Le pilotage de l’application et de la plate-forme Wallonie en Poche change de capitaine en ce début d’automne. Cette plate-forme d’agrégation de contenus et de services en mode portail personnalisable, imaginée et développée par LetsGoCity (une start-up qui fut, à ses débuts, incubée au VentureLab de HEC-ULg), regroupe une série de services et sources d’informations pouvant intéresser, à l’échelle locale, le citoyen.
Désormais, les destinées de l’application Wallonie en Poche seront gérées par FuturoCité. Avec le soutien budgétaire de la Région et avec pour mission de “contribuer concrètement à la création de nouveaux services et micro-services pour les besoins des pouvoirs locaux, du territoire et de ses différents acteurs (citoyens, entreprises…)”.
Aboutissement d’un vieux souhait
La réflexion d’une mise sur orbite de Wallonie en Poche, en dehors de la structure LetsGoCity, était à l’oeuvre depuis déjà quelque temps, pour ne pas dire depuis quelques années.
Lancée voici six ans, la plate-forme agrégative de services et de données Wallonie en Poche a eu pour cible première, en termes d’utilisateur, le citoyen wallon lambda. Où qu’il réside ou se déplace.
Objectif: lui fournir en un seul coup d’oeil toutes les informations utiles dans sa vie quotidienne – qu’il s’agisse d’identifier des lieux et événements culturels, de connaître les heures d’ouverture d’administrations publiques, les possibilités de gardes d’enfants après l’école ou encore le calendrier de ramassage des immondices. Les exemples de “micro-services” d’informations sont potentiellement innombrables. Encore faut-il “peupler” cette galerie.
Liège en Poche – l’une des réalisations de LetsGoCity pour les besoins d’une administration locale…
L’idée a rapidement séduit les villes et communes qui ont adhéré au concept, certaines devenant d’ailleurs clientes de LetsGoCity pour créer ce genre de point d’agrégation au niveau local. Ce qui a donné des solutions du genre Liège en Poche.
Quid de micro-services plus généralisables, géographiquement parlant? Comment élargir l’optique? Et, autre question que les fondateurs de LetsGoCity n’ont jamais gardé sous le boisseau: générer, agréger et assurer le suivi des contenus, assurer la gouvernance et la promotion de cet outil gov tech/civic tech est-il réellement une chose que doit prendre en mains un acteur privé?
La question tenaillait, dès 2019, le précédent directeur et co-fondateur de LetsGoCity, Pierre Labalue.
Lors d’une interview intervenue à l’automne 2019, il nous déclarait déjà s’interroger sur un possible passage de relais de Wallonie en Poche à un autre acteur, sans encore savoir très bien quel pourrait en être le profil ou le statut. Sa conviction toutefois était que “Wallonie en Poche devrait être davantage soutenu par le secteur public. Quand on voit le genre de campagne qui peut être développée et financée pour des actions publiques telles que la campagne Wallonie Plus Propre, avec marketing, campagne d’affichage et de publicité via de multiples canaux, on se dit qu’on pourrait réellement en faire plus pour la visibilité et l’adoption d’une appli comme Wallonie en Poche…”
Il aspirait par ailleurs à une “homogénéisation des projets soutenus par l’acteur public. On y gagnerait à veiller à ce que tout nouveau projet, ou appli, soit imaginé(e) afin d’être au minimum compatible avec une plate-forme d’agrégation (qu’il s’agisse ou non de Wallonie en Poche).”
Julien Gilon (LetsGoCity): “Des synergies fortes ont été identifiées avec FuturoCité, notamment dans la mesure où ce centre d’expertise [orienté smart city/smart region] veut promouvoir l’open data, qui est également notre crédo.”
Julien Gilon, qui a succédé à Pierre Labalue, justifie lui aussi l’opération de désolidarisation par la conviction, chez lui aussi, que “LetsGoCity n’a pas la légitimité nécessaire pour assurer la dynamique de cet outil, pour détenir quelque chose dont la teneur appartient en fait à la Wallonie”. A cela s’ajoute que, pour LetsGoCity, Wallonie en Poche fut en quelque sorte un produit-fanion, un produit d’appel pour le développement et l’offre de services intéressant les communes et autres collectivités, services et solutions que ces dernières seraient amenées à payer – contrairement à Wallonie en Poche qui se destine, au final, au citoyen qui, lui, n’apporte pas le moindre revenu à la société.
