A l’occasion de la présente rentrée scolaire et académique 2022-2023, la plate-forme d’évaluation et d’acquisition de compétences numériques PIX commencera à être déployée et utilisée par les établissements d’enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, tous niveaux confondus. Du moins, ce déploiement sera-t-il progressif, avec des démarrages qui interviendront, pour certains, plus tard que pour d’autres.
Pour l’enseignement obligatoire, par exemple, le message est encore de dire qu’“Il est prématuré de communiquer sur le projet à l’heure actuelle. Une communication officielle à destination des membres du personnel de l’enseignement est prévue dans le courant du premier trimestre [Ndlr : premier trimestre de l’année scolaire].”
Par contre, le secteur de l’enseignement supérieur, universitaire et de promotion sociale se lance dès ce mois de septembre.
Suite à la première vague de communications émanant de l’administration communautaire francophone, 24 établissements d’enseignement supérieur (hautes écoles et universités) et 92 établissements de promotion sociale ont franchi une première étape pour l’adoption de PIX et l’organisation, à terme, de “parcours” d’apprentissage et/ou de vérification de ces compétences.
Début août, tous les établissements avaient reçu une information et une invitation à utiliser PIX Orga, la plate-forme de suivi pédagogique conçue plus spécifiquement pour les enseignants. Les quelque 116 établissements qui ont donc répondu favorablement (chiffre établi au tout début septembre) ont dès lors reçu un code d’accès qui leur permet, sur la plate-forme PIX, d’organiser des “campagnes de tests”, autrement dit des parcours d’évaluation et d’acquisition de compétences numériques pour leurs étudiants. L’entraînement et l’acquisition de compétences peuvent ainsi devenir davantage individuels et progressifs selon le niveau et les difficultés de chacun.
Dans un premier temps, les “parcours” disponibles sur la plate-forme seront pré-ficelés, imaginés, conçus et mis à disposition par les équipes de l’administration. Parmi les tout premiers exemples: un “panorama de rentrée” qui permettra à chaque étudiant qui s’y lance de faire le diagnostic de ses compétences numériques. De quoi permettre aux professeurs de déterminer quelles sont celles qui sont déjà maîtrisées, individuellement, et de proposer des remédiations plus pertinentes.
Les parcours sont déclinables quasi à l’infini. Autre exemple, relativement basique: un “parcours bureautique” pour évaluer et acquérir des compétences en maîtrise des logiciels bureautiques classiques (tableur, traitement de texte, présentations…).
“A terme”, indique Anne Dufour, chargée de mission au Centre de Ressources Pédagogiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles. “le but est de travailler avec les établissements en mode co-construction, afin de créer des parcours plus spécifiques, répondant aux spécificités des formations qu’ils proposent.”
Phase de découverte
Si la communication a été faite en top down et si les premiers établissements intéressés ont reçu un code d’accès, cela ne veut pas forcément dire qu’ils vont s’en servir dès à présent et commencer à proposer PIX à leurs propres utilisateurs – qu’il s’agisse d’étudiants ou d’enseignants.
Selon le bon vouloir de chacun
Pour l’heure, l’adoption de PIX se fait encore sur base volontaire. Evoluera-t-on, pour certains niveaux d’enseignement, vers une obligation, comme c’est déjà le cas en France, terre natale de PIX, où l’enseignement obligatoire est contraint d’en faire un outil? Trop tôt encore pour le dire. Le cabinet de la Ministre Valérie Glatigny, sollicité à ce sujet, ne s’est pas encore prononcé et, sur le terrain, les établissements estiment généralement que cela doit rester leur prérogative d’imaginer de rendre l’utilisation de PIX, PIX Org et/ou PIX Certif obligatoire ou non. Affaire à suivre…
“Beaucoup d’établissements sont encore en phase de découverte, voire de test de l’outil”, précise Anne Dufour. “Il n’est dès lors pas encore possible de déterminer comment ils vont se l’approprier.”
Les modalités pourraient d’ailleurs être relativement différentes, chaque établissement ayant toute liberté en la matière.
