Toute cette semaine – et l’expérience sera reproduite et même étendue en 2023 et 2024 -, plusieurs dizaines d’étudiants universitaires accompagnés de chercheurs suivent une formation de haut niveau en cybersécurité à l’Euro Space Center de Transinne/Libin.
Baptisée CyberWal in Galaxia, le but de cette formation est de les confronter à des problématiques et de leur faire s’approprier des compétences de pointe qui ne figurent pas dans les cursus universitaires mais qui répondent par contre à des besoins bien réels, et toujours plus aigus.
Le programme d’une semaine se place et est financé dans le cadre du programme CyberWal (financement venant en partie du Plan de relance wallon et en partie de Digital Wallonia).
Le programme de formation de haut niveau CyberWal in Galaxia est l’une des trois initiatives qui font partie d’un projet d’innovation porté par l’intercommunale Idelux, projet retenu dans le cadre du Plan de relance wallon. Le projet a été doté d’une enveloppe de 8,355 millions d’euros.
Un avant-goût de ce que sera le cyber-range de lm’ESEC d’ici un an…
Les deux autres composantes – majeures – du projet sont la création d’un démonstrateur quantique et celle d’une infrastructure cyber-range.
Le marché public concernant le premier a été publié fin novembre. Clôture des offres le 30 janvier 2023. Délai de livraison pour la société qui sera retenue: neuf mois maximum. Le démonstrateur, qui devra donc être opérationnel d’ici moins d’un an, opérera comme un laboratoire de tests d’infrastructure quantique, permettant d’évaluer, de valider et d’optimiser les performances et la résilience de solutions quantiques. En ce compris celles applicables à la cybersécurité (distribution, gestion et protection de clés quantiques).
Le cahier de charge pour le cyber-range, pour sa part, devrait être publié d’ici peu. Pour entrée en action fin 223 ou début 2024. Il s’agira, promet-on, de la plus importante infrastructure de simulation et d’entraînement aux cyber-attaques d’Europe.
Pour sa première édition, CyberWal in Galaxia a accueilli une septantaine d’étudiants, venus en majorité des universités wallonnes (Louvain-la-Neuve – dans le cadre du programme Cyber Excellence -, Liège, Gand, Courtrai…) mais aussi de l’Université de Luxembourg (25 étudiants).
Les formations, séances d’informations et autres ateliers pratiques ont été donnés et encadrés par des experts en cybersécurité (ou matières connexes) venus des mondes académique et industriel belge.
Quelques noms (parmi d’autres): Xavier Lessage et Guillaume Ginis du Cetic, Axel Legay, professeur en cybersécurité à l’UCLouvain, Laurent Mathy, professeur en systèmes et sécurité (ingénierie électrique et informatique) de l’ULiège, Tijl Atoui et Benoit Balliu, professeurs et chercheurs en sécurité à la Haute Ecole flandrienne Howest, Maxime Cordy, expert en sécurité en matière d’apprentissage automatique à l’Université de Luxembourg, Jean-Luc Trullemans, directeur de l’ESEC (European Space Security and Education Center) de l’ESA à Redu, Matteo Merialdo, sous-directeur de la division Services de sécurité opérationnelle de Rhea Group.
Quelque 70 étudiants, essentiellement de nationalité belge et luxembourgeoise, ont participé à la première édition de la formation de haut niveau CyberWal in Galaxia.
Thèmes de la formation: protection contre les rançongiciels, sécurisation des systèmes embarqués, résistance logicielle aux attaques en lien avec l’intelligence artificielle. Les étudiants ont par ailleurs eu l’occasion de s’entraîner sur l’infrastructure cyber-range de Rhea (un environnement de formation pour détection, simulation et résolution d’attaques sur base de scénarios réalistes – attaques, incidents… – et de données réelles).
