LeanSquare: la recette prendra-t-elle?

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Par · 15/10/2014

Neuf mois après son inauguration officielle et après avoir apporté, en cours de route, quelques “ajustements” à son modèle opérationnel, comme on le verra plus loin, l’“accompagnateur” liégeois de start-up “low Tech” (start-ups Web notamment) LeanSquare fait un premier point sur ses activités.

Quelques points de repère?

  • 14 start-up “en portefeuille”, sélectionnées lors des trois premiers appels à projets, dont le 3ème est inauguré ce 13 octobre
  • un 4ème appel à projets à initier à une encablure de fêtes de fin d’année
  • sans doute une prise de participation (par MeusInvest) dans 4 start-ups, aujourd’hui accompagnées par LeanSquare (pour rappel a déjà investi dans 4 start-ups ‘low tech ‘ jusqu’ici, dont trois aux connotations IT/numériques plus ou moins marquées)
  • premiers partenariats avec d’autres acteurs de l’écosystème “animation économique” liégeois
  • création d’un Startup Health Check-up, outil d’(auto-)évaluation de maturité de projet qui est désormais décliné sous la forme d’un cours en-ligne. Voir cet autre article pour plus de détails sur le contenu du “Startup Health Checkup”
  • recherche de nouveaux partenaires émanant du secteur privé (pour des participations à des financement ou pour du coaching de start-ups).

Un cycle de vie mal géré

Nous l’avions déjà expliqué dans l’article qui présentait LeanSquare, cet acteur de l’accompagnement et du pré-financement (capitaux d’amorçage) a été lancé par MeusInvest dans l’intention d’apporter une réponse à une carence. A savoir, le manque de maturité de nombre de projets de start-ups, même lorsqu’ils ont déjà transité par diverses structures d’accompagnement ou “accélérateurs”.

Ben Piquard (LeanSquare): “Les start-ups font appel à des capitaux à un stade trop précoce de leur cycle, alors que la phase de validation n’a pas encore été franchie. Cela a souvent pour effet de leur faire perdre la main – très tôt – sur leur sort.”

Ben Piquard, ancien patron du MIC de Mons et désormais à la tête de LeanSquare, y ajoute un autre travers que l’accélérateur de MeusInvest se propose de corriger: le stade de leur évolution que choisissent souvent les jeunes pousses pour se mettre en quête de capitaux. “Il y a, dans le monde des start-ups, un mythe de financement. Elles font appel à des capitaux à un stade trop précoce de leur cycle, à un moment où elles en sont en fait encore au stade du test de leur idée. Alors que la phase de validation n’a pas encore été franchie. Cela a souvent pour effet de leur faire perdre la main – très tôt – sur leur sort [du fait que les investisseurs exigent une trop grande part des actions et pouvoir de décision].” Des rênes dont elles sont privées dans la phase cruciale de réelle croissance, voire d’internationalisation.

LeanSquare veut donc retarder ce moment d’appel à financement tout en préparant mieux les start-ups à cette étape cruciale. Histoire d’éviter non seulement la perte de maîtrise stratégique mais aussi et surtout en consolidant le dossier et le projet. “souvent, les start-ups échouent pour cause de déséquilibre dans la manière dont les 5 piliers nécessaires à leur réussite [à savoir: modèle économique, produit, équipe de direction, clientèle, financement – selon l’équation définie par Startup Genome, projet de cartographie et d’analyse du phénomène des start-ups et de ce qui sous-tend les réussites mais aussi les échecs]. LeanSquare se propose de leur fournir les outils et l’accompagnement pour instaurer cet équilibre.”

Startup Health Checkup

Le Startup Health Checkup prend la forme d’un questionnaire de 80 questions, organisées selon la méthode d’analyse Startup Genome. Un test que les starters peuvent effectuer eux-mêmes, en mode auto-évaluation, pour évaluer le degré de maturité de leur projet. Le test peut s’effectuer en-ligne mais l’accélérateur organise aussi, quatre fois par an (à chaque appel à projets), un atelier in situ. Le questionnaire rempli sert d’ailleurs de dossier de candidature. Sur base des réponses, le jury (composé de Ben Piquard, de Gérôme Vanherf de Cide Socran, de représentants de MeusInvest, et éventuellement d’un entrepreneur invité) décide quels dossiers seront accompagnés.

