Dans le courant 2018, Make It, mi-“startup studio” (1), mi-prestataire de services pour start-ups (notamment en collaboration avec des incubateurs et accélérateurs locaux), pourrait ouvrir une antenne dans la Silicon Valley. Le scénario en est actuellement à l’étude, suite à une première mission d’exploration effectuée à Londres en 2017.
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(1) “Startup studio”: nom donné à une structure qui incube des idées techno – idées que sa propre équipe a imaginées ou qui viennent de l’extérieur – et qui, en sollicitant les compétences d’une équipe pluridisciplinaire, les amène à maturité suffisante pour qu’elles deviennent de jeunes pousses volant de leurs propres ailes.
Pourquoi ce “startup studio”, basé à la fois à Namur et à Bruxelles et spécialisé en projets numériques et IoT, désirerait-il essaimer à l’étranger? Pour y répéter son “modèle” et ses activités? Peu probable de la part d’un “petit Belge” qui tenterait de faire la nique et de se différencier de structures nettement plus importantes, baignées de culture et de moyens entrepreneuriaux ayant déjà fait leurs preuves.
Quoique… Il est en effet un “petit quelque chose” que Make It espère faire valoir et utiliser comme hameçon en d’autres points du globe. A savoir: sa méthodologie en 4 étapes (Test It, Shape It, Build It, Grow It – voir plus loin dans l’article) qui, estiment les responsables de la société, présente certains avantages – de réalisme et d’efficience – négligés à l’étranger.
Mais l’essentiel pour Make It, en essaimant outre-Atlantique ou dans des pays plus proches, est d’y puiser des idées, des projets (plus) innovants…
“Si nous nous établissons aux Etats-Unis, ce sera avant tout pour avoir accès à d’autres types de projets, d’investisseurs et de défis ou idées que l’on pourra potentiellement “rapatrier” en Belgique. Notre but est en effet d’explorer d’autres marchés ayant un degré de maturité supérieur à ce que l’on rencontre en Belgique”, indique Guy-Louis de le Vingne, CEO de Make It. “Avec la possibilité aussi de rencontrer des investisseurs qui pourraient investir dans des start-ups belges et les aider à grandir, ou encore de convaincre des porteurs de projets de venir s’installer chez nous.”
L’un des arguments? “Nous sommes plus compétitifs en termes de coûts.”
Pas de Make It bis
L’antenne qui s’ouvrirait donc en Californie serait une “simple” tête de pont, un point d’ancrage devant permettre réseautage, prises de contacts et démonstration de savoir-faire. Pas question, à proprement parler, de dupliquer la société pour ouvrir un Make It bis. “Il ne s’agit pas de recréer un Make It sur place”, souligne Louis de le Vingne. “Il est en effet plus intéressant, pour des questions de coûts des compétences, d’assurer les services en Belgique. Nous pouvons proposer des compétences à des prix défiant toute concurrence et une haute qualité de production du projet. L’idée est donc plutôt de rapatrier des tâches de développement en Belgique.”
Première expérience à Londres
Une première mission d’exploration à l’international a été menée à Londres par Nicolas Streel, jeune diplômé (en communication et sciences politiques), dans le cadre du programme Explort de l’Awex. Ce programme de formation et de stage en commerce international permet aux sociétés (de toutes tailles) qui y ont recours de financer en bonne partie un séjour professionnel d’un mois d’un jeune diplômé ou d’un chercheur d’emploi. Voir note en fin d’article pour plus de détails sur ce programme.
Nicolas Streel (Make It): “J’ai noué des contacts avec l’écosystème de start-ups et d’innovation local, avec l’idée de leur faire accepter notre démarche et de ramener du business en Belgique.”
Objectif de sa mission (un mois en entreprise, un mois à Londres): tester le marché et déterminer si l’idée d’une implantation hors-frontières se justifie.
“Nous avons pu y créer un réseau. Le programme Explort permet d’ouvrir toutes les portes avant de s’installer éventuellement. Cela nous a permis d’identifier les opportunités et de déjà convertir nos contacts à la méthode Make It”, déclare Nicolas Streel. “J’ai noué des contacts avec l’écosystème de start-ups et d’innovation local, avec l’idée de leur faire accepter notre démarche et de ramener du business en Belgique.”
Mais le marché britannique, identifié et ciblé en raison de sa plus grande “maturité”, a-t-il réellement besoin d’une approche phasée comme la propose Make It? “L’un des différenciateurs du startup studio Make It est de miser sur la réussite de projets autofinancés. Ce qui, par définition, force à valider le marché le plus tôt possible. Nous forçons les porteurs de projet à générer de la traction client autour de quelques hypothèses, à faire le strict minimum pour vérifier que le client existe, en investissant le minimum.
Nombre d’incubateurs IoT, en ce compris en Angleterre, ne peuvent pas déterminer clairement si un marché existe pour les projets IoT qu’ils supportent. Ils investissent en pariant sur la réussite, en gut feeling, y consacrant beaucoup de temps et d’argent. Or, à Londres comme partout, pouvoir maximiser son investissement et réduire le risque est quelque chose qui leur parle.”
Choix des destinations
Où Make It pense-t-elle utile d’aller poser ses bagages? “Essentiellement des marchés plus matures: Etats-Unis, Londres, Paris, Berlin… Ce sont des places de marché plus importantes que la Belgique et où nous pouvons faire valoir notre facteur différenciant”, souligne Guy-Louis de le Vingne.
