ING vient de se payer la jeune start-up bruxelloise Qustomer. La banque met ainsi la main sur une solution de carte de fidélité dématérialisée qui permet d’accumuler des points auprès des commerçants via lecture d’une carte affichant un code QR en guise d’identifiant. La carte prend deux formes: physique ou virtuelle, téléchargée dans le smartphone du client. Selon le scénario imaginé par Qustomer, le commerçant dispose pour sa part d’une tablette (iOS) et d’une application qui lui permet de lire les informations du code, de constituer ainsi progressivement une base de données de clients et de s’en servir pour des actions de promotion et de fidélisation.
Quel intérêt ING peut-il voir dans une telle solution?
Réponse: “une complémentarité naturelle des paiements mobiles et du programme de fidélité” ainsi que la possibilité pour elle d’“accélérer le rythme d’innovation de la banque […] en travaillant à la fois avec des équipes internes dédiées et avec des partenaires et des start-up externes.”
Mais encore? “La stratégie d’ING”, explique sa porte-parole Tiziana Rizzo, consiste à évoluer davantage vers le champ des nouvelles technologies, non seulement dans le domaine des paiements mais aussi du côté de solution facilitant la vie du client.” S’il y a bel et bien des potentiels de synergie et de combinaison de fonctionnalités entre le volet paiement et le volet gestion de fidélité, aucun produit ou service ne devrait naître, à court terme, du rachat de Qustomer. ING attend d’elle qu’elle continue à faire évoluer et à enrichir fonctionnellement la solution.
Antoine Humbeeck, l’un des quatre co-fondateurs de la start-up, met pour sa part en avant l’atout que peut représenter pour un grand acteur tel ING la capacité d’une start-up de “réfléchir et pivoter rapidement — sans parler de notre connaissance des e-commerçants.”
Et l’avenir de Qustomer?
Pour Qustomer, l’espoir, en s’adossant — pour ne pas dire en se fondant — à un acteur tel qu’ING, est de “développer la gamme de produits et d’accélérer la croissance” et d’“amener Qustomer au niveau supérieur”. La société n’en dira pas plus, dans l’état actuel des choses, sur la nature des futurs produits ou fonctionnalités. Mais la raison d’être de l’acquisition est de pouvoir “bénéficier du savoir-faire et du réseau ING afin d’accélérer notre croissance, jusqu’ici organique, et de faire de notre solution une réelle carte de référence qui soit utilisée dans un maximum d’endroits et qui touche un maximum de consommateurs”, déclare Antoine Humbeeck. “ING peut nous y aider.”
La banque, elle, parle d’un soutien “financier et opérationnel”.
Pour grandir plus vite, Qustomer n’a donc pas repoussé les diverses marques d’intérêt dont elle dit avoir été la cible. Croître rapidement sur la scène locale a toujours été un objectif de la start-up. Preuve en est ce qu’Antoine Humbeeck nous déclarait voici un peu plus d’un an: “Nous estimons qu’il est important d’être fort quelque part pour devenir un leader au lieu de n’être qu’un petit acteur qui tente sa chance ailleurs sans avoir les références de départ. Nous visons donc d’abord la masse critique sur notre propre territoire.” Relire l’article que nous avions consacré au modèle et aux ambitions de Qustomer (juin 2014).
Qustomer ne risque-t-elle pas de se perdre dans le géant de la finance qu’est ING? L’équipe de Qustomer dit avoir pris les dispositions contractuelles nécessaires et avoir obtenu des garanties de fonctionnement indépendant. “Nous serons une filiale d’ING mais non intégrée à leur structure. Nous tenons d’ailleurs à notre fonctionnement indépendant, sans devoir nous encombrer d’un reporting lourd, inhérent aux grandes corp.”
La forme exacte que prendra, demain, le fonctionnement “indépendant” qu’espère conserver Qustomer n’a toutefois pas encore été précisée. “Jusqu’ici, nous avons surtout beaucoup parlé de stratégie, de synergies et de convergences futures. Aucune décision n’a encore été prise en termes de marque (à long terme).” Les choix technologiques ou décisions de développement que pourrait proposer voire imposer ING demeurent aussi l’un des points qu’il s’agira d’éclaircir.
Une garantie toutefois, selon Antoine Humbeeck: ING n’imposera pas ses services aux clients ou commerçants. “Ils veulent avant tout être ouverts à tout client et tout commerçant”, sans restriction, donc, de choix de prestataire financier. Dont acte.
Développer la clientèle
Au moment de son rachat, Qustomer affiche 800.000 utilisateurs belges et un millier de commerçants à son compteur. Société d’origine bruxelloise, c’est surtout en Flandre que Qustomer a décidé de s’implanter en premier lieu — pour des raisons de potentiel de clientèle (moins de solutions concurrentes que sur le marché francophone) mais aussi d’intérêt plus prononcé des (petits) commerçants flamands pour des solutions technologiques. Aujourd’hui, les commerces néerlandophones représentent 75% de sa clientèle. Bruxelles vient en deuxième position, avec une pénétration encore modeste côté wallon. Antoine Humbeeck y qualifie d’une légère croissance “douce mais sûre”. Mais sans démarchage réellement actif. Peut-être les nouveaux moyens dégagés grâce à ING permettront-ils de faire évoluer les choses…
Quels types de commerces trouve-t-on comme utilisateurs de la solution Qustomer? “La moitié, environ, sont des magasins variés, tels que des magasins des vêtements, des points de vente pour articles de décoration, des fleuristes et autres magasins de produits. Un tiers concerne le secteur de l’alimentation (traiteurs, snacks, etc.). Le reste consiste en toutes sortes de commerces, parmi lesquels par exemple des centres de soins, des coiffeurs, etc.”
Dernière remarque: pour l’heure, les consommateurs continuent apparemment de privilégier la version physique, tangible, de la carte QR Qustomer. Les versions dématérialisées, chargées sur smartphone, sont encore minoritaires “mais en progression régulière.” Preuve toutefois que même une solution d’e-fidélité a encore du chemin à faire avant d’être totalement dématérialisée…
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