# Le cloud, c’est pour tout le monde
Tout le monde n’a pas forcément intérêt à se tourner vers le cloud. Quelques exemples.
♦ Si votre secteur d’activité est le monde médical, bancaire, militaire, pharmaceutique, aérospatial…, les clouds publics tels Amazon EC2 ou Microsoft Azure vous sont sans doute fortement déconseillés, voire interdits. Notamment pour des questions de confidentialité des données, voire d’interdiction de les “exporter” en dehors du pays d’origine et/ou de l’espace européen. Gare par ailleurs, comme nous l’avons souligné, aux regards indiscrets des autorités américaines qui peuvent exiger de toute prestataire US de leur donner accès à toute donnée se trouvant sur leurs serveurs, Même chez nous.
Pas sûr d’ailleurs que les Américains soient les seuls à exiger cela des prestataires battant leur pavillon… On pense ici notamment à la Chine.
♦ Si vos activités exigent un potentiel de restauration (quasi) temps réel de vos données. En cas de souci ou de besoin, le rapatriement de gros fichiers (volumes du style big data ou contenus vidéo) stockés ou sauvegardés vers vos propres systèmes peut prendre “un certain temps” selon la vélocité de la bande passante donc vous disposez. Si vous êtes allergique aux latences, mieux vaut vous abstenir. S’assurer un boulevard en bande passante, qui ne soit pas encombré aux heures de pointe (excusez la comparaison!), peut par ailleurs s’avérer très onéreux. “Mieux vaut, dans ce genre de scénario, s’adresser à un prestataire local dont le datacenter est à proximité, ce qui vous permettra, le cas échéant, d’aller rechercher la copie ou la sauvegarde chez eux, en faisant sur place une copie sur un disque dur que vous ramènerez chez vous”, déclare Arnaud Ligot (CBlue).
♦ Des applications qui exigent un haut degré de personnalisation ne sont pas des cibles rêvées pour le cloud. Idem (mais les choses évolueront sans doute à terme) pour les applications nécessitant une infrastructure matérielle spécifique. L’effet de mutualisation dont jouent les acteurs du cloud repose sur une standardisation maximale de l’infrastructure d’accueil. Si vous avez besoin de matériels un rien inhabituels, vous ne trouverez pas chaussure à votre pied. Un peu à la manière des maladies “orphelines” qui n’attirent guère les investissements de l’industrie pharmaceutique.
♦ “Le cloud public a à la fois des avantages et des inconvénients pour les PME”, souligne pour sa part Laurence Soetens (Thelis). “Les points positifs sont une diminution des coûts, un gain en flexibilité, évolutivité, mobilité et sécurité. Mais, revers de la médaille, il faut nécessairement disposer de la bande passante nécessaire. Attention par ailleurs aux coupures Internet, toujours possibles. Et attention à la localisation des fournisseurs” (notamment pour des questions d’ordre juridique et de possibilités de recours, voire d’influence sur le prestataire).
A ses yeux, une solution cloud, “est peu adaptée si vous ne disposez pas de ressources humaines IT en interne. Tout simplement parce que cela implique une importante perte de contrôle sur le système d’information. Le cloud est en outre un phénomène complexe pour quiconque n’a pas un minimum de connaissances. Pour pallier au manque de connaissances internes, il faut donc avoir recours à un prestataire externe, ce qui peut constituer un coût important pour une petite structure.”
Conclusion? “Le cloud peut surtout s’avérer intéressant pour des sites Web ou d’e-commerce à haute fréquentation, ou pour l’hébergement d’applications commerciales qui doivent être accessibles en permanence, en ce compris via accès mobile, pour tous les collaborateurs. Mais le cloud est déconseillé, même pour ces cas-là, si vous ne disposez pas d’une très bonne bande passante.”
Elle le déconseille plus encore “si vos données ne s’y prêtent pas.”
Et, à ses yeux, le cloud “n’est pas idéal pour de la téléphonie et du VoIP. Ce peut en effet être une aberration en termes d’utilisation de bande passante dans la mesure où cette application risque alors d’opérer au détriment des besoins en bande passante des autres applications.”
