La carte d’identité informatique des entreprises wallonnes est encore un cliché très contrasté. L’informatisation se poursuit mais les résultats demeurent fort dissemblables selon que l’on parle simplement de présence d’ordinateurs dans les murs, d’exploitation d’un site Internet, de connexion mobile à Internet ou d’utilisation de solutions telles qu’un CRM, un ERP ou un système de gestion logistique/stocks.
A lire également…
Parmi les autres concepts et tendances étudiés par l’AWT cette année:
- Le “nouveau monde” du travail: les sociétés wallonnes face au télétravail et au principe du “bring your own device”
- Faire du cloud… sans le savoir: quel usage les entreprises wallonnes font-elles d’infrastructures, applications et services externalisés.
Au rayon équipements, la pénétration des ordinateurs est en progrès puisque le taux d’équipement se rapproche sensiblement du ratio un ordinateur/un employé: il est actuellement de 0,92% contre 0,86 voici un an. A noter que les tablettes exercent à cet égard un effet majeur puisque si l’on retire leur part du total, le ratio retombe à 0,82.
Ce score global de 0,92 cache toutefois une grande disparité des taux d’équipements. Les champions sont les TPE (trés petites entreprises; moins de 5 personnes), avec en moyenne 1,37 ordinateur par employé. Le succès des tablettes en est la cause.
Les scores par contre baissent à mesure que la société gagne en envergure. Nombre moyen d’ordinateurs en PME: 0,55 (1 ordinateur pour 2 personnes). En grande entreprise, le ratio moyen est d’un ordinateur pour 3 personnes.
Disette logicielle
Le taux de pénétration (moyenne) de logiciels CRM ou de gestion des stocks est en stagnation à 7%. Score largement tiré par le bas par la situation dans les TPE. Les PME (avec 19%) et les grandes entreprises (26%) s’en tirent mieux, très logiquement, sans que l’on puisse toutefois pousser un cocorico.
Du côté des ERP, les choses ne semblent guère bouger davantage: les chiffres moyens de pénétration n’affichent en effet qu’une progression de 2%. Désormais 6% de toutes les entreprises wallonnes disposent d’un ERP. Ce qui reste plus que modéré. A nouveau, ce sont les TPE qui font baisser la moyenne, avec un taux d’équipement limité à 5%. Un taux qui ne progresse d’ailleurs pas par rapport à 2011.
Dans les autres catégories, 20% des PME et 59% des grandes entreprises utilisent un ERP.
Petit tableau récapitulatif.
Equipement & Usages | TPE | PME | Grande entreprise | Moyennes 2012 | Progression 2011-2012 |
Au moins un ordinateur | 92% | 99% | 100% | 92% | statu-quo |
Connexion à Internet | 82% | 95% | 100% | 83% | + 1% |
Site Web | 32% | 66% | 98% | 32% | – 2% |
Connexion mobile à Internet | 29% | 41% | 74% | 29% | + 10% |
Comptabilité | 34% | 70% | 94% | 36% | + 4% |
Gestion de la paie | 7% | 38% | 83% | 9% | – 1% |
Isabel | 12% | 53% | 84% | 15% | – 3% |
ERP | 5% | 20% | 59% | 6% | + 2% |
CRM | 6% | 20% | 43% | 7% | statu-quo |
GED | 6% | 13% | 58% | 7% | + 2% |
EDI | 4% | 11% | 34% | 5% | + 1% |
e-business | 9% | 18% | 53% | 9% | statu-quo |
Vente en-ligne | 9% | 8% | 24% | 9% | statu-quo |
Logiciel sur mesure | 18% | 41% | 76% | 20% | + 1% |
Le bond de 10% en utilisation de connexions mobiles s’explique par trois raisons majeures aux yeux d’Hélène Raimond, économiste et experte PME à l’AWT: la percée des tablettes et smartphones, la maturité des infrastructures réseau (GSM, Wi-Fi, filaire) et l’influence du Web 2.0 dans les habitudes.
Attention à la méthodologie
Précaution plus qu’oratoire: ces chiffres doivent être considérés avec prudence. Une petite comparaison avec les années antérieures révèle en effet pour certaines catégories… une baisse d’équipement.
Reprenons l’exemple de l’ERP et celui du CRM.
Baromètre | TPE | PME | 2010 | |
ERP | 2013 | 5% | 20% | 59% |
2011 | 5% | 17% | 64% | |
2010 | 3% | 15% | 51% | |
CRM | 2013 | 6% | 20% | 43% |
2011 | 9% | 22% | 52% | |
2010 | 10% | 25% | 38% |
Comment expliquer ces variations? Des sociétés auraient-elles décidé d’arrêter d’utiliser un ERP ou un CRM? Il y en a peut-être dans le lot mais selon Hélène Raimond, l’explication est sans doute ailleurs.
Plusieurs paramètres, à ses yeux, expliquent ces variances:
- le nombre fluctuant de PME et TPE (disparitions, faillites, échantillon variable)
- la précision ou l’exactitude des chiffres recueillis par l’AWT. Les chiffres donnés par les sociétés sont en effet fournis par des personnes ne disposant pas toujours forcément des détails précis ou exacts. Une assistante ou une secrétaire peut avoir une vision écornée. Même le responsable d’une société n’a pas toujours une idée précise de la situation. Toutes les personnes remplissant ou répondant au questionnaire ne fontt pas toujours la démarche de vérifier certaines choses auprès de la personne chargée de l’informatique (quand elle existe).
- la marge d’erreur des chiffres se situe entre 2 et 4% mais peut parfois être plus importante à mesure que l’échantillon se réduit.
Prudence donc dans l’interprétation des chiffres et de leur variance d’une année à l’autre.