Mise sur orbite
Trois ans plus tard, avec le soutien des instances gouvernementales wallonnes concernées, l’“exit” de Wallonie en Poche de la structure LetsGoCity est entérinée. Sans toutefois que LetsGoCity coupe totalement les ponts avec son “bébé” puisque la société continuera de garantir son hébergement et les nécessaires interventions techniques et fonctionnelles (maintenance et évolution, intégration des micro-services).
“Nous mettons la plate-forme à disposition de FuturoCité, comme nous le faisons pour l’ensemble de nos clients. FuturoCité, à ce titre, sera un client comme un autre. Le contrat passé prévoit un certain nombre de jours d’interventions, estimés sur base de notre expérience passée et en fonction du nombre d’utilisateurs quotidiens potentiels. Nous procurerons également des conseils, en termes de fonctionnalités, d’animation de l’offre de micro-services. Et nous nous réservons bien entendu le droit de répondre à des appels d’offres pour la création de micros-services, à prix coûtant”, déclare Julien Gilon.
Pour ce qui est de la stratégie, de la gouvernance, de la dynamique de création de micro-services, ce sera donc par contre désormais FuturoCité qui sera à la barre. A noter toutefois que LetsGoCity a largement accompagné FuturoCité dans la phase préparatoire et le passage de flambeau, participant à la redéfinition de la charte graphique ou apportant sa propre perception du repositionnement stratégique.
Multiplier les micro-services
FuturoCité a donc désormais pour tâche de “mettre en oeuvre un environnement favorable au développement de nouveaux micro-services pouvant s’appuyer sur les jeux de données en formats standardisés mis à disposition.”
La perspective, la démarche est donc inversée.
Là où Wallonie en Poche, au départ, a proposé un panachage, personnalisable, de micro-services en ne pouvant compter que sur les jeux de données existant au niveau des pouvoirs locaux (et de quelques autres fournisseurs de contenus), la démarche de FuturoCité sera de promouvoir et d’encourager la multiplication de jeux de données, basculés en open data, directement exploitables. Et, sur base de ces jeux de données, d’imaginer et de proposer de nouveaux micro-services qui viendront peupler la plate-forme applicative.
Parmi les premiers micro-services à voir le jour, l’identification des points et actions de collecte de sang à travers le territoire wallon (voir ci-dessous), une solution orientée mobilité douce (trajets et lieux de stationnement pour vélos), une appli de centralisation des balades dont l’organisation ou la supervision dépendent des communes ou de l’Office Wallon du Tourisme…
La finalité – et condition d’existence – d’un micro-service sera d’être intéressant pour un territoire le plus large possible (dans les limites du territoire wallon).
Nicolas Installé (FuturoCité): “Pour qu’un micro-service puisse être lancé, il faut que l’on puisse s’appuyer sur suffisamment de données existantes, concernant donc plus qu’une petite poignée de communes, sinon cela n’en vaudrait pas la peine à l’échelle de la Région”.
Plusieurs types (ou sources) de micro-services sont prévus:
– des micro-services développés sur base de jeux de données ou de services pré-existants, avec, bien entendu, accord ou convention préalable avec leurs auteurs ou éditeurs (associations ou acteurs privés) ; un exemple: le service Carbu.com, pour le signalement des tarifs des stations-service par zone géographique
– des micro-services basés sur des sources de données cartographiques à développer ; exemples potentiels cités: la géolocalisation des défibrillateurs, ou celle de lieux, sites et bâtiments “PMR-friendly” (aisément accessibles aux personnes à mobilité réduite)
– des micro-services entièrement nouveaux pour le développement desquels le nouveau “titulaire” de Wallonie en Poche bénéficierait d’un budget alloué par la Région, via l’AdN et son axe Smart Région (budget devant sans doute être renégocié d’année en année).
Pour cette dernière catégorie, les thématiques sélectionnées devront répondre à une série de critères. Hormis le coût de développement et la pertinence objective pour le citoyen, “il faut que l’on puisse s’appuyer sur suffisamment de données existantes, qui concernent donc plus qu’une petite poignée de communes, sinon cela n’en vaudrait pas la peine à l’échelle de la Région”, déclare Nicolas Installé, directeur de FuturoCité.
