Les écoles wallonnes ont-elles amélioré leur score en termes d’équipement informatique?

Voici trois ans, l’analyse de la situation qu’en avait fait l’AWT l’avait amenée à souligner “l’urgence” qu’il y avait à “améliorer l’intégration de l’ICT dans l’école”.

Quatre axes de travail étaient suggérés:

• poursuivre et compléter l’équipement: accélération du plan CyberClasse, amélioration des connexions dont bénéficient les écoles, préparation du plan “post-CyberClasse”
• mettre en oeuvre une politique de formation ICT “ambitieuse et effective” des acteurs du système éducatif: intensification des formations qui devraient être en partie obligatoires, intégration de la maîtrise des outils ICT dans le plan de formation des futurs enseignants, formation spécifique destinée aux cadres de l’éducation (pour qu’il n’y ait ni fracture, ni blocage)
• procurer un support technique et logistique aux écoles (en ce compris aux enseignants), avec un minimun d’une personne-ressource ICT par établissement (ne serait-ce qu’à temps partiel pour les sites les plus modestes)
• intégrer l’ICT dans l’enseignement: création d’une fonction d’“animateur ICT-éducation”, enrichissement des portails de ressources, partage accru des productions des enseignants, promotion d’une veille permanente au profit des enseignants, développement de plates-formes de formation en-ligne exploitables par les acteurs de l’éducation.

Les constats 3 ans plus tard

Petite info, tout d’abord, concernant la méthodologie suivie: l’enquête de l’AWT auprès des écoles a concerné 2.268 directions. 1.400 formulaires ont été complétés et renvoyés.

Quelque 1.541 enseignants (enseignement fondamental et secondaire; ordinaire, spécialisé ou de promotion sociale) ont par ailleurs participé à l’enquête qui leur était destinée.

En trois ans, le parc d’ordinateurs installés dans les écoles a augmenté de… 28%.

Fin février, l’AWT en avait répertorié 68.357 (de tous types- fixes, portables ou tablettes) contre 53.400 voici 3 ans (mais le fondamental n’avait pas été inclus dans l’analyse à l’époque)

Le ratio par élève demeure toutefois faible. L’amélioration enregistrée ne permet pas- au contraire- de combler le retard avec les moyennes européennes. Quant à recoller aux premiers de classe ou tout simplement aux moyennes des pays voisins…

Même là où la progression annuelle est la plus marquée (12% dans le secondaire), l’écart se creuse puisque la progression moyenne européenne y est de 17%.

Comparons-nous un instant avec nos voisins. En 2009, la moyenne européenne était de 11,4 ordinateurs pour 100 élèves. Les scores étaient de 21 pour 100 aux Pays-Bas, de 19,8 pour 100 au Royaume-Uni et au Grand-Duché, et de 12 pour 100 en France.

En 2012, le taux d’équipement des établissements français était “de 2 à 2,5 fois plus important, selon les niveaux d’enseignement.”

Si on inverse la perspective (nombre d’élèves par ordinateur), on constate que la Wallonie  est dans la mauvaise moitié du peloton européen. La Belgique, par contre, est dans le bonne moyenne- tirée vers le haut par la Flandre… A noter aussi que le taux moyen d’équipement est sensiblement supérieur en Communauté germanophone, comparé au reste de la Wallonie.

(*) Un seul chiffre global disponible en Wallonie pour le secondaire considéré dans son ensemble.

Rajeunissement du parc

Une bonne nouvelle malgré tout: les ordinateurs sont moins antédiluviens qu’il y a 3 ans. A l’époque, le ratio d’ordinateurs de moins de 30 mois était de:

0,6 sur 100 élèves dans le fondamental

2,6 dans le secondaire

1,7 en promotion sociale

Désormais, les scores respectifs sont de 3,3 ; 9,3 ; et 3,5.

“Avec 44.677 ordinateurs “récents”, tablettes comprises, sur un total [recensés] de 68.357, on note un très net rajeunissement”, souligne l’étude de l’AWT.

L’effet du projet CyberClasse n’y est pas étranger: fin février, 24.392 ordinateurs avaient été réceptionnés, sur un total commandé de 28.327. (Trois ans plus tôt, on n’en dénombrait encore que 3.500) (voir notre article sur la situation actuelle de ce plan)

Mais le processus de rajeunissement est aussi le résultat de démarches propres aux établissements. Le nombre d’ordinateurs achetés sur fonds propres a quasi doublé en 3 ans.

Les surfeurs attendent

87% des ordinateurs, contre 73% en 2010, sont désormais connectés à Internet. Les niveaux d’enseignement les mieux lotis sont le secondaire (90%) et la promotion sociale (92%) tandis que le spécialisé est à la traîne (72%) et le primaire lui aussi en retard (82%), bien que réalisant la plus belle progression.

Gros bémol: le score, apparemment respectable, cache en fait une grande diversité dans le nombre de connexions par école. Certaines écoles faussent en effet la balance grâce à un grand nombre de lignes desservant leurs divers locaux. Selon les estimations de l’AWT, “un tiers des implantations ne peuvent pas encore accéder à Internet.”

