Le concept d’e-learning commence tout doucement à percoler dans le monde scolaire. Avec certes encore bien des obstacles, des réticences, des instruments et ressources qui manquent encore à l’appel mais la possibilité d’ajouter l’espace virtuel à l’espace physique de la classe comme instrument pédagogique semble séduire un nombre croissant d’acteurs.
C’est ainsi qu’un projet-pilote est en cours au sein de 15 écoles de l’enseignement secondaire francophone (1) afin de valider le potentiel de la solution open source Claroline Connect (une solution belge née à l’UCL) et de l’enrichir de divers modules directement utiles à ce niveau d’enseignement.
“La plate-forme d’e-learning Claroline Connect a en effet été davantage conçue pour les besoins de l’enseignement supérieur”, souligne Laurent Gruber, coordinateur du projet et par ailleurs professeur de sciences à l’école Frans Fischer de Schaerbeek (un institut communal d’enseignement technique). “Il lui manque donc des fonctionnalités qui en permettraient l’utilisation au secondaire.”
Le projet-pilote, initié en mai de cette année et devant se terminer en juin 2015, a dès lors pour objectif de tester la plate-forme Caroline Connect existante et de faire remonter des informations vers l’équipe de développement du consortium Claroline.
Les nouvelles fonctionnalités ajoutées (dont certaines sont déjà disponibles en version bêta) seront exploitables dès la rentrée 2015.
Ne pas s’arrêter aux seules fonctionnalités
Les fonctions jugées utiles seront développées non seulement par le consortium Claroline mais aussi par les participants au projet. Et c’est Laurent Gruber lui-même qui s’y colle. Outre le fait qu’il soit professeur, il a aussi la particularité d’avoir des compétences en développement, ayant notamment travaillé pendant 5 ans comme consultant informatique pour le groupe Amster (avant son acquisition par NSI).
Laurent Gruber: “Nous avons choisi Claroline Connect plutôt que Moodle, par exemple, en partie en raison de la proximité des équipes de développement et leur esprit d’ouverture par rapport à nos besoins et demandes. La réflexion s’effectue conjointement.”
Les fonctionnalités supplémentaires planifiées concernent la gestion des bulletins, des présences, du journal de classe, une fonction carnet de notes, la gestion des compétences, le plan individualisé d’apprentissage…
Deux fonctions ont d’ores et déjà été développées (et publiées, quoiqu’encore au stade bêta, sur GitHub). A savoir: la gestion des bulletins et le carnet des matières. “Les personnes intéressées peuvent d’ores et déjà les utiliser… si elles acceptent un certain degré d’instabilité.”
Aux yeux de Laurent Gruber, l’e-learning est un instrument essentiel d’un enseignement en phase avec la réalité actuelle. “Il est temps de faire entrer l’école dans le 21ème siècle. Si les jeunes, par exemple, ne peuvent utiliser Facebook en journée, ils deviennent fous. Il faut donc que l’école parle leur langue.
L’e-learning est aussi un instrument de différenciation. Il permet de mettre en oeuvre des parcours d’apprentissage qui s’adaptent à l’apprenant. C’est aussi un outil intéressant pour la médiation, par exemple grâce à l’historicisation des exercices.”
Le projet-pilote est également l’occasion de pousser plus loin la réflexion sur l’utilité de l’e-learning. “Une réflexion est engagée sur le côté pratico-pratique: quelle sera la place des parents, quels scénarios d’utilisation seraient possibles… mais aussi comment aménager les communications avec les élèves afin d’éviter les dérives de l’Internet.”
De l’administration au pédagogique
Les 15 écoles engagées dans le projet contribuent, chacune à leur façon, à l’exercice. L’utilisation qu’elles font de Claroline Connect varie en effet selon leur perception de son utilité ou le degré de maturité qu’elles ont atteint (au niveau de la direction, des professeurs…) en termes d’enseignement “virtualisé”. Certaines, par exemple, explorent davantage les potentiels de la plate-forme pour des communications entre professeurs. D’autres, par contre, vont plus loin et impliquent d’ores et déjà les élèves, dans le cadre des cours.