Le centre d’expertise, lui-même, ne sera pas à la manoeuvre pour les développements proprement dit. En raison de son statut de partenariat public-privé, FuturoCité procèdera par cahier de charge et marchés publics.
Les tout premiers micro-services identifiés comme devant faire partie du lot d’amorçage ont été sélectionnés suite à une réflexion engagée par FuturoCité avec, essentiellement, des smart city managers (notamment ceux des intercommunales de développement économique).
A l’avenir, l’opération de collecte d’idées sera élargie en mode “crowdsourcing”. C’est ainsi que FuturoCité organisera des “défis données” à l’adresse des citoyens (voir plus de détails ci-dessous). Objectif: les encourager à collecter eux-mêmes, à leur niveau, et à fournir des données territoriales. Et, pour les encourager à participer à l’exercice, des récompenses seront accordées aux plus prolifiques et/ou inventifs.
Parallèlement, LetsGoCity proposera une “boîte à idées” (plate-forme en-ligne) où “tout développeur indépendant pourra concevoir et héberger un micro-service, à condition de respecter la ligne éditoriale et les formats standardisés définis”, déclare Julien Gilon, directeur de LetsGoCity.
A vos données. Prêts? Ouvrez…
Reste à convaincre les pouvoirs locaux (ruraux, municipaux), provinciaux voire régionaux de donner un sérieux coup de reins pour adopter et pratiquer les préceptes de l’open data et de la mise à disposition des données qui sont en leur possession ou dont ils ont la charge.
Pour ce faire, FuturoCité vient de lancer un grand “appel à données” qui concerne plusieurs acteurs. A commencer par les administrations communales, les villes, les pouvoirs locaux. “Ils sont invités à contribuer à l’initiative de Wallonie en Poche en partageant leurs données (principalement territoriales) avec FuturoCité. Cela nous permettra d’étoffer le catalogue de services d’une part, tout en visant à convaincre ces administrations de l’importance d’ouvrir leurs données”, explique Tiffany Andry, gestionnaire de projets numériques chez FuturoCité.
Deux autres catégories d’acteurs sont également sollicités. D’une part, “tout partenaire public ou privé (association, entreprise, etc.) qui serait susceptible de détenir des données d’intérêt public et qui, convaincu de l’initiative, serait d’accord de les partager avec FuturoCité pour créer de nouveaux services.
Par exemple, la Croix Rouge et d’autres centres de transfusion nous ont communiqué un ensemble de données permettant de créer un service « Don de Sang”. Le citoyen peut ainsi être averti lorsqu’il y a un don de sang près de chez lui.
Ces partenaires peuvent partager avec nous les services qu’ils ont déjà mis en place afin de les intégrer dans Wallonie en Poche. Dans ce cas, ce sont des services externes directement intégrés dans la web app, comme par exemple FixMyStreet…”
D’autre part, les citoyens eux-mêmes. Pour cette cible, FuturoCité a imaginé un service sous forme de jeu accessible dans Wallonie en Poche. Nom de baptême: “Databusters”.
“Le principe est simple: les utilisateurs se glissent dans la peau de “chasseurs de données” et peuvent ainsi participer à un ou plusieurs “challenges” en collectant ou “capturant” des données territoriales. Par exemple, dans le cadre d’un défi portant sur les toilettes publiques, les “data busters” sont invités à les géolocaliser, à poster une photo et à enregistrer quelques informations concernant les toilettes publiques qu’ils croisent.
A l’issue du défi, le grand gagnant, qui a “capturé” le plus grand nombre de données pendant le temps imparti, emporte une récompense définie par l’organisateur du défi…”
Tiffany Andry (FuturoCité): “FuturoCité est le principal organisateur des défis mais invite toute administration publique ou tout partenaire qui le désire à proposer des challenges stimulants pour les chasseurs de données”.
Le jeu-service Databusters sera disponible dès cet automne. Deux projets-pilotes sont prévus à cet effet: d’une part, la commune de Gerpinnes proposera un défi à ses habitants; de l’autre, FuturoCité proposera trois défis à l’occasion de la Semaine Numérique qui se déroulera du 10 au 21 octobre 2022.
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