Gaëtan Servais, directeur de MeusInvest: “Accompagner les start-ups vers la maturation et leur donner les moyens et les raisons de demeurer en terre liégeoise.”

Les non sélectionnés, eux, auront au moins une sorte d’exercice-vérité en main, histoire de revoir leur copie et, qui sait?, de revenir en seconde sess’ (pour un prochain appel à projets).

“Nous organisons un entretien avec chacun des starters dont le projet n’a pas été retenu”, ajoute Hughes Danze. “Nous pouvons ainsi leur en expliquer les raisons et les inviter éventuellement à retravailler leur projet pour retenter leur chance plus tard.”

4 appels à projets par an

Une quinzaine de projets ont posé candidature pour bénéficier de la 3ème ‘saison’ d’accompagnement de LeanSquare, qui démarre en cette mi-octobre. Cinq ont été retenus, dont deux ayant des connotations IT: Andaman7, projet de dossier médical personnel collaboratif (pour iPhone et iPad) permettant l’échange sécurisé de données entre patients et professionnels, et 3D Corner, qui veut proposer des services liés à l’impression 3D et à la fabrication additive (pour entreprises et pour particuliers).

Un quatrième appel à projets sera lancé avant les fêtes de fin d’année. L’espoir est à nouveau de recueillir une quinzaine de candidatures et d’en retenir 4 ou 5.

Petit flash back sur les start-ups (à orientation IT) qui ont été accueillies depuis ce début d’année: NextRide, Fleye, Foxi, LoadStory, WATM (We Are the Models).

“Amorcer la pompe”

L’un des défis que LeanSquare devra relever au fil de l’eau sera d’attirer et de dénicher suffisamment de projets et start-ups pour alimenter son programme d’accompagnement [la durée de “couvaison” étant, pour rappel de 3 à 12 mois, selon la vitesse de maturation].

Très rapidement, dès les premiers mois de fonctionnement, les initiateurs du projet se sont rendu compte qu’il ne suffisait pas d’avoir fait acte de présence pour cueillir et attirer les porteurs de projets. “Il faut mettre énormément de push pour que cela marche”, constate Hughes Danze, porte-parole de MeusInvest. “Nous avons dès lors quelque peu adapté le modèle initial.” Pour lui donner plus de corps. “Le développement de l’écosystème liégeois est essentiel. Chose qui n’a pas été suffisamment fait au cours des premiers mois.”

Hughes Danze (MeusInvest): “Nous mettons tout en oeuvre pour transformer ce qui était un microcosme en écosystème où chacun se parle et où l’accent est mis sur les complémentarités.”

C’est dès lors pour renforcer son attractivité et sa crédibilité, pour s’insérer plus activement dans le maillage local, que LeanSquare a recruté Ben Piquard, a embrigadé Gérôme Vanherf (très actif dans tout ce qui est Startup Weekend, coworking, TEDx) et développé de nouveaux outils, tels que le Startup Health Checkup.

Tous les projets n’aboutissent pas. Certains changent d’orientation en cours de route. D’autres s’envolent bien avant l’échéance des 9 ou 12 mois, ayant trouvé la stabilité désirée. C’est le cas de Fleye, start-up pilotée par Laurent Eschenauer qui a développé une caméra volante grand public (“pour aventuriers et sportifs”).

Pour sa part, Foxi, site de vente en-ligne de tickets pour “activités ludiques et originales”, a effectué un “pivot” et se réoriente davantage sur l’offre de services – organisation, gestion et promotion d’événements à caractère ludique et pédagogique.

Et puis il y a toujours la possibilité que même coachée et encadrée, et même au prix de plusieurs réorientations du scénario d’origine, l’expérience ne donne pas de résultat. Dans ce cas, LeanSquare tirera l’échelle. “Douze mois [Ndlr: ce qui est déjà une rallonge d’un trimestre par rapport au schéma de départ] est à notre avis une durée maximale. Si, à l’issue de ces 12 mois de coaching intensif, la maturation n’est pas au rendez-vous, s’il n’y a pas des preuves de réel intérêt de la part de clients, c’est sans doute le signe que l’idée n’est pas la bonne. Mieux vaut alors tourner la page…”, déclare Ben Piquard.

