ecole Polytechnique de l’ULB et de son département ATM (Aero-Thermo-Mécanique) ou d’autres universités, “tant belges qu’étrangères”. Des contacts et marques d’intérêt se seraient déjà manifestés, venant de l’UCLouvain, des facultés agronomiques de Gembloux, de la faculté Philosophie de l’UMons (pour des projets orientés éthique), de facultés de Droit….
Des contacts ont également été noués avec le Nord de la France, notamment avec le Centre national français d’Etudes et de Recherche Aérospatiale Onera (Palaiseau, près de Paris).
Patrick Mascart (ID2Move): “L’incubateur a clairement une orientation de recherche universitaire. Nous sommes ouverts à tout type de projet mais le conseil de gouvernance décidera par exemple de l’acceptation ou non de projets à connotation militaire. On peut imaginer que de la défense anti-drone soit acceptable mais pas des drones d’attaque…”
“Il existe certes d’autres sites, notamment le DronePort en Flandre (Saint-Trond) mais il y avait une claire demande d’une zone de test similaire adressant le marché francophone belge et le nord de la France”, indique Patrick Mascart, responsable de l’incubateur ID2Move, par ailleurs expert belge de l’industrie du drone (il est le directeur commercial d’Idronect, auteur d’une solution de gestion de drones, et président de la BeUAS, Belgian Unmanned Aircraft Systems Association).
Every-man’s land
“Le but est de devenir le point central d’un écosystème dédié aux drones. Pour cela, nous voulons attirer un maximum d’acteurs sur place, avec, si possible, une présence permanente ou ponctuelle d’acteurs tels que le Pôle de Compétitivité SkyWin, qui pourrait procurer de l’aide au montage de projets dédiés aux drones, l’administration de l’aéronautique, ou encore Skeyes [Ndlr: l’ancienne Régie des Voies Aériennes].
On pourrait imaginer que, dans un premier temps, l’un de leurs collaborateurs soit présent une fois par mois, et que leur taux de présence augmente plus tard.”
ID2Move est une initiative portée par l’intercommunale inBW et l’ULB qui sont les deux principaux investisseurs à ce stade. Leur apport prend la forme de la mise à disposition des bâtiments (qui appartiennent à l’inBW) et de la prise en charge d’une partie des frais de fonctionnement.
Une demande de subsides a été introduite auprès du cabinet du ministre wallon Pierre-Yves Jeholet ainsi qu’à la Province (Brabant wallon). “L’intervention de potentiels partenaires privés est à l’étude”, ajoute Patrick Mascart.
Précision: l’incubateur se concentrera en principe sur l’accompagnement de projets ne portant pas directement sur les engins matériels (drones et autres systèmes à pilotage automatisé) mais plutôt sur les solutions qu’ils permettent de mettre en oeuvre. “Les systèmes eux-mêmes, les “porteurs”, existent déjà bien souvent. Nous nous intéressons davantage aux technologies d’intelligence artificielle, à l’IoT, au big data, au contrôle de vol, au développement de capteurs…”, indique Patrick Mascart.
ID2Move espère-t-il réellement pousser des acteurs tels que Drone Valley, actuellement ancré à Libramont, à se relocaliser du côté de Nivelles?
“Ils disposent certes de leur propre zone près de Libin mais on peut imaginer qu’ils viennent à Nivelles pour effectuer des tests ou vols spécifiques qui ne sont pas possibles à Libin ou à Saint-Hubert.
Nous ne voulons d’ailleurs pas concurrencer qui que ce soit. ID2Move est avant tout un centre de recherche universitaire. Et nous aurons des spécificités qui seront complémentaires à celles des structures déjà existantes. Ainsi DronePort, en Flandre, est parfaitement adapté pour des vols sur de longues distances mais ne peut proposer des survols de bâtiments comme nous pourrons le faire dans la zone industrielle.”
Un peu de tout
Si ID2Move se qualifie d’incubateur, le site servira en fait pour de multiples usages. Le coeur de l’infrastructure sera bien entendu les deux zones de test de drones, en intérieur et extérieur. L’équipement intérieur inclura un dispositif de caméras pour la détection et le suivi des mouvements et un simulateur de vents. “L’aménagement d’une chambre climatique, à l’échelle, pour tests en situation réelle, est également à l’étude. Elle permettrait de reproduire des conditions climatiques diverses – pluie, vent, neige, dans une gamme de températures allant de – 40° C à + 60° C.
