Au lendemain de l’annonce du Plan du Numérique par le gouvernement wallon, la fédération Agoria avait émis un message de satisfaction, par voie de communiqué, soulignant toutefois qu’il s’agissait désormais de “transformer l’essai”. Autrement dit, de transformer les intentions en actions.
Jusqu’où va la satisfaction et où commencent les mises en garde? Nous avons sollicité des commentaires plus détaillés d’Agoria – cette dernière, rappelons-le, ayant été associée aux travaux du Conseil puisque Baudouin Corlùy, directeur d’Agoria ICT, y siégeait.
Le message de satisfaction se justifie notamment par la méthode utilisée: “contrairement à d’autres plans antérieurs, le document remis par le Conseil du Numérique précisait les intervenants ainsi que les délais [Ndlr: préconisés] de mise en oeuvre, mesure par mesure.”
Notons toutefois que ce calendrier n’était pas complet et que des détails précis manquent également, à cet égard, dans le Plan final du gouvernement mais au moins, souligne Thierry Castagne, patron d’Agoria Wallonie, “on n’est pas dans l’incantatoire.”
Deuxième motif de satisfaction: le contenu du Plan (la proposition du Conseil du Numérique a été reprise quasi telle quelle par les décideurs gouvernementaux). Un contenu qui a été soumis pour évaluation à un panel d’entreprises membres d’Agoria. Résultat? “Une perception positive de ce que contenait le rapport du Conseil du Numérique. Il illustre bien la volonté des entreprises wallonnes, preuve à nos yeux que le Conseil du Numérique était bien représentatif”, déclare Maxime Ancion, conseiller général chez Agoria Wallonie. “Ce qui a également été apprécié, c’est le caractère évolutif du Plan. Chose importante notamment aux yeux des entreprises qui ne se retrouvaient peut-être pas tout-à-fait dans le contenu actuel.”
Ce satisfecit peut, dans une certaine mesure, sembler étonnant, certains, parmi les plus critiques, ayant relevé une certaine frilosité du rapport du Conseil, avec un contenu jugé trop générique, trop conciliateur, où chacun pouvait s’y retrouver et qui ne provoquerait ni vague ni blocage de la part des responsables gouvernementaux…
Réaction de Maxime Ancion: “certains ont certes pu estimer que le Plan n’est pas assez ambitieux ou disruptif. Mais, d’une part, quand on voit que l’un des objectifs est de transformer la Wallonie en “giga-région” [lisez: en région ultra bien connectée], il y a là de l’ambition. Par ailleurs, il était important que chacun s’approprie ce Plan, puisse s’y retrouver et que tout le monde marche dans la même direction…”
Des mises en garde, malgré tout
“Dans l’état actuel des choses, nous voulons avant tout participer à la construction du Plan”, ajoute, pour sa part, Baudouin Corlùy. “Mais nous appliquerons un suivi rapproché et, si nécessaire, sur base de la consultation de nos membres, nous réagirons auprès des acteurs publics si l’action ne respectait pas les intérêts des entreprises.”
Agoria met également l’accent sur la nécessité qu’il y a selon elle à ce que le Conseil du Numérique (nouvelle mouture) poursuive sa tâche de surveillance et se profile comme le réel “pivot de la politique numérique en Wallonie.” voir ci-dessous
Autre mise en garde: la nécessité que le Plan du Numérique entraîne réellement l’adhésion et l’action concrète de tous les Ministres.
“Tous les Ministres doivent s’approprier les mesures qui relèvent de leurs compétences. Paul Furlan est chargé des villes intelligentes, Maxime Prévot de la santé, l’enseignement relève de la Fédération Wallonie-Bruxelles… Plusieurs domaines relèvent d’autres ministres, parfois de plusieurs: énergie, mobilité, environnement, aménagement du territoire, informatique, pouvoirs locaux… Le dossier ITS (intelligent transport systems) inclut un volet infrastructure, un volet mobilité, un volet aménagement du territoire… Il est essentiel d’échapper aux rivalités et autres velléités personnelles. Le tout, maintenant, est de transformer les annonces en actions, dans des délais acceptables, et d’intéresser les autres Ministres, au-delà des simples intérêts politiques.”
Les projets prioritaires
Les premières mesures à être mises en oeuvre dans le cadre du Plan du Numérique concernent notamment quatre chantiers:
- le Digital Wallonia Hub (structure virtuelle d’activation de relations et de collaboration entre industrie et recherche
- le fonds d’investissement pour le numérique, qui devrait être officiellement dévoilé en février
- les open data
- et le guichet unique pour l’évaluation et l’octroi des demandes d’aide. Date-butoir pour sa mise en place: 1er janvier 2017.
Pour ce qui est du Digital Wallonia Hub, Thierry Castagne relève que l’analogie avec iMinds (Flandre) utilisée notamment par l’ADN et le Ministre Marcourt – et relayée par la presse – est quelque peu irréaliste, voire illusoire, tant cet organisme et l’écosystème flamand dans son ensemble ont pris de l’avance et se situe à des quasi-années-lumière de la “dimension” wallonne.
Ce qu’il faut avant tout retenir, selon lui, de l’initiative, c’est le terme et le concept de “hub”. Autrement dit, un mécanisme faisant collaborer R&D, universités et acteurs industriels “afin de développer des projets alimentés et liés aux Pôles de Compétitivité, en mode transversal. Le “Hub” est l’une des réponses au besoin de compléter le paysage des Pôles par un axe transversal numérique. Le Hub n’est pas un Pôle au sens strict du terme mais la méthode est la même puisqu’il vise à rapprocher le marché, l’industrie et la recherche. Et c’est là une chose qu’Agoria salue. Nous serons un apporteur d’entreprises prêtes à s’inscrire dans ce schéma et à lancer des projets.”
Thierry Castagne (Agoria Wallonie): “Nous serons un apporteur d’entreprises prêtes à s’inscrire dans la dynamique du Digital Wallonia Hub et à lancer des projets.”
“L’essentiel, dans un premier temps”, embraye Maxime Ancion, “est d’assurer une bonne coordination et de définir une vision précise de ce qui existe et de ce qui se passe sur le terrain. Et de la mettre au service de la recherche fondamentale et de projets industriels pouvant produire une valeur rapide.”
Rôle “pivot” pour le Conseil du Numérique
Thierry Castagne: “Pour éviter qu’on ne tombe de haut, il est essentiel de conserver un rôle-pivot au Conseil du Numérique. Il doit être le lieu où on procède à l’évaluation de la mise en oeuvre du Plan du Numérique, pù on surveille son exécution, en toute indépendance. Son existence est aussi une manière de continuer à intéresser les entreprises et de les faire adhérer au projet.”
Même commentaire de la part de Baudouin Corlùy: “il reviendra au conseil, selon d’assurer le suivi du Plan, de veiller à la mise en oeuvre de mesures concrètes, à une évaluation au travers de KPI, de veiller au budget et à l’agenda.”
La désignation des membres du Conseil “2.0” (plus trapu, composé de 6 personnes dont 5 responsables, chacune, d’un des 5 axes du Plan) ne devrait plus tarder. Pierre Rion, président reconduit du Conseil, a soumis sa petite liste de noms au gouvernement dès décembre. On attend le verdict.
Quel type de profil voudrait y retrouver Agoria? “Des personnes ayant la capacité de taper sur la table lorsqu’il le faut.”
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