Pour l’heure, la préférence va clairement à l’ouverture d’une antenne dans la Silicon Valley. Make It espère éventuellement pouvoir valider l’idée en montant une nouvelle mission Explort avec l’Awex.
Pour ce qui est du choix de cette destination, elle se justifie non seulement par le “profil” de la région, en termes de foisonnement et de nature de projets, mais aussi en raison de son éloignement géographique.
Ouvrir des antennes dans d’autres destinations potentielles (Paris, Berlin, Londres) se justifie moins. “A Londres, par exemple, le réseau virtuel qui a été construit à l’occasion de la mission Explort devrait suffire et assurer une pérennité de relation”, estime Nicolas Streel.
Le ratio coût/opportunité/justification, pour ces éventuels points de chute européens, est à l’évidence tout autre que pour la Silicon Valley.
Par ailleurs, concrétiser de futures destinations dépendra “du succès que nous bâtissons en Belgique et de l’expérience californienne.”
Trois ans d’existence
Créée voici trois ans, Make It s’appuie actuellement sur une équipe d’une trentaine de personnes, parmi lesquelles figurent des chefs de projets, des développeurs, des designers, des ingénieurs électromécaniciens, des spécialistes en marketing digital…
Dans le cadre de son axe d’activités en tant que “startup studio”, Make It a pour l’instant 4 jeunes pousses à son actif:
– AeroSint: technique d’impression 3D multi-matière
– FullUp: jauge connectée pour citernes de mazout
– Tipaw: plate-forme de mise en relation entre éleveurs de chiens, pré-vérifiés, et acheteurs potentiels
– Epione: assistant numérique pour le suivi de l’épilepsie (une solution qui a pris forme à l’occasion du hackathon thématique qu’avait organisé UCB en 2015)
Nicolas Streel (Make It): “Notre terrain d’expérience est le digital au sens large et l’Internet des Objets de manière plus spécifique. Il s’agit en effet de concentrer notre champ d’action. Or, ce qui manque beaucoup en Belgique, c’est un acteur capable de créer des prototypes et des produits finis et qui allie cela avec une réelle capacité entrepreneuriale et pas uniquement une méthode lean. Make It comble un vide.”
Dans le cadre de ses activités de services pour start-up, la société intervient comme prestataire à la fois pour les start-ups dont elle est elle-même à l’origine et pour d’autres acteurs tels que des incubateurs et accélérateurs (VentureLab, MIC, programmes d’accélération de Cap Innove ou du BEP…).
Guy-Louis de le Vingne (Make It): “Les tests et validations d’existence d’un marché ou d’un “market fit” doivent se faire le plus tôt possible. Avant de construire un proto ou un MVP [minimum viable product]. Sans quoi, la start-up ne peut plus pivoter parce qu’elle a épuisé ses ressources à faire un mauvais MVP. La phase Test It doit donc intervenir juste après l’exercice BMC [Business Model Canvas].”Elle a mis au point une méthodologie en 4 étapes (Test It, Shape It, Build It, Grow It) qui structure une série de phases: test et validation d’idées, étude technique, validation du modèle économique, aide à la recherche de financement, construction de prototypes tant logiciels que matériels, assistance à la croissance.
Make It a par exemple testé les idées, concepts ou solutions de jeunes pousses telles que SunSlice (chargeur solaire modulaire pour smartphone), Maik (plate-forme de pari sur matchs FIFA) ou MyPsy (plate-forme sécurisée pour séances de consultation avec un psychologue).
En mode aide à la définition et à la validation d’un modèle économique, la société est intervenue, entre autres, pour Gecko (cadenas télécontrôlé), Spentys (scanner 3D pour fabrication 3D de plâtres) ou encore Hinnotech (bracelet connecté pour personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer).
Ses potentiels de design et de construction de prototypes ont par ailleurs été mis à profit par des start-ups telles que Holifresh (capteurs connectés pour transport de denrées et marchandises par voie maritime ou ferroviaire), Remote (caméra 3D pour livestreaming) ou encore le groupe d’Ieteren qui a fait appel à ses équipes pour le développement de l’appli WonderCar (clichés de voitures accidentées en réalité augmentée).
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Le programme Explort a vu le jour en 2006 et affiche un bilan plutôt positif:
- environ 6.000 stagiaires ont participé à des missions collectives (de 1 jour à 1 semaine de sensibilisation au développement commercial à l’international et de prise de contact avec l’international); ces missions peuvent inclure la visite d’un salon professionnel, d’institutions économiques et commerciales, ou de réelles missions de représentation (de courte durée) effectuée pendant quelques jours au bénéfice d’un groupe de sociétés wallonnes
- plus de 2.000 stagiaires ont effectué des missions individuelles spécifiques (d’une durée pouvant aller jusqu’à 2 ou 3 mois) pour quelque 1.200 sociétés.
Explort s’adresse à des étudiants ou à des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur ou universitaire, inscrits comme demandeurs d’emploi, mais aussi à des personnes en recherche d’emploi qui disposent déjà d’une “expérience probante” en commerce international. A l’avenir, l’Awex dit d’ailleurs vouloir mettre davantage l’accent sur cette catégorie de chercheurs d’emploi.
Notons encore qu’en 2017, l’Awex a porté sur les fonts baptismaux un réseau “Explort Alumni” afin de favoriser les échanges entre “anciens”. [ Retour au texte ]
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