En début d’année, la Wallonie lançait un appel à projets sur le thème du “Territoire intelligent” dans le but d’“encourager les villes et communes wallonnes à développer des projets numériques innovants, que ce soit en matière d’énergie, d’environnement, de mobilité et logistique, de gouvernance, de participation citoyenne…”
Les projets devaient au minimum comporter une composante numérique et/ou technologique (Internet des Objets, Intelligence Artificielle, analyse de données…). Parmi les conditions à remplir pour être retenu se trouvaient également quelques dispositions spécifiques dont une qui a fait polémique. Voir ci-dessous.
Budget réservé en duo par les ministres Pierre-Yves Jeholet (économie et numérique) et Valérie De Bue (pouvoirs locaux): 4 millions.
43 projets retenus
88 dossiers ont été déposés avant la date-butoir du 31 mars. 43 projets ont finalement été retenus, obtenant une aide financière de la Région (50% du budget total de chaque budget) allant de 20.000 à 275.000 euros. Nous aurons l’occasion de revenir prochainement sur certains de ces projets.
En voici toutefois déjà quelques éléments.
La répartition entre les projets obtenant plus de 100.000 euros ou moins est la suivante: 17 au-delà des 1000.000 euros ; 26 en-deçà.
Deux projets ont décroché le montant le plus élevé de 275.000 euros, à savoir “Mind your Territory”, porté par l’intercommunale liégeoise SPI (projet de supervision de services communaux et d’aide à la décision basé sur l’exploitation d’open data – commerces, tourisme…) et “ShutLLN”, d’Ottignies-Louvain-la-Neuve (projet qui prévoit la mise en service d’une navette autonome, opérant à la demande, entre la gare et les pôles d’activités de la commune – à savoir le parc scientifique et le parc d’entreprises).
Quels genres de projets ont été retenus? Plusieurs touchent à la mobilité douce, au déploiement de solutions ayant un impact positif sur l’environnement. D’autres portent sur la gestion et la gouvernance des données et des décisions par les autorités locales. D’autres encore se proposent de promouvoir la participation ou l’implication citoyenne ou, en tout cas, de favoriser une meilleure information.
Côté technologies mises en oeuvre, on relève des projets basés sur l’Internet des Objets (avec déploiement de différents types de capteurs), sur l’Intelligence Artificielle (par exemple, de l’identification de contenus de photos pour prise de décision en matière de traitement des déchets), sur des assistants personnels et/ou chatbots (pour mieux guider ou conseiller le citoyen), sur la réalité augmentée (entre autres pour promouvoir une mobilité plus “intelligente” ou un tourisme personnalisé).
Comme signalé, nous reviendrons plus en détails, dans les semaines qui suivent, sur certains de ces projets présentant une particularité ou une originalité technologique spécifique.
Une sélection qui a suscité une petite polémique
Pour être recevable, une candidature de commune ou d’intercommunale de développement économique devait répondre à un certain nombre de critères. Certains paraissant logiques, d’autres ayant de petites allures de main-forcée.
Parmi les critères posés, on retrouve du très classique, du genre “caractère innovant, utilisation de technologies numériques innovantes, potentiel d’amélioration de la qualité de vie citoyenne”. Mais aussi du plus spécifique. Exemples? La commune (ou les différents “co-demandeurs”) devai(en)t avoir signé la Charte Smart Region “ou s’engager à en respecter les principes”. Par ailleurs, le projet devait obligatoirement s’inscrire dans le cadre d’une “stratégie communale – Programme Stratégique Transversal – ou intercommunale”. De quoi lui donner des perspectives de pérennité et un cadre pertinent.
Mais il y avait donc aussi dans la liste un critère qui a fait débat, voire qui a porté à caution, poussant même certains responsables locaux à envisager de porter la chose devant la justice… De quoi s’agissait-il? De ceci: “Le demandeur principal et les co-demandeurs s’engagent à renoncer, à partir de l’exercice budgétaire 2020, à lever toute taxe directe ou indirecte sur les mâts, pylônes ou antennes affectées à la réalisation, directement avec le public, d’une opération mobile de télécommunication par l’opérateur d’un réseau public de télécommunications locales”.
Mais que vient faire cette obligation dans ce type d’appel à projets? L’intention était claire et s’inscrivait visiblement dans le droit fil de la volonté affichée par l’équipe gouvernementale qui a pris le train de la législature en marche, à l’été 2017.
Dans le cadre d’une politique d’équipement du territoire en (très) haut débit et de la lutte contre les “zones grises et blanches”, la volonté était en effet d’amener les communes qui appliquent encore des taxes locales sur les pylônes et antennes GSM à les supprimer – tout comme la taxe régionale avait été annulée (déjà sous l’ancienne majorité).
Les ministres concernés – Pierre-Yves Jeholet et Valérie De Bue – avaient clairement indiqué qu’ils mettraient tout en oeuvre pour “encourager” les communes ou provinces à supprimer toute taxe de ce genre.
On le savait.
Mais entre “encourager”, “convaincre” et quasiment forcer la main par une contrainte telle celle glissée dans les conditions à remplir dans le cadre d’un appel à projets qui dépasse largement la thématique de la connectivité, il y a là comme un franchissement de limite qui pose objectivement question…
Un an pour “délivrer”
Certains des projets retenus ont été imaginés et préparés en s’appuyant sur une solution ou sur l’expertise de sociétés d’ores et déjà identifiées – et citées nommément dans le dossier de candidature.
D’autres doivent encore sélectionner le ou les partenaires pour la réalisation (technologique, notamment). Leurs porteurs devront donc encore en passer par un appel d’offres, à lancer dans les quatre mois qui suivent.
Mais tous ont l’obligation de faire appel à “au moins une PME” (ou start-up) locale. C’est ainsi que SmartNodes et l’équipe de Wallonie en Poche sont parties prenantes à un projet liégeois (à Bassenge) pour le déploiement d’une “smart zone” surveillée et pilotée par divers types de capteurs connectés (lumière, niveau d’eau, présence). On retrouve également Wallonie en Poche, en duo cette fois avec la start-up WilWay, du côté de Floreffe pour un projet d’“intelligence collective” visant à assurer la promotion de projets auprès et avec les citoyens. Encore un exemple: Apptree et Spidam sont les deux partenaires identifiés pour le projet de Boussu pour l’offre d’une solution “Boussu en poche” (information sur les décisions communales, e-guichet, espace d’avis, réservation de covoiturage…).
Le calendrier attendu pour la concrétisation (déploiement réel) des projets sélectionnés est d’un an maximum. Le but étant triple:
– prouver l’efficacité de ce type d’appel à projets dans le contexte de la stratégie Smart Region de Digital Wallonia
– répercuter et faire adopter les solutions mises en oeuvre par d’autres villes, communes et/ou intercommunales de développement économique (parmi les conditions à respecter figure notamment l’obligation de documenter certains “éléments réplicables tels que les API” ou encore celle de garantir l’“ouverture de la donnée générée”)
– et, en troisième lieu, justifier le lancement d’un futur appel à projets de même nature – à supposer que le futur gouvernement pérennise le concept.
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