La semaine dernière, l’asbl WalDigiFarm, association créée afin de “valoriser et favoriser l’usage du numérique dans le secteur agricole wallon”, tenait son premier séminaire de formation/information à destination d’agriculteurs et d’acteurs impliqués dans l’offre de solutions numériques pour le secteur agricole. Relire l’article que nous avions récemment consacré à la présentation de cette association.
Une bonne centaine de personnes, dont une majorité d’agriculteurs, s’étaient inscrites pour une session d’informations dédiée spécifiquement aux techniques et solutions de modulation intra-parcellaire des intrants en grandes surfaces – en clair: la gestion des semis et épandages de produits phytosanitaires via recours à des solutions d’analyse des sols, de géolocalisation, de guidage précis des équipements et d’optimisation des dosages. Parmi les solutions mises en oeuvre: GPS, solutions de géoguidage, calcul d’optimisation des tracés, stations météo connectées, équipements robotisés de semis et d’épandage.
Un sujet très spécifique qui sera l’une des marques de fabrique des formations et sessions d’informations que l’asbl compte organiser, plusieurs fois par an, à destination des professionnels du secteur – agriculteurs, entrepreneurs agricoles, agronomes, chercheurs, fabricants de matériels et concepteurs de solutions agricoles…
Rappel des grands axes d’activités de l’asbl WalDigiFarm
– fédérer les acteurs du secteur
– procurer des formations et favoriser un partage d’expériences
– servir de “laboratoire d’idées” pour la transition numérique du secteur agricole
– être source de nouveaux outils et solutions numériques
– imaginer une plate-forme de gestion et de mise à disposition de mécanismes d’échanges et d’exploitation de données agricoles
Le conseil d’administration de l’asbl est composé à 50% d’agriculteurs. Sa présidence est par exemple assurée par Stéphan Henry (ferme de Mehaignoul, en province de Namur) et sa trésorière est elle aussi agricultrice (Caroline Devillers, ferme du Plein Air en Hesbaye, et par ailleurs “Digital Wallonia Champion”).
La vice-présidence, quant à elle, revient à Renato Primavera (Quadratic, OptAgri) tandis que l’administrateur délégué est Sébastien Weykmans, chef de projet chez Biocidal Alternative Solutions, spécialisée dans le conseil technique et réglementaire dans le secteur des biocides.
“Nous proposerons des formations sur des questions concrètes, pour procurer aux participants des informations directement applicables dans le quotidien”, souligne Sébastien Weykmans, administrateur délégué de WalDigiFarm. “Vu la cible, les contraintes de temps auxquelles les acteurs agricoles sont confrontés et leurs attentes, c’est la seule manière de les motiver à participer.”
Parmi les prochains thèmes abordés lors des séances ultérieurs (janvier et juin 2020): la robotique agricole.
Viser les sujets qui fâchent
Le choix d’un thème spécifique, voire hyper-pointu, a aussi un autre but: démontrer concrètement l’utilité et la rentabilité de solutions numériques, tout en expliquant aux participants la manière de les mettre en oeuvre, les problèmes auxquels ils seront éventuellement confrontés (telles que les difficultés d’intégration entre solutions IT et équipements venant de divers fournisseurs).
“Nous voulons ainsi pallier à un manque d’informations des agriculteurs, notamment”, insiste Stéphan Henry, agriculteur et président de l’asbl WalDigiFarm. “Ce déficit est dû, d’une part, à un manque de temps de la part des premiers intéressés mais aussi à un manque de formations provenant des vendeurs qui, eux-mêmes, ne sont pas forcément bien informés.”
Destinées à la fois aux agriculteurs et aux acteurs du secteur (éditeurs de logiciels, équipementiers, prestataires de services…), ces séances d’information ont également pour but de faire se rencontrer ces deux univers et de lutter contre le “décalage qui s’est installé entre concepteurs et utilisateurs”, témoigne encore Stéphan Henry. Et d’énumérer les défis auxquels les agriculteurs sont confrontés: “un retour sur investissement difficile à évaluer, des incertitudes et craintes sur la propriété des données et la manière dont elles seront utilisées par les différents fournisseurs et prestataires, un manque de temps, une intuitivité insuffisante, le manque d’interopérabilité entre systèmes et solutions…”
Pour illustrer ce souci majeur de non-interopérabilité, il prend un exemple concret: “un tracteur, un semoir, un GPS qui proviennent de trois fournisseurs, de trois marques différentes, ne fonctionnent pas ensemble. Et chaque fournisseur rejette la responsabilité sur l’autre.”
Sébastien Weykmans (WalDigiFarm): “En matière de solutions numériques, le secteur en est encore au stade qui était le sien à l’entre-deux-guerres lorsque l’on a enfin établi les premières mesures permettant la connexion mécanique des machines et tracteurs de marques différentes…”
“Pour obtenir une information réellement pertinente, un agriculteur doit procéder à des dizaines d’encodage des mêmes données, sur différents portails. Aucun ne le fera jamais…
Notre espoir, via les actions de l’asbl WalDigiFarm, est d’améliorer l’opérabilité, pour des gains de temps et d’argent pour les agriculteurs.”
20 ans de retard
Le secteur en est encore aux tout débuts d’un processus d’harmonisation ou, à tout le moins, d’interopérabilisation des différents formats de données, protocoles et autres interfaces.
Sébastien Weykmans souligne par exemple que les interfaces propriétaires interdisent encore trop souvent à un agriculteur de voir, sur un même portail, le positionnement de tous ses tracteurs s’ils viennent de plusieurs constructeurs. “En matière de solutions numériques, le secteur en est encore au stade qui était le sien à l’entre-deux-guerres lorsque l’on a enfin établi les premières mesures permettant da connexion mécanique des machines et tracteurs de marques différentes… Le secteur agricole et des productions végétales a un retard de 20 à 25 ans en termes d’échanges de données par rapport à ce qui se fait déjà dans le secteur de l’élevage.”
Alors que l’asbl annonce actuellement “près de 40 membres”, son ambition est d’en compter au minimum 190 d’ici 2022 – en majorité des agriculteurs (l’asbl se fixe le cap de 160 membres “de terrain” à cette date), le reste devant venir de sociétés et acteurs, à consonance numérique, liés au secteur.
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