♦ Petit coup d’oeil enfin du côté de la conservation des factures. Philippe Laurent (CRIDS): “Un des intérêts d’une conservation électronique de factures est de pouvoir les utiliser en vue de déductions fiscales. La loi accepte la conservation de factures sous format électronique mais impose qu’elles soient conservées en Europe. Si vous les stockées dans le cloud sans savoir où elles sont, et si vous avez des problèmes avec votre contrôleur fiscal, il pourrait vous demander de prouver que vous avez bel et bien conservé vos factures en Europe…”
# Le cloud, c’est mieux en local
D’une manière générale, peut-on faire confiance à son fournisseur?
Pas de réponse unique et universelle, bien entendu. Souvent, l’impression veut qu’opter pour un grand nom, un “major“, offre une plus grande garantie de qualité, de fiabilité, de pérennité… Mais il n’y a jamais de certitude.
Même les tout grands subissent des problèmes avec leur infrastructure. Voyez ce qui est déjà advenu à Amazon ou à Yahoo, pour ne citer qu’eux. Eux aussi “perdent” des données ou, variante moins inquiétante, ne sont plus en mesure de vous assurer un accès à leur infrastructure pendant un “certain” temps.
Vaut-il mieux dès lors s’adresser à un fournisseur local?
Oui et peut-être non… Bon, c’est très “normand” comme affirmation mais elle est malheureusement vraie.
Pourquoi oui? Parce qu’un prestataire local a l’avantage d’être clairement identifié, d’avoir intérêt pour sa propre réputation à répondre à vos sollicitations, et à pouvoir être contacté directement. Et parce que la loi belge s’impose à lui.
“Peut-être non” parce que lui-même (s’il s’agit par exemple d’un prestataire SaaS) ne vous procure pas forcément son service sur base de sa propre infrastructure. Si le service logiciel qu’il preste est hébergé, physiquement, sur l’infrastructure d’un fournisseur PaaS ou IaaS lointain, il est tout aussi tributaire que vous des pratiques de ce dernier et de la fiabilité de son infrastructure.
Damien Hubaux (CETIC): “En parlant de cloud, on pense toujours aux fournisseurs globaux (Amazon, Microsoft Azure, SalesForce, etc), mais la relation de confiance et la proximité peut rester un avantage via une meilleure connaissance des attentes, des habitudes, des contraintes légales, un support personnalisé, etc.”
Au minimum, il s’agit pour le client final de faire préciser par son prestataire SaaS local chez qui il héberge son offre et quels sont les garanties de disponibilité, de restauration et de recours qu’il a lui-même obtenues auprès de son prestataire. Idem au sujet de la manière dont les données sont traitées. Mieux vaut vérifier si elles risquent de se retrouver à un moment donné sur des serveurs situés dans un pays n’offrant aucune garantie en termes de protection (vie privée ou propriété intellectuelle par exemple). Voir à ce sujet notre article “Et mes droits dans tout ça?”.
Attention aussi à ce que Gregorio Matias appelle “l’effet d’aubaine”: “beaucoup veulent vendre du cloud et du service cloud parce cela ne leur coûte rien en termes d’investissement et d’engagement vis-à-vis du client. Le contrat qui prévaut est en effet celui du fournisseur de l’infrastructure cloud [chez qui est hébergée par exemple l’application fournie par l’éditeur local]. L’interlocuteur local se contente de vendre du service et de prendre une commission. L’effet d’aubaine qu’exploite le prestataire ne répond pas forcément au besoin du client.”
# Le cloud, c’est écologique
Terminons par ce qui fut l’un des premiers arguments utilisés- avant qu’on en vienne à des discours plus axés sur l’attrait financier ou opérationnel: confier ses solutions au cloud, à des infrastructures mutualisées, était une manière de faire un cadeau à la planète en lui évitant la myriade d’empreintes énergétiques perso.
L’objectif ici n’est pas d’étayer ou de démonter cette affirmation. Cela prendrait, en soi, un tome complet d’encyclopédie tant les facteurs à prendre en compte sont nombreux.
Une simple petite remarque, dès lors: attention à toute affirmation des prestataires. Leur conscience écologique n’est pas toujours aussi “carte postale” qu’il n’y paraît. Exemple: quelle source d’énergie produit l’électricité qui alimente leurs datacenters? Energie hydraulique, éolienne ou… charbon? Et même des sites sensés être plus verts-que-verts ont des impacts non négligeables. Comme le réchauffement des eaux de cours d’eau ou de canaux suite aux rejets des eaux servant au refroidissement des systèmes de certains sites. Le site de Ghlin de Google en est un exemple.
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