Les jeux sérieux éducatifs ou, plus précisément, ceux qui commencent à faire leur apparition dans les salles de classe et de cours, en support des matières enseignées ou de situations vécues au quotidien par les enfants, sont-ils pertinents? Ont-il un effet bénéfique sur les apprentissages, la facilité d’assimilation, leur comportement face à certaines situations? C’est ce qu’a voulu déterminer un projet européen, coordonné par le centre technologique ITCL (Institute of Technology of Castilla y Leon), en Espagne.
Pendant une année, des tests ont été effectués avec deux jeux sérieux dans différentes écoles (5 établissements espagnols et 5 écoles britanniques, irlandaises et maltaises) afin de déterminer leur influence sur les changements de comportement d’enfants âgés de 12 à 14 ans.
Deux situations – ou phénomènes – faisaient plus particulièrement l’objet de l’expérience : d’une part, l’utilisation sécurisée d’Internet et d’espaces connectés tels que les réseaux sociaux; de l’autre, le harcèlement ou les brimades dont sont victimes des enfants.
Nom du projet: eConfidence (“Confidence in behaviour changes through serious games”). Il vient de rendre son verdict. A l’analyse, moyennant certaines règles et méthodologies à respecter (voir ci-dessous), “divers éléments tendent à indiquer que le jeu sérieux en classe peut exercer un changement significatif sur les connaissances des élèves et/ou sur leur comportement au sujet d’un sujet. […] Les jeux [tels que testés dans le cadre du projet eConfidence] peuvent être utilement utilisés comme ressources pédagogiques efficaces pour favoriser un changement de comportement positif en matière de brimades et d’usage sûr d’Internet.”
Le jeu sérieux Go Online pour mieux conscientiser les enfants à un usage sécurité d’Internet
C’est notamment le caractère immersif des jeux sérieux qui, moyennant une certaine régularité de jeu, permettrait d’induire des effets psychologiques positifs. Lors des tests, ils ont ainsi permis de mieux appréhender certains concepts parfois fort théoriques. Notamment la notion de “droit à l’oubli” sur Internet ou le décryptage d’un harcèlement parfois effectué de manière subtile.
Pour inculquer ou favoriser une utilisation plus sûre d’Internet, le jeu sérieux testé fut le jeu Go Online, structuré en cinq mini-jeux. Son but:
- “améliorer la prise de conscience des conséquences qu’impliquent des interactions avec un espace d’échanges en-ligne
- mieux instiller le sens de la vie privée et de la résistance à des comportements déplacés voire anti-sociaux
- favoriser la compréhension de concepts tels que l’anonymat ou le droit à l’oubli
- rendre plus sensible aux risques en-ligne et donner quelques outils pour les combattre (ou éviter)
- procurer des outils permettant aux enfants de surveiller par eux-mêmes leur sur-consommation ou leur usage impropre d’Internet.”
Tests probants mais sous certaines conditions
“A l’issue des activités de jeu avec Go Online”, peut-on lire dans les conclusions du projet, “les élèves étaient davantage capables d’opérer une distinction entre des personnes fiables et non fiables, en ligne, ainsi qu’entre des mots de passe faibles ou forts, comparé à leur degré de prise de conscience avant le jeu. Cette évolution était par ailleurs liée au nombre de fois que chaque élève s’est servi des mini-jeux.”
La pratique d’un jeu sérieux, bien pensé, permettrait d’améliorer le comportement en-ligne des enfants, pour éviter les nombreux pièges…
Les responsables en concluent donc un effet positif sur les capacités psychologiques des enfants. Toutefois, pour obtenir des résultats réellement probants, les jeux sérieux doivent se plier à une certaine dose de personnalisation “afin de prendre en compte les connaissances pré-existantes et le comportement de chaque élève.”
Le projet a par ailleurs permis de définir une méthodologie de développement de jeux sérieux. Elle se base sur plusieurs modèles, tels que l’Intervention Mapping Protocol (IMP), un protocole balisant les interventions visant à modifier les comportements, l’ATMSG (Activity Theory-based Model of Serious Games), et l’Applied Behaviour Analysis and Learning Analytics, qui applique les principes du béhaviorisme.
Méthodologie
Le projet-pilote eChallenge, financé par des fonds Horizon 2020, s’est déroulé pendant l’année scolaire 2017-2018 dans dix écoles (cinq espagnoles et cinq britanniques/irlandaises/maltaises), impliquant un total de 343 élèves âgés de 12 à 14 ans.
Le projet a impliqué plusieurs développeurs de jeux sérieux, universités, centres technologiques et experts pédagogiques. Le coordinateur du projet était l’ITCL Institute of Technology of Castilla y Leon, qui a collaboré pour la circonstance avec European Schoolnet (Belgique), everis (société de consultance espagnole, filiale du groupe NTT Data), Nurogames (développeur allemand de logiciels et de jeux, situé à Cologne), l’Université de Salamanque (Espagne) et la Faculté des sciences humaines et sociales de l’Université de Rijeka (Croatie).
Les résultats du projet eConfidence ont été résumés dans une brochure, téléchargeable via ce lien.
On y découvre notamment la méthode suivie, les buts recherchés, l’évaluation de la pertinence des jeux sérieux utilisés, les commentaires et avis des écoles participantes mais aussi des élèves.
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