Encore en pleine finalisation de l’opération de fusion avec Infohos Solutions, Xperthis, devenue Zorgi, annonce l’acquisition de Mobitrace. Une acquisition dans le domaine des applis mobiles d’e-santé qui pourrait bien n’être que la première d’une série. Dans le contexte plus global d’un (re)déploiement stratégique de la société.

Dès à présent, Zorgi fait allusion au lancement de futures applications mobiles dans les registres gestion de pharmacie (hospitalière), logistique et administration des soins de santé.

Dans un premier temps, l’acquisition de Mobitrace va permettre de doter certaines solutions Zorgi/Xperthis d’un potentiel de mobilité. Les solutions de cette start-up de Hasselt concernent actuellement cinq processus de soins: la mesure et le contrôle des paramètres vitaux, les soins infirmiers dématérialisés, le suivi et la traçabilité des poches de sang, le prélèvement d’échantillons, et la préparation et administration de médicaments.

Nombre de ces solutions coïncident donc à des produits ou fonctionnalités présents dans le catalogue Zorgi/Xperthis, mais sans cette dimension d’exploitation mobile – du connecté à distance qui prendra une ampleur grandissante, non seulement dans l’enceinte de l’hôpital mais aussi dans son ouverture et intégration avec les acteurs extérieurs et la chaîne désenclavée des soins (télémédecine, hospitalisation à domicile, soins de proximité…).

Melchior Wathelet (Zorgi): “Les flux d’informations et de processus sont au moins aussi importants pour l’infirmière qui se rend chez le patient que pour l’assistant administratif à son poste de travail. Pour soutenir les hôpitaux dans leur transformation, nous devons être en mesure de leur fournir des solutions mobiles intégrées à la fois pour leur personnel de soins et leurs collègues des autres services.”

De manière plus concrète concernant l’apport de Mobitrace au catalogue Zorgi, son module NurseFlow visera à autoriser un suivi plus efficace des informations santé du patient au fil des actes qui sont posés au niveau “chevet” (“bedside care”) lors de son trajet à l’hôpital (ou, à terme, en dehors de celui-ci) et à intégrer ces données plus granulaires à la fois dans le dossier patient et pour les besoins des outils d’analyse et de production de rapports.

Source: Mobicare.

NurseFlow est donc appelé à se retrouver intégré au DPI Xperthis Care. Mais il servira également de socle pour “créer de nouvelles applications mobiles au sein d’autres solutions existantes”.

Pour l’heure, l’équipe de Mobitrace continuera d’opérer sous forme d’entité distincte, avec une stratégie propre. Mais l’intégration est évidemment à l’agenda, avec un exercice d’“identification des domaines dans lesquels les clients de Zorgi/Xperthis peuvent bénéficier des avantages de cette intégration à court terme”.

Intégration en cours

Annoncée voici déjà près de deux ans (le nouveau nom, lui, a été dévoilé fin 2020), la fusion entre Xperthis et Infos Solutions suit son cours.

Jusqu’ici, cette opération a surtout concerné les équipes, la communication interne, la mise à niveau en termes de connaissances et compétences techniques, indique Melchior Wathelet, PDG de Zorgi. 

La feuille de route produits et les choix technologiques ont également été balisés.

Reste, en 2022, à finaliser et concrétiser. En ce compris pour les derniers choix et arbitrages à effectuer du côté produits, dans la perspective de continuité et de nouveaux investissements.

Le nouveau catalogue s’articule(ra) donc en fonction des produits-phare et spécialités de chacun des deux partenaires, avec renforcement fonctionnel croisé: DPI Xperthis Care venu de l’ex-Xperthis ; gestion de pharmacie hospitalière, sur base des solutions Infohos ; ERP venu du catalogue NRB (du SAP bien entendu, avec migration récente vers SAP HANA) ; les solutions TarFac (tarification-facturation) via “fertilisation croisée” entre les anciennes solutions Oazis (Xperthis) et InfoHos.

“Ce sont là quatre lignes de produits (dossier patient, finance/administration, pharmacie, gestion/logistique) qui correspondent à quatre axes fondamentaux d’un hôpital. Nous sommes le seul acteur belge ayant la possibilité de créer de la synergie entre ces quatre lignes de produits”, affirme Melchior Wathelet.

Melchior Wathelet (Zorgi): “Notre force est de disposer des leviers nécessaires pour inclure dans l’analytique et au niveau du data warehouse à la fois des éléments du DPI et d’autres éléments liés à la gestion hospitalière – identification patient, éléments financiers, volet pharma… Pour la vision la plus globale possible.’

Le terme synergie est à comprendre non seulement au sens purement technologique et fonctionnel mais aussi sous l’angle de l’interaction entre ces quatre catalogues: gestion de pharmacie et gestion logistique, connexion entre data warehouse, analytique et trafic, “en ce compris, à terme, du prédictif”. Ce qui est une allusion claire à l’analytique et à l’IA, deux domaines pour lesquels Zorgi s’appuiera sur les compétences de NRB.

Au-delà des quatre axes, somme toute classiques, évoqués, “il est nécessaire d’aller plus loin”, souligne le CEO de Zorgi. “Les hôpitaux ont en effet besoin de plus d’interaction, en intra muros, entre hôpitaux et avec les acteurs extérieurs à l’hôpital.” 

