Agoria inaugure un programme DigiCoach qui prend la forme d’une plate-forme en-ligne destinée à guider les entreprises industrielles – de toutes tailles et de tous secteurs – dans leur “transition numérique” ou la mise en oeuvre de projets numériques.
En plus d’une galerie de cas et d’exemples de projets (une trentaine à l’heure actuelle) déjà mis en oeuvre par des entreprises belges et d’un accès au MOOC “Business in AI”, la plate-forme propose trois outils: un outil d’évaluation de compétences (DigiScan), qui permet de générer un rapport personnalisé ; un outil d’évaluation des compétences personnelles des employés (DigiSkills Passport) ; et un outil de recherche et de mise en relation (DigiConnect) entre porteurs de projets et fournisseurs de solutions numériques (ces derniers étant puisés parmi les membres d’Agoria).
Objectif: “aider les entreprises à lancer leurs projets digitaux dans les meilleures conditions possibles ; tester la maturité numérique des entreprises ; les aider à trouver des partenaires pour préparer et déployer leur projet de transformation numérique.”
DigiScan
L’outil DigiScan permet à une entreprise de faire en quelque sorte une radiographie minute (en 20 minutes top chrono, promet Agoria) du stade auquel elle se trouve en termes de transition ou d’implémentation du numérique dans ses processus.
Le questionnaire a été structuré en quatre chapitres thématiques: numérisation des processus opérationnels ; implémentation de solutions numériques innovantes orientées vers le monde extérieur (partenaires, clients…) ; culture numérique interne ; stratégie et priorités.
A l’issue du questionnaire, chaque société se voit octroyer un score, accompagné d’indicateurs et de conseils, lui permettant non seulement de se situer par rapport à elle-même mais aussi de se comparer avec d’autres entreprises (pour l’instant quelque 400 sociétés ont déjà effectué cet exercice). Agoria promet aussi un rapport détaillé et commenté des résultats afin de permettre à l’entreprise de mieux définir et orienter sa stratégie, avec suggestion des actions à entamer.
DigiSkills Passport
Sur un plan plus personnel et individuel, le site DigiCoach permet également à chaque travailleur et employé d’effectuer un test similaire portant sur ses propres compétences. C’est là un outil qui existait déjà (baptisé à l’origine Digital Skills Indicator ; nous en avions parlé dans un précédent article, fin 2020)
Pour les besoins du “DigiSkills passport”, un ensemble de 27 compétences (soft skills, aptitudes numériques – à maîtriser dans la vie quotidienne ou dans l’environnement professionnel) servent de canevas-référence.
Le questionnaire, subdivisé en trois jeux de 9 questions (compétences humaines, compétences numériques privées et professionnelles), permet là aussi d’établir un score, sur base de l’analyse automatique des réponses (bonnes ou mauvaises). “Ce scan génère un passeport de compétences numériques qui permet à chaque individu de comparer son score et son bilan à son profil et rôle dans l’entreprise. De quoi déterminer quels sont ses points forts et ses faiblesses, les points sur lesquels il doit travailler pour combler le fossé. Il obtient aussi une mise en perspective par rapport à ce qu’exige ou qu’exigera demain le marché du travail et quelle évolution il doit prévoir.”
DigiConnect
L’outil DigiConnect, quant à lui, est une sorte de place de marché, un répertoire, où une entreprise peut venir rechercher un prestataire de services ou fournisseur de solutions numériques (membre d’Agoria) vers lequel elle peut éventuellement se tourner pour trouver un produit ou un service répondant à un besoin précis.
La recherche se fait en combinant des paramètres de catégorie de solution, de domaine et sous-domaine. Pour obtenir des propositions correspondant le mieux possible au besoin, des filtres supplémentaires peuvent être activés: par région, taille d’entreprise, secteur d’activité…
Une fois le ou les fournisseur(s) ou prestataire(s) suggéré(s) par l’outil, l’entreprise a la possibilité d’établir directement le contact.
Redondance ou complémentarité?
Les nouveaux outils DigiScan et DigiSkills Passport d’Agoria font immanquablement penser à une initiative similaire prise, voici déjà quelques trimestres, par l’AdN (Agence wallonne du Numérique) au travers de son outil d’auto-diagnostic. L’existence parallèle de ces deux outils ne va-t-elle pas générer un certain flou, pour ne pas dire une redondance contre-productive?
Source: Agoria. Site DigiCoach.
“L’approche a été concertée, entre Agoria et l’AdN”, dément Dominique Demonté, directeur d’Agoria Wallonie. “L’outil de l’AdN vise l’ensemble du tissu industriel wallon tandis qu’Agoria vise le B2B et les sociétés de plus de 10 personnes.”
Selon lui, “il est bon pour une entreprise d’avoir à sa disposition ces deux outils” qu’il juge donc complémentaires. “Nous étudions d’ailleurs la manière d’élaborer un parcours commun. Et cela permettra en outre d’échanger nos données. Données plus larges [en termes de cible] du côté de l’AdN ; vision fédérale, côté Agoria. Il sera important de pouvoir mesurer l’impact.”