Sur le terrain, les responsables pédagogiques se montrent encore prudents. Exemple la position adoptée par l’UMons.
Aux yeux de Bruno De Lièvre, professeur à la faculté de psychologie et des Sciences de l’Education et conseiller du recteur en matière de stratégies numériques pour l’enseignement, la plate-forme PIX telle qu’elle existe actuellement a deux inconvénients (ou risques d’inconvénients) majeurs.
D’une part, “son contenu reste très franco-français”. D’autre part, bien que pensé et présentant l’avantage d’opérer selon le principe d’une mise en situation (“défis”, exercices, tâches à réaliser), les processus d’évaluation de compétences proposés “ne visent pas des compétences numériques spécifiques à l’enseignement [supérieur]. Il s’agit de compétences que tout citoyen doit acquérir. Notre point de vue est qu’il faut réfléchir à aller plus loin, les compétences nécessaires ou utiles aux étudiants et enseignants étant différentes de celles, plus générales, que doit maîtriser un citoyen lambda…”.
Bruno De Lièvre (UMons): “PIX permet d’évaluer des compétences numériques génériques, qui ne sont pas propres à l’enseignement. Qu’est-ce par exemple que maîtriser des outils de communication numérique pour un professeur?”
Il pousse le raisonnement – et la critique – un cran plus loin: “Pour l’instant, nous sommes dans le flou. Nous ne disposons pas d’un référentiel de compétences numériques dédié aux enseignants. Le Plan de Relance incite chaque établissement à déterminer ce qu’il estime être les compétences numériques nécessaires à chaque enseignant. Mais aucun référentiel écrit n’existe. Et il est regrettable que l’opération de définition ne soit pas collective. Nous regrettons le manque de concertation entre les autorités – la Fédération, le cabinet de la Ministre, l’ARES – et les établissements d’enseignement…”
Pour ce qui est de PIX Orga, l’évaluation de son intérêt et des avantages potentiels qu’il peut apporter est en cours au niveau de l’UMons. “Sur base des tests qui seront réalisés, nous définirons une stratégie.”
L’espoir est de disposer, “d’ici un an”, d’un référentiel de compétences exploitable pour les enseignants, visant deux types de profils: les enseignants qui se lancent dans la carrière et ceux qui l’exercent déjà…
Sans la base d’un tel référentiel dédié, pas d’évaluation pertinente possible. Et pas de catalogue et de contenus de formations auxdites compétences pour enseignants. “En l’absence d’un référentiel, les enseignants ne peuvent être formés à ce à quoi les élèves doivent être formés”, regrette Bruno De Lièvre.
Vers une certification PIX?
Une nouvelle étape devrait être franchie courant 2023 lorsque les établissements pourront proposer une certification PIX. “Nous avons commencé à communiquer au sujet de l’outil PIX Certif”, indique Anne Dufour. “18 établissements d’enseignement supérieur et 39 de promotion sociale se sont dits intéressés mais le début de l’utilisation se fera plus tard…”
L’objectif est de “permettre à tout étudiant ayant au minimum atteint le niveau 1 [sur l’échelle d’évaluation de compétences PIX, qui se calque sur le modèle européen DigComp] dans cinq compétences numériques de demander la certification de ses compétences.”
Cette séance de certification, dans le monde de l’enseignement, se fera… en présentiel, avec supervision et contrôle (pour éviter la triche) par des professeurs ou surveillants, dans l’établissement fréquenté par l’étudiant.
Quelle “valeur”, crédibilité, aura ce “certificat PIX”? Toute certification de compétences s’accompagnant de l’octroi d’un code que le candidat peut intégrer à son CV ou transmettre au recruteur grâce auquel ce dernier pourra accéder aux résultats obtenus, le certificat PIX pourrait servir de preuve objective, crédible. Mais il n’aura réellement de “valeur” qu’aux yeux de l’employeur qui lui en accorde une…
“La certification PIX commence à être reconnue comme telle en France”, commente Anne Dufour. “Etant devenue obligatoire dans l’enseignement de plein exercice, cette reconnaissance devrait encore gagner du terrain à l’avenir…”
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