Dès lors, quelles seront les lignes de force de la stratégie future de Zorgi? Melchior Wathelet pointe quatre thématiques: la “cloudification” des produits ; l’ajout d’éléments de mobilité ; le data warehouse (dans une optique de gestion des données et d’analytique) ; et l’extra muros, avec de nouvelles passerelles, intégrations et interactions avec les intervenants de première ligne, à commencer par l’axe infirmier.

Comme pour l’analytique, c’est vers NRB que Zorgi se tournera pour l’épauler et proposer aux établissements hospitaliers l’infrastructure et les ressources cloud nécessaires en cas d’externalisation, totale ou partielle, des applications et/ou des données. “NRB est en mesure de proposer du cloud public ou privé et dispose d’une offre propre à répondre aux spécificités du monde hospitalier.

Que l’hôpital désire garder quelque chose en interne, s’orienter vers des infrastructures partagées ou s’appuyer sur un cloud privé ou public, nous pourrons répondre à son attente, selon ce qui lui convient le mieux. Bien souvent, les autres acteurs ne proposent que du cloud privé ou des solutions on premise. Et obligent les hôpitaux à se plier à leurs propres orientations…”

Troisième domaine dans lequel le groupe NRB sera mis à contribution: la sécurité. “Le secteur hospitalier n’est pas un secteur comme un autre. Nous pouvons allier notre propre connaissance de son métier avec les capacités techniques de NRB. Dans ce registre [sécurité hospitalière], Zorgi fera office d’intermédiaire. Nous ne pouvons pas tout faire nous-mêmes…”

Retour en force de la première ligne

L’axe infirmier a été cité comme cible prioritaire pour le volet extra muros de la stratégie Zorgi. Quid de ces autres acteurs de première ligne que sont les médecins généralistes ou spécialistes? Il y a, dans le catalogue Xperthis, une certaine solution OmniPro (héritage de MIMS, rachetée fin 2014) qui, outre sa version DPI, existe également sous forme d’une solution OmniPro Cabinet privé. On n’en a plus guère entendu parler depuis quelque temps. Va-t-elle réapparaître?

Source: MIMS

“Nous ne nous en sommes pas désintéressés”, tient à affirmer Melchior Wathelet. “Nous avons même gagné quelques utilisateurs mais il est vrai que le logiciel est aujourd’hui dépassé et est géré en mode maintenance. 

Il est appelé à se réactualiser et à évoluer vers une philosophie de soins à domicile. Il sera donc un élément de notre reconquête de la première ligne.”

Aux yeux de Zorgi, la première ligne fait en effet figure de cible stratégique dans l’axe extra muros. “Cet axe ne se limitera pas aux soins stricto sensu mais englobera aussi l’aide familiale, les objets connectés… Tout cela se place dans le cadre plus large que nous visons à plus long terme, à savoir le trajet total du patient – hôpital – médecin – soins.”

Evoluer = changer

La transformation du monde hospitalier, les défis à relever en ce compris via les technologies numériques et les solutions informatiques, ne pourront prendre corps que si toutes les composantes de l’hôpital s’adaptent et les utilisent efficacement. Autrement dit, face aux modifications d’actes et de processus, parfois en profondeur, et face aux réticences et au défi des compétences, le change management apparaît souvent comme une gageure et un sérieux obstacle.

Environ 40% des hôpitaux où est présent Xperthis (Zorgi) avec des solutions sont désormais passés à Xperthis Care. Mais… “les trajets de migration devront s’accélérer”, estime Melchior Wathelet. “Il n’est jamais bon de maintenir de vieilles versions ou technologies. Cette migration, il faut la faire assez tôt pour qu’il ne soit pas trop tard.”

Sous-entendu un arrêt du support? Melchior Wathelet se refuse, du moins au stade actuel des choses, à brandir une telle épée de Damoclès. “J’espère que nous n’en arriverons pas à une date-butoir mais nous ne laisserons pas les hôpitaux prendre le risque que quelque chose ne soit plus maintenu. A nous de prouver que nous sommes en capacité de les migrer. Aux hôpitaux d’éviter de mettre leur environnement en danger.”

En termes de calendrier, “2022 sera une année-défi pour s’aligner en termes de migration”.

Pour accompagner et guider les hôpitaux, Zorgi a décidé de se tourner, lorsque la situation le demande et si l’établissement hospitalier l’accepte, vers… IBM.

“Nous nous sommes rendus compte qu’il fallait accélérer le processus d’évolution et d’appropriation par les hôpitaux de nos solutions Xperthis Care, un produit d’ailleurs lui-même en évolution. Ils doivent aller plus vite en termes d’implémentation, d’optimisation des paramétrages, d’adoption… IBM dispose de la connaissance et de la surface nécessaires. Et est à même de nous faire grandir dans ce domaine, tout comme d’ailleurs les institutions elles-mêmes.”

L’assistance à la gestion du changement inclura aussi les dimensions documentation et formation à Xperthis Care.

Soulignons – chose importante – que la convention passée avec IBM n’a rien d’exclusif. Les hôpitaux ne seront donc pas obligés d’en passer par lui pour leurs projets de change management. “D’autres partenaires d’implémentation pourront toujours intervenir.”