Fin 2017, FuturoCité avait dédié une partie importante de sa conférence “smart city” annuelle à l’interaction avec le citoyen et aux différents outils qui le permettent (plates-formes, réseaux sociaux, chatbots…).
La ville d’Aubange, par exemple, avait été citée en raison de l’usage qu’elle fait de la plate-forme Fluicity. Mais quel est ou quelle doit être la place du numérique dans la participation citoyenne par rapport à des pratiques plus “conventionnelles”?
C’était là aussi l’un des sujets largement abordé lors de cette journée, ce qui avait débouché sur le constat suivant: la technologie n’est pas tout…
Extrait du compte-rendu de la conférence…
La définition de “smart city” que privilégie le Smart City Institute le dit : les technologies, numériques notamment, ne sont qu’un “facilitateur”, “pour atteindre les objectifs de durabilité – économique, sociale, environnementale”.
Impliquer et (re)donner la parole aux citoyens est avant tout une démarche, une “culture”. Les plates-formes et outils numériques sont des vecteurs intéressants, en raison de leur souplesse, immédiateté et variété, mais ils ne sont que des leviers qui doivent reposer sur une volonté participative et des relais bien concrets sur le terrain.
Le