Une semaine peut paraître court mais le but est double: d’une part, donner un avant-goût, concret et pratique, des problématiques du moment et faire travailler ensemble des étudiants venus de divers horizons ; de l’autre, fournir les bases pour poursuivre études et recherches, les travaux pouvant se prolonger sous forme de projets de recherche, d’engagement dans des formations plus poussées, comme l’explique le professeur Axel Legay, coordinateur du programme CyberWal. “Le fait est qu’il y a un énorme besoin d’innovation dans les matières de cybersécurité. L’espoir est de voir naître des projets, voire des start-ups”. Le tout dans un contexte – et, là encore, d’un espoir – de voir naître autour de l’ESEC de l’ESA un véritable écosystème et de positionner ce centre et, plus largement, la Wallonie à la pointe de la recherche et des compétences en matière de cybersécurité (voir plus loin “Ne pas sourire quand on parle de Cyber Valley wallonne”).
Le centre spatial de l’ESA à Transinne est déjà un lieu où de très nombreux jeunes, de toutes catégories d’âge, viennent découvrir l’espace. Chaque année, son centre de formation accueille ainsi quelques 1.200 jeunes pour des stages de trois à cinq jours.
Qui plus est, depuis que le centre ESA a été transformé officiellement en ESEC (European Space Security and Education Center), en 2017, l’éducation est devenue l’une des trois missions majeures du site, aux côtés de sa spécialisation en cub sats (satellites de format cube) et en cybersécurité. Et ce, pour l’ensemble des états-membres.
Deux autres éditions en 2023 et 2024
Si l’édition 2023 de CyberWal in Galaxia s’est limitée, essentiellement, à deux nationalités d’étudiants et de chercheurs et s’est focalisée sur des cyber-matières assez classiques, les éditions 2023 et 2024 déjà planifiées s’ouvriront à davantage de participants et de nationalités (en ce compris du côté des formateurs et experts) et aborderont des thématiques plus ciblées. L’un des thèmes majeurs de l’édition de 2023 sera par exemple la cryptographie quantique. Avec ses potentielles applications pour la sécurisation des données et des engins spatiaux
“Ne pas sourire” quand on parle d’ambition Cyber Valley
Les nouvelles missions données depuis plusieurs années au centre ESA de Transinne (notamment la cybersécurité appliquée à des fins spatiales) et les investissements de la Région dans ces matières (au travers du programme CyberWal et des dispositifs de recherche et de tests implantés à Transinne) sont une opportunité pour la Wallonie de jouer plus “hardiment” la carte de cet enjeu majeur.
Elle compte donc reproduire ce qui a par exemple été fait, par le passé, en matière de biotech : concentrer les investissements, les coordonner, susciter l’attraction de talents et la naissance de sociétés et d’un écosystème complet.
Opportunité qui semble d’autant plus logique que la cybersécurité, dans le spatial mais dans bien d’autres domaines encore, est aussi une priorité européenne et que l’Europe et/ou l’ESA investissent largement en la matière…
Reste à s’en convaincre et à le vouloir. C’est un peu le message que faisait passer le professeur Axel Legay (UCLouvain, CyberWal) lors de la présentation de la première promotion d’étudiants CyberWal in Galaxia. Face à la multiplication des attaques et formes d’attaques, face à la menace d’entités mais aussi d’“états-voyou”, face à l’hybridation des menaces, “le continuent européen doit se protéger et doit coordonner sa cybersécurité”, déclarait-il. Selon lui, la bonne nouvelle, pour de petits pays comme la Belgique, qui n’ont pas de grande armée, est qu’ils ont par contre de très bons cyber-cerveaux.
“La Belgique peut devenir un leader européen pour coordonner la cybersécurité européenne. Nous avons, en Wallonie, parmi les meilleurs experts au monde, qui travaillent notamment pour de grands groupes de l’industrie ou du numérique. Des experts qui sont reconnus par leurs pairs à l’international et par les centres d’expertise étrangers en cybersécurité. Mais on n’est pas assez fier de cette expertise qui, pourtant, n’existe pas ailleurs.
Techniquement, on est aussi compétitif que les Etats-Unis. Mais on n’y croit pas. Il faut davantage le faire et il faut davantage de prise de risque [Ndlr: ou d’initiatives?] de la part des autorités.”
Il faut créer un environnement où il y a une place de choix pour les ingénieurs en cybersécurité. Il faut faire rêver de cette profession, déclarait-il encore en substance. “Oui, une Cyber Valley wallonne est possible. Il ne faut pas en sourire…”.
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