Les “tags”, ces petits panonceaux ou balises affichés sur des murs, vitrines, mobilier municipal, monuments…, c’est du passé. Ou, tout du moins, ce n’est plus ce qu’attendent majoritairement les utilisateurs mobiles pour se renseigner ou interagir avec leur environnement, que ce soit pour se faire aiguiller vers une curiosité locale, découvrir le catalogue ou la spécialité d’une boutique, connaître les heures d’ouverture d’une administration etc., etc.
Voilà en tout cas la conclusion qu’a tirée TagTagCity d’un réexamen de son positionnement sur le marché. La société n’a pas encore été jusqu’à changer de nom mais ses choix de dénominations pour ses nouvelles solutions sont éloquents.
Dans le courant de l’année dernière, dans la foulée d’une levée de fonds (voir encadré ci-dessous), la société a sensiblement revu ses objectifs, priorités et ambitions.
Son idée première – une plate-forme Web et mobile répertoriant et décrivant brièvement des “points d’intérêt” divers dans nos villes et endroits de vie – n’a certes pas perdu de son intérêt. Au contraire, elle lui sert de socle pour proposer d’autres services. Mais ce n’est plus le produit-phare, le différenciateur face à un marché qui a évolué et a attiré de nouveaux prestataires.
Décliner et spécialiser
“La visibilité en-ligne d’un acteur de proximité demeure le fil rouge de notre positionnement”, souligne Quentin Felice, responsable business development.
En 2014, TagTagCity a levé 1,5 million d’euros, provenant essentiellement d’investisseurs français et hollandais. Les co-fondateurs de la société (Geoffroy Simon et Olivier Poulaert) ont eux réinjecté quelques deniers personnels pour accompagner l’opération.
La base de données de “points d’intérêt” constituée par la société dépasse désormais les 5 millions de références, dont la majorité sur le sol européen. 140.000 sont situés en Belgique dont quelque 41.000 correspondent à des activités commerciales et 6.000 à des hôtels.
La société emploie actuellement 10 personnes. Si son siège social reste basé à l’ICAB, l’équipe, elle, a déménagé vers Co.Station, au coeur de Bruxelles, dès la réouverture de ce pôle d’attraction des start-ups et porteurs de projets.
Désormais, la stratégie de TagTagCity se décline en trois axes et solutions: minis sites responsive pour TPE et commerces, applications mobiles pour villes et communes, et solution de paiement temps réel sur mobile.
Le premier axe est un prolongement direct de la solution imaginée dès les débuts de la société. Il consiste à proposer des “mini sites Internet”, de type description basique (adresse, activités, heures d’ouverture), à une clientèle toutefois reciblée vers les PME, TPE, petits indépendants et commerces de proximité. Ces mini-sites, entre-temps, ont sacrifié à l’impératif du responsive design, afin d’être consultables à partir de tout type de terminal.
En version Premium (90 euros par an), cette solution, baptisée MobilOptim, permet à l’abonné d’afficher un mini-bandeau promotionnel, de prévoir des appels à action (clic-to-call, positionnement GPS sur mobile…), d’actualiser lui-même ses données. Disponible depuis fin 2014, MobilOptim héritera, dès ce mois d’avril, de nouvelles fonctions: choix de thème graphique, personnalisation du fond visuel, possibilité d’acheter un nom de domaine directement via la plate-forme TagTagCity.
Cible: les commerçants
Avec MobilOptim, TagTagCity négocie donc, à l’évidence, un virage vers le monde petites structures commerciales – essentiellement les commerçants de proximité.
Si l’application ne procure encore qu’un “service minimal”, à savoir un mini-site vitrine qui permet au commerçant d’augmenter la possibilité d’être “repéré” par le mobi-consommateur, la société aurait-elle d’autres ambitions qui la feraient entrer davantage en concurrence avec d’autres initiatives visant les commerçants, via l’offre de services de référencement, de portail d’achat, de place de marché mutualisée?
Quentin Felice s’en défend: “Nous voulons en rester à une démarche favorisant le premier pas du petit commerçant vers le numérique.” La société dit en outre vouloir adopter une approche “modulaire”, via l’offre de plug-ins “en fonction des spécificités de chaque secteur d’activité. Les besoins d’une crèche, d’un médecin généraliste ne sont pas ceux d’un e-commerçant. Nous voulons donc permettre à chacun d’associer son (mini-)site au module ad hoc: un module de gestion de rendez-vous pour le médecin, de réservation de table pour un restaurant…”
Quentin Felice (TagTagCity): “Nous ne voulons pas dévier de notre coeur de métier qui est la visibilité en-ligne du client.”
TagTagCity est actuellement en pleine réflexion quasi-philosophique sur le rôle qu’elle compte remplir: quels plug-ins développer éventuellement elle-même, pour quel secteur, quelle problématique, ou externaliser vers des partenaires? “Nous ne voulons pas dévier de notre coeur de métier qui est la visibilité en-ligne [du client], pas la gestion de stocks par exemple. Nous ne voulons pas nous disperser, nous perdre. La décision sera prise avec précaution…”
Pour ce qui est de MobilOptim, des contacts ont été ou seront pris avec divers intermédiaires, aptes à sensibiliser les commerçants à l’offre de TagTagCity. Parmi eux, les associations de commerçants, les association centre-ville ou encore Atrium, à Bruxelles. “L’association des commerçants de la Porte de Namur, à Bruxelles, par exemple, s’est dite intéressée à “numériser” les 60 commerçants affiliés et à offrir notre plate-forme”. A confirmer, bien entendu.