Concrètement, cela signifie que 17% des élèves du primaire et 8% des élèves du secondaire sont privés de connexions Internet (resp. deux fois et 50% plus que la moyenne de leurs homologues européens).

L’AWT a réussi à collecter des informations sur le type de connexions pour un échantillon réduit du parc installé (1.254 lignes). Répartition:

• RNIS / ADSL “light”: 37%
• xDSL: 47%
• câble de télédistribution: 15%
• fibre optique: 1%

80% des écoles du fondamental disposent d’une connexion allant “au mieux” jusqu’à 5 Mbps.

55% des établissements disposent d’un réseau WiFi mais qui est souvent réservé à l’usage des enseignants et/ou de l’administration. De 9 à 13%, selon les niveaux d’enseignement, l’ouvrent à tous. Exception notoire: les établissements de promotion sociale où ils sont près de 1 sur 2 à l’ouvrir à tous les usagers.

La présence d’un réseau Wi-Fi n’est en outre pas une preuve de qualité ou d’envergure de couverture. Bien souvent, relève André Delacharlerie de l’AWT, on ne dénombre qu’un faible nombre de points d’accès par implantation. De l’ordre de 1 à 3, dans la majorité des cas. Ce qui ne prédispose pas beaucoup à la mobilité…
Quelques chiffres encore:

Les ordinateurs fixes constituent la toute grande majorité du parc. Les portables sont 10 fois moins nombreux (mais présents dans 54% des établissements) tandis que les tablettes commencent à poindre mais ne représentent encore qu’environ 1% du total.

Le recours à des tableaux interactifs (TNI) et rétroprojecteurs progresse également de manière sensible:

– TNI: 2009: 268 – 2013: 2.032

– rétropjecteurs: 2009: 2.925 – 2013: 5.178

Environ 13% des classes en sont équipées. Ce qui supporte mal la comparaison avec le taux d’équipement des écoles britanniques (78%) ou néerlandaises (44%). D’autant plus que ces chiffres datent de… 2009.

Ressources humaines

Alors qu’il s’agissait de l’une des 4 recommandations majeures de l’AWT dès 2009, la mise à disposition de “personnes-ressources” compétentes en IT pour assurer le support du parc et de ses usagers, on constate que trois ans plus tard, la situation n’a guère évolué. Même si de petits progrès se notent à tous les niveaux d’enseignement. Mais “73% des établissements du fondamental ne disposent d’aucune personne-ressource.”

Le secondaire s’en tire nettement mieux avec seulement 17% d’écoles dépourvues d’un tel profil. A noter qu’il ne s’agit pas – loin de là – d’une personne ayant des compétences IT “natives”. Souvent, c’est un professeur qui s’y colle.

Et généralement, la personne-ressource n’opère qu’à temps partiel (logique, évidemment, vu qu’il s’agit souvent d’un professeur).

Les animateurs TICE (ICT appliquée à l’éducation) sont également peu nombreux.

Usages de l’ICT sur le terrain

Question: quel pourcentage d’enseignants utilisent l’informatique ou Internet pour donner cours?

Fondamental : 21%

Secondaire: 33%

Enseignement spécialisé: 25%

Promotion sociale: 36%

L’étude révèle un autre chiffre intéressant: s’il se trouve généralement au moins un professeur par école qui utilise l’ICT pour ses cours (en général, c’est de “10 à 50%” du corps professoral), on remarque néanmoins que… 21% des écoles du fondamental n’y ont pas recours du tout !

Les usages varient évidemment fortement: depuis l’utilisation d’un ordinateur pour préparer le cours jusqu’à son utilisation en classe pour surfer sur Internet, exploiter des cours en-ligne, utiliser des logiciels éducatifs ou de simples outils de productivité (traitement de texte, tableur…).

En fait, les enseignants semblent être largement plus enclins à utiliser des outils informatiques… en dehors de l’école (pour préparer les cours, gérer les données des élèves) qu’en classe. Il y a encore une grande pénurie d’exploitation des outils, qu’il s’agisse de solutions classiques (traitements de textes, tableurs…) ou plus “modernes” (contenus en-ligne, réseaux sociaux, applications hébergées…).

Fait révélateur et déconcertant. On peut en effet se demander à quoi sert d’équiper les classes et les élèves si les professeurs n’utilisent pas l’ICT en classe !

Il y a comme un problème d’attelage qui renâcle à s’arrimer à la charrue…

Encore un chiffre: 65% des écoles ont acheté des logiciels éducatifs au cours des 12 derniers mois.

Pour prendre connaissance de tous les chiffres et de leur analyse, rendez-vous sur le site de l’AWT.

Vous pourrez également y découvrir plusieurs chapitres consacrés au type d’équipements qu’utilisent les professeurs, à leur degré de formation, à l’exploitation qu’ils font des ressources pédagogiques en-ligne, aux bénéfices qu’ils perçoivent- ou non!- de l’utilisation des outils IT/Internet en classe, etc.

Pour une vue exhaustive sur tous les chiffres et l’analyse de ces chiffres, rendez-vous sur le site de l’AWT.