Willy Borsus, ministre de l’Economie et du Numérique, abonde dans cette vision d’outils complémentaires. “DigiCoach est un outil supplémentaire, qui s’inscrit dans une complémentarité positive par rapport à l’outil d’auto-diagnostic de l’AdN. On est dans une démarche d’addition des démarches. On a besoin que toutes les manches soient retroussées…”
Danny Goderis (directeur général d’Agoria): “Nous lançons un appel aux autres fédérations et à d’autres partenaires pour qu’ils rejoignent notre initiative DigiCoach, la fassent connaître et la relayent, afin d’aider un maximum d’entreprises à s’engager dans la transformation numérique.”
Côté bruxellois, Bernard Clerfayt, ministre en charge de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de la Transition numérique, considère lui aussi que l’initiative DigiCoach et la collaboration avec Agoria sont importantes pour venir compléter le travail et les missions d’Actiris et de Bruxelles Formation. “Le Pôle Formation Emploi-ICT DigitalCity.brussels est en cours d’installation et nous espérons qu’il prouvera son efficacité au sortir de la crise du coronavirus. Nous travaillons avec le secteur et avec Agoria afin de définir les compétences que les chercheurs d’emploi doivent et devront développer. Le Pôle offrira également une meilleure vision des formations disponibles existantes dont les chercheurs d’emploi n’ont pas toujours conscience.
L’outil d’Agoria permet de faire le bilan des compétences, entreprise par entreprise. Cela nous aidera à déterminer comment développer des offres de formations qui permettent de rehausser le niveau de la main-d’oeuvre et permettre aux entreprises de trouver les compétences qu’elles recherchent.”
Moment-charnière
L’initiative DigiCoach a reçu le support des trois ministres régionaux de l’économie (Willy Borsus pour la Wallonie, Bernard Clerfayt pour Bruxelles et Hilde Crevits pour la Flandre) qui veulent donc y voir un outil venant compléter les instruments qu’eux-mêmes pilotent ou désirent déployer dans leurs Régions respectives dans le cadre de la transformation numérique des entreprises.
Pour Willy Borsus, l’initiative est un apport intéressant dans le cadre d’une stratégie de transformation (ou de transition) numérique dont la Wallonie a grandement besoin, une sorte d’outil qui, marié à d’autres initiatives et outils locaux, peut venir aider à la concrétisation du plan Digital Wallonia.
Willy Borsus: “La transformation numérique est un message qui a déjà été porté par le passé mais la crise du Covid représente sans doute un contexte d’opportunité. Le message devient plus audible qu’hier. Le numérique est un outil de relance et de croissance.”
“La numérisation est un outil de croissance mais aussi un outil de relance. On parle beaucoup de délocalisation industrielle, de re-territorialisation, de maintenir les activités chez nous, de permettre aux structures, en ce compris les jeunes et les petites, de grandir. On peut agir sur les leviers de la formation, de la R&D, mais le numérique est essentiel. Ce n’est pas ou pas seulement avec le coût de main-d’oeuvre ou de l’énergie qu’on fera la différence. L’un des leviers majeurs est de faire franchir des paliers aux entreprises via leur transformation numérique, dans tous leurs processus…”
Après publication du Baromètre 2020 de l’AdN (qu’on attend dans les semaines à venir), il promet de fixer “au plus tard pour l’automne” des objectifs “ambitieux”.
Des scores de “maturité numérique” encore inquiétants du côté des PME wallonnes. Source: Baromètre Maturité numérique 2018, AdN.
Le score moyen de maturité numérique des entreprises wallonnes se situe aux alentours des 25 sur une échelle de 100 [relire notre article à ce sujet]. Ce qui n’est pas un score très reluisant. “L’état de maturité évolue, pas à pas [Ndlr: + 4 points en deux ans, entre 2016 et 2018], mais il reste un important chemin à parcourir.
Sur base des chiffres du prochain Baromètre, le but est de faire un sérieux bond en avant.”
Par la force des choses pas encore de chiffres précis. A suivre…
Mais une question s’impose dès à présent: des objectifs “ambitieux” supposent des moyens. Qu’en sera-t-il, alors que la crise du coronavirus est passée par là, avec son train de coups de butoir au budget et aux ressources?
Réponse de Willy Borsus: “Il y aura également de l’ambition du côté des moyens. La progression [de maturité numérique] est en effet trop lente. Avec le soutien de l’AdN et du programme Digital Wallonia, il faut travailler sur les investissements pour les entreprises. Des moyens complémentaires seront au rendez-vous, à la fois dans le budget Relance et dans le budget structurel. Le but est d’accélérer le processus.” Le ministre signale en outre qu’en plus du travail avec l’AdN, il y aura également “démarche transversale” avec l’Union wallonne des Entreprises.
Rendez-vous donc “au plus tard à l’automne”…
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