C’est évidemment un investissement lourd pour lequel des pistes de financement seront recherchées si la demande du marché se confirme.” Pour l’évaluer, une étude a été lancée au sein de l’ULB.
Patrick Mascart (ID2Move): “ID2Move est avant tout un centre de recherche universitaire. Et nous aurons des spécificités qui seront complémentaires à celles des structures déjà existantes.”
En plus de ces zones de test, des espaces ont également été aménagés ou sont prévus pour accueillir des espaces de bureaux modulables (que des start-ups ou des sociétés pourront louer), de coworking, de conférences…
Côté incubateur de projets et de sociétés, la gamme de services qui seront proposés par ID2Move va de l’analyse de plans d’affaires ou l’aide à la création d’une structure juridique jusqu’à des services plus spécifiques (gestion de dérogations, organisation logistique pour des tests effectués sur d’autres sites, y compris potentiellement à l’étranger…), en passant par du réseautage classique ou de l’accompagnement à la recherche de financements (privés ou publics).
“Le site sera organisé en deux zones. Une zone que nous qualifions de “blanche” qui sera ouverte et accessible à tous. Elle inclut notamment l’espace de coworking. Et une “zone rouge” où pourront se dérouler les projets plus sensibles, avec sécurisation d’accès poussée.”
Premiers locataires
“Attirer un maximum d’acteurs sur place”. Quels sont ceux qui ont déjà répondu présents ou qui envisagent une présence à l’ID2Move?
Parmi les premiers locataires, citons Look4Drone, société bruxelloise qui propose des services de photogrammétrie, Deltacopter, qui y planchera sur des projets orientés industrie et utilisera également à cette fin la zone de test, ou encore Drone2Be, petite société de consultance qui s’est spécialisée dans l’imagerie aérienne par drone pour l’analyse de risque et la prévention.
D’autres accords ou contrats pourraient être passés avec divers acteurs. Les noms de Besix ou d’Orange ont par exemple déjà été évoqués. Du côté de Besix, le projet pourrait concerner des tests et la validation de transports de matériaux par drone, “mais nous n’en sommes encore qu’au stade des discussions préalables, un stade purement exploratoire”, précise Patrick Mascart. “Besix ne viendrait d’ailleurs à Nivelles que pour des projets spécifiques, pas pour y baser une équipe.”
Orange, pour sa part, pourrait utiliser les services d’ID2Move dans le cadre de ses projets IoT.
Quant à ALX Systems, elle pourrait utiliser certaines espaces de bureau et de test pour se livrer à des exercices de détection et de surveillance visuelle.
Un espace dédié
L’un des anciens bâtiments occupés par Peugeot (un ancien car wash) sera réaménagé d’ici septembre en trois espaces distincts: 200 m2 de bureaux sur deux étapes, 100m2 pour le fablab et 200m2 pour l’espace de coworking.
100m2 supplémentaires sont encore disponibles, pour des bureaux, dans les locaux de Cap Innove.
L’espace le plus vaste (ancien bâtiment Peugeot; 5.000 m2) doit, lui aussi, être rénové mais peut déjà être partiellement occupé. 1.500 des 5.000 m2 seront dédiés aux tests et vols internes de systèmes autonomes.
Pour installer ses activités, l’incubateur ID2Move a récupéré un ancien site de Peugeot, comprenant deux bâtiments et une piste. Il occupera ainsi une surface de quelque 3.000 m2 (voir encadré ci-contre pour quelques détails) mais, au total, c’est une zone de vol de 238 hectares qui pourra être utilisée à des fins de test et de développement: les 4 ha de l’ancienne piste de Peugeot, 75 ha de zone agricole et 155 ha en zone industrielle. Cette dernière permettra de tester le fonctionnement des systèmes “en situation réelle”.
Moyennant, bien entendu, les nécessaires dérogations (des discussions sont actuellement encore en cours avec l’administration aéronautique)… “Les tests pour vols semi-automatiques sont déjà autorisés, reste à obtenir les dérogations nécessaires pour des vols entièrement autonomes. Nous espérons obtenir une réponse avant les élections…”, déclare Patrick Mascart.
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