C’est le cas à Schaerbeek. Du moins pour les classes au-delà de la 3ème. “Pour les tout premiers degrés, les tests se concentrent sur les modes de travail et de collaboration entre enseignants”, précise Laurent Gruber. “Par exemple pour la tenue des bulletins sur la plate-forme, pour la publication des documents, dans une sorte de salle des profs virtuelle. Mais dès 2015, nous élargirons le champ aux élèves.”
Dans les plus grandes classes, par contre, les élèves sont d’ores et déjà inclus dans la boucle. “Ils y trouvent des documents pour réviser leurs examens, mais aussi les cours et les exercices du quotidien.” Le nombre de cours mis en ligne dépend évidemment pour l’instant du dynamisme de chaque professeur…
“Les premières réactions des élèves participant au projet-pilote sont positives. La plate-forme Claroline Connect leur procure un outil de travail proche de la manière dont ils ont aujourd’hui de communiquer. Nous avons par exemple constaté, dans notre école, qu’ils se connectent beaucoup à la plate-forme, notamment le mercredi après-midi pour des échanges et de la consultation de documents.”
A Schaerbeek, les professeurs se sont en outre engagés dans un travail de réflexion sur la manière de créer, collégialement, des ressources. “L’objectif est de pouvoir importer et exporter des ressources entre différentes plates-formes, de telle sorte qu’il soit possible de les partager entre professeurs, voire entre écoles.”
Dans d’autres écoles, des professeurs se penchent sur d’autres problématiques et potentiels. Tels que la structuration de parcours pédagogiques, avec scénarisation des différentes activités que doit effectuer un élève. Ou encore le suivi au quotidien et l’orchestration des cours, dans la mesure où l’e-learning permet à chaque élève d’évoluer à son rythme.
Les responsables du projet-pilote veulent également initier des discussions avec les éditeurs de ressources scolaires “afin de déterminer comment il serait possible de ramener leurs contenus vers la plate-forme Claroline.”
Faciliter l’adoption
Les modules complémentaires destinés à l’enseignement secondaire seront donc opérationnels d’ici la rentrée 2015. L’équipe du projet-pilote est toutefois consciente que l’adoption de ces potentiels d’e-learning n’ira pas de soi. Sans doute surtout du côté enseignants. “Il y a évidemment un problème de compétences à acquérir. Les écoles auront besoin d’un accompagnement. Une réflexion est en cours à ce sujet.”
Elle concerne aussi bien le côté pédagogique que purement fonctionnel. “Il faut par exemple éviter que la plate-forme ne soit pas utilisée tout simplement parce que les écoles ne sauraient pas quoi en faire… D’un point de vue pratique, on pourrait s’orienter vers une solution SaaS, avec mise à disposition des fonctions à la demande, avec hébergement assuré, sans que les écoles doivent le faire elles-mêmes.”
Autre piste explorée: l’offre d’une solution plus complète que la seule plate-forme Claroline Connect. L’idée étant de proposer, en plus de cette dernière, divers outils (eux aussi open source) tels que OwnCloud (pour le stockage et le partage de documents via le cloud) ou des communications audio/chat/vidéo (via WebRTC).
Autre condition essentielle: un coût abordable. “Les tarifs, eux aussi, sont étudiés actuellement. Il faudra être le moins cher possible tout en garantissant un niveau de service suffisant aux écoles et la viabilité financière de la plate-forme.”
Des contacts exploratoires ont été engagés avec la Fédération des Pouvoirs Organisateurs, avec le SeGec (enseignement libre) et le CPEONS (enseignement public communal et provincial), ainsi qu’avec les pouvoirs publics, en vue d’une éventuelle inclusion dans le plan Ecole numérique.
(1) Ces 15 établissements sont disséminés à travers la Wallonie et la Région bruxelloise: Bruxelles, Namur, Tournai, Waterloo, Bertrix… [ Retour au texte ]
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