Pour compliquer encore les choses et l’analyse, on relève aussi des taux différents selon que l’on considère l’ensemble des sociétés, ou uniquement celles qui sont connectées à Internet.
Exemple? 20% de l’ensemble des PME wallonnes disposent, selon le sondage de l’AWT, d’un ERP. Mais si l’on restreint l’échantillon aux seules PME connectées à Internet, le pourcentage retombe étonnamment à 12% !
Connectées mais peu actives
Du côté de l’existence de sites Web et de l’usage qui en est fait, on constate… “une grande stagnation”. Aucun progrès en:
- nombre de sites Internet (32%) ; à noter toutefois que le pourcentage est plus encourageant (63%) si on ne considère que les entreprises de plus de 5 personnes
- adaptation aux formats mobiles (5%)
- pourcentage de sites proposant des catalogues de produits en-ligne (62%)
- pourcentage de sites permettant des prises de commandes en-ligne (26%).
L’AWT n’avance pas de réelle explication à cette “grande stagnation”. Si ce n’est de répéter que la composition du tissu économique local reste largement fait de sociétés construction, horeca…) qui ont sans doute moins de raisons de miser gros sur l’électronique. Mais c’est là une explication qui ne convainc guère.
L’exploitation que les entreprises font de leurs sites Internet demeure clairement en-deçà de ce qu’on pourrait en attendre. Selon les réponses obtenues lors de l’enquête, 74% des sociétés qui disposent d’un site Web estiment qu’il ne leur procure que 10% environ de leur chiffre d’affaires.
“Seules 9% des entreprises wallonnes font de la vente en-ligne” (via courriel, site Web, EDI…). Or, souligne Hélène Raimond, il y a un véritable pactole e-commerce à aller chercher. “L’e-commerce belge représente une valeur de 1,4 milliard d’euros. Mais ce qu’on constate, c’est que ce sont notamment les e-commerçants français ou hollandais qui font de bonnes affaires. Parce que nos propres entreprises n’occupent pas le terrain. 23% du marché, soit 322 millions d’euros, leur filent sous le nez…”
Les entreprises n’ont en outre pas encore fait le pas – ou pas suffisamment, estime l’AWT – vers les potentiels qu’offrent les mondes mobiles. “A peine 5% des sites Web ont été adaptés à une utilisation via smartphones.” Non adaptés, formats de contenus et interface risquent donc de rebuter les mobinautes. “Inquiétant”, déclare Hélène Raimond, au vu de l’essor des smartphones et tablettes et, surtout, de l’usage qu’en font les utilisateurs et consommateurs pour se procurer produits et services.
Nouveaux usages
Les usages non commerciaux, plus administratifs, d’Internet sont par contre en progression:
- 52% des entreprises connectées reçoivent des factures électroniques
- 30% en émettent
- 48% font des déclarations administratives en-ligne (TVA, impôts, DIMONA…); le pourcentage monte à 79% pour les PME et à 78% du côté de grandes entreprises;
- 31% effectuent du stockage de données “dans le cloud”; cet usage se retrouve essentiellement du côté des PME (41% d’entre elles y ont recours).
Autres utilisations: établissement de devis (43%), téléphonie Internet via Skype, Google Talk… (24%).
Par ailleurs, 19% des sociétés disent désormais répondre à des offres de marchés publics via des canaux dématérialisés. C’est essentiellement le cas- assez logiquement- du côté des grandes entreprises (48%).
La visioconférence ne convainc pas encore beaucoup, ne faisant pas mieux que 11% (avec toutefois un usage plus net dans les grandes entreprises: 30%).
Principaux “réseaux sociaux d’entreprise” utilisés en Wallonie:
- Google+: 36%
- Facebook Pro: 24%
- Sharepoint: 22%
- Yammer: 15%
Enfin, 28% des sociétés disent être présentes sur les réseaux sociaux. Mais il n’y a pas de progression par rapport à 2011 ou 2010. Une fois encore, ce sont surtout les grandes entreprises qui les utilisent (ou fréquentent):
- TPE: 28%
- PME: 24%
- grandes entreprises: 42%.
Faire moins pour faire mieux?
On a pu le constater- que ce soit en termes d’équipements, d’utilisation de logiciels ou de déploiement de sites -, le paysage des usages IT des entreprises wallonnes est encore loin d’être idyllique.
Hélène Raimond (AWT): “il est nécessaire de rationaliser les aides publiques afin d’obtenir une plus grande efficacité et une meilleure lisibilité pour les chefs d’entreprise.”
Il s’agira donc de continuer à enfoncer le clou, à motiver, à faire la promotion des ressources de l’IT. Mais en évitant si possible de lancer des idées ou des plans qui ne seraient pas suffisamment concrets et proches de la réalité.
L’AWT formule à cet égard cette recommandation: “il est nécessaire de rationaliser les aides publiques afin d’obtenir une plus grande efficacité et une meilleure lisibilité pour les chefs d’entreprise.”
Hélène Raimond s’en explique. Il y a, selon elle, un décalage grandissant entre les besoins réels, la situation du marché et des technologies, et les mesures (publiques) mises en oeuvre.
Exemple: les primes e-business. “Ce mécanisme se justifie sans doute moins aujourd’hui dans la mesure où le marché est mûr. Par contre, l’accompagnement par des Rentic garde tout son intérêt. Or, ces actions sont moins subsidiées et moins visibles. Le moment est sans doute venu de regrouper davantage les initiatives, de moins saupoudrer, afin de procurer une aide réellement efficace.” D’autant plus que la multiplicité des aides et mécanismes rend difficile leur décryptage par les entreprises.
Petit appel à la simplification et à l’élagage…
Pour une vue exhaustive sur tous les chiffres et l’analyse de ces chiffres, rendez-vous sur le site de l’AWT.
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