L’espace physique où est implanté LeanSquare s’est de plus en plus ouvert à d’autres acteurs de la scène liégeoise avec qui, de manière plus fondamentale, des collaborations et partenariats ont été et continuent d’être recherchés.

Parmi les liens déjà tissés, citons ceux qui concernent:

  • le Startup Weekend
  • le Café numérique, qui prendra bientôt ses quartiers dans les locaux de LeanSquare)
  • l’éditeur Edi.pro, qui y a installé ses livres orientés IT et business pour une libre consultation par les starters et qui organisera des conférences (sur des thèmes tels que les modèles d’affaires, le crowdfunding… ainsi que des séances mensuelles de rencontre avec des auteurs de livres
  • l’espace de coworking La Forge qui pourra accueillir les starters non sélectionnés par LeanSquare et permettra d’effectuer le test Startup Health Checkup.

L’espace veut aussi multiplier les événements, conférences, ateliers organisés par tous les acteurs évoluant ou pouvant influencer la sphère start-up (WSL, MIC, HEC ULg, ID Campus, Liège Creative…). Il deviendra en outre le point d’ancrage du futur Hub Créatif liégeois.

Le véritable premier bilan interviendra sans doute dans un an, de quoi se laisser le temps de vérifier comment les start-ups accompagnées ont évolué et si les premières prises de participation (par MeusInvest ou d’autres) ont été utilement exploitées par les jeunes pousses.

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Bientôt financées? 

Les dossiers sont encore en cours d’analyse mais 4 start-ups actuellement accompagnées par LeanSquare seraient en principe en bonne position pour bénéficier d’une mise de fonds par MeusInvest (et un éventuel autre acteur?) d’ici la fin de l’année. Parmi elles, probablement, NextRide, auteur d’une appui mobile pour s’informer et organiser ses transports en commun (voir notre récent article sur ses derniers développements).

Dans un domaine non technique, Al Dento (pâtes alimentaires à base de farines d’insectes) et Be4after (un complément alimentaire naturel contre les légères gueules de bois, développé par deux pharmaciens) ont toutes leurs chances…

Jusqu’ici, MeusInvest a investi dans 4 start-ups ‘low tech ‘, dont trois aux connotations IT/numériques plus ou moins marquées:

  • I Looove.IT: site communautaire pour fanas de grimpe et autres sports
  • Famest: appli Web et mobile récompensant les personnes qui, sur réseaux sociaux, “monétisent” leur amour des grandes marques vestimentaires
  • et Student & Go: réseau social rapprochant étudiants du supérieur et entreprises (LeanSquare a pris une participation et MeusInvest a octroyé un prêt subordonné. [ Retour au texte ]
Le montage financier

L’invest liégeoise est à la fois le “géniteur” de LeanSquare et sa source de financement. Mise de fonds de MeusInvest dans l’aventure: 600.000 euros devant couvrir 3 à 5 ans d’opérations. A récupérer – c’est évidemment l’objectif – en réalisant des plus-values sur la revente de participations qui seront prises dans certaines des start-ups accompagnées. Il faudra, au minimum, équilibrer les comptes.

La prise de risque explique aussi que la sélection des projets retenues soit aussi hétéroclite. Des projets en tous genres – depuis l’alimentaire jusqu’au pilotage de drones ou à la 3D – font d’ores et déjà partie du catalogue LeanSquare. De quoi répartir les risques en misant sur des idées novatrices dans divers secteurs d’activités, avec des potentiels et agendas de valorisation variables.

Outre le financement de MeusInvest, LeanSquare a bénéficié d’une subvention de Creative Wallonia: deux fois 90.000 euros, pour les deux premières années.

S’y ajoute encore l’investissement en nature de Cide Socran, sous la forme de la mise à disposition d’un ETP et demi (équivalent temps plein). [ Retour au texte ]