A noter encore que la solution MobilOptim existe en français, en néerlandais et en anglais. Prochaines langues visées: l’espagnol, voire le portugais, afin de pouvoir viser les marchés sud-américains. “Il y a là un important marché à saisir”. Mais TagTagCity dit ne pas vouloir brûler les étapes. “Nous voulons d’abord réussir le proof of concept local, prouver que la demande est réelle et que notre approche est la bonne, tant vis-à-vis de l’usager lambda, des commerces que des administrations communales [voir ci-dessous].”
Surfer sur la vague(lette) des “smart cities”
Deuxième axe stratégique choisi par TagTagCity: l’offre d’applications mobiles pour les villes et communes. L’offre MobiCities s’inscrit dans la stratégie d’approche que TagTagCity avait entamée vis-à-vis de cette clientèle par le biais du partenariat passé avec Belfius (projet “Interactive City” – relire notre article) et qui prévoyait la mise à disposition de tags (les 20 premiers étant gratuits) afin d’identifier et de documenter divers “points et sites d’intérêt” des villes et communes de Belgique.
“Suite au lancement de cette première initiative, nous avons effectué une enquête pour déterminer les réels besoins des villes et communes”, explique Quentin Felice. Conclusions? En priorité, informer les citoyens: informations sur les services communaux, diffusion d’actualités, signalement d’événements, mais aussi de commerces ou points d’intérêt à proximité…
“Les villes et communes disposent généralement déjà d’un site Internet, parfois développé en responsive design, mais elles sont plus rares à avoir défini une stratégie de présence mobile et de relation temps réel avec le citoyen. Beaucoup ne savent pas comment procéder et sont en attente d’une solution ou d’un élément fédérateur.”
MobiCities procure dès lors au mobinaute (s’il utilise des terminaux iOS ou Android) un accès à la base de données des points d’intérêts locaux, répertoriés par TagTagCity (sur sa plate-forme préexistante) ou fournis par la commune. La solution inclut la version freemium de MobilOptim (hors donc ses fonctions promotionnelles et marketing) et permet à la commune de personnaliser la charte graphique.
Première commune francophone à avoir adopté cette nouvelle solution: Lasne. D’autres entités pourraient être annoncées à court ou moyen terme.
Outre les fonctions d’accès à l’information (statique ou dynamique- actualités, événements…), à la géolocalisation de l’internaute par rapport à la géographie de la municipalité et au signalement de points d’intérêt proches, une autre fonction que demandent les communes, selon Quentin Felice, est l’envoi dynamique d’alertes et notification (incident, service de collecte…). A terme, TagTagCity pourrait aussi y ajouter une dimension de segmentation en fonction du profil de chaque citoyen.
Payer ses services communaux
Troisième solution qui pourrait se fondre avec la précédente (mais en la matière des discussions sont encore en cours entre TagTagCiity et Belfius): une fonction de paiement mobile temps réel, ajoutée à la solution Interactive City (en collaboration dès lors avec Belfius). L’idée est de se servir des tags apposées par les communes sur les sites, bâtiments, monuments… comme “accroche contextuelle” pour l’achat d’un produit ou service.
En janvier, la commune flamande d’Erpe-Mere qui a servi de commune-pilote a par exemple permis aux citoyens de payer leur ticket pour assister au championnat de cyclo-cross et ce, en scannant le tag apposé à un point spécifique pour l’occasion. L’idée est d’étendre cette fonction de paiements à divers scénarios: accès à la piscine communale, à un musée, achat virtuel de produits vendus en e-boutique… Le paiement, lui, s’effectue via l’application Bancontact/Mister Cash.
A terme, cette solution pourrait permettre de payer en-ligne, via son portable, des documents communaux, timbres fiscaux… Des discussions sont actuellement en cours avec Belfius (en effet, MobiCities est une solution purement TagTagCity tandis qu’Interactive City est le fruit d’un partenariat avec la banque). Et il ne serait dès lors plus nécessaire, si le scénario que voudrait autoriser TagTagCity est approuvé, de scanner un tag physique. Une fois l’application Interactive City installée sur le mobile, l’achat de ce genre de services se ferait de manière entièrement virtualisée.
Le pourquoi de ce recentrage
On le voit, TagTagCity s’écarte quelque peu de son positionnement premier qui était l’offre de services d’information de proximité associée au déploiement de tags. C’est qu’entre-temps, les habitudes des utilisateurs (mobiles) ont évolué et que TagTagCity doit se chercher une valeur et une raison d’être différenciatrice par rapport à des concurrents nouveaux tels que FourSquare ou le moteur de recherche Yell.
“Le tag”, explique Quentin Felice, “peut attiser la curiosité mais ce qui prime surtout, aux yeux de l’utilisateur, c’est la mobilité, le fait de ne pas devoir impérativement se rendre à un endroit précis pour accéder à l’information en scandant le tag ou en se rapprochant de la micro-balise NFC. A partir de 2010 et 2011, on a clairement vu un début de déclin de l’utilisation des QR codes. Ce mode d’interaction “active” – qui force l’usager à accomplir l’action d’un scanning physique – est supplanté par l’interaction dite passive, où l’information lui est livrée spontanément par détection de sa présence à proximité d’un point pouvant l’intéresser.”
Nous sommes entrés dans l’ère du geosensing, des balises qui détectent un usager via l’appli installée sur son smartphone…
Par contre, cette interactivité “passive” n’est pas encore applicable à la fonction de paiement, estime Quentin Felice. Des réticences subsistent – et on peut en comprendre, voire approuver, les raisons – lorsqu’il s’agit d’autoriser un paiement ou prélèvement financier. Pour ce genre de fonction, pas question de simplement cliquer pour signifier son accord: une étape supplémentaire subsiste. A savoir, l’introduction d’un code, éventuellement via lecture d’une balise NFC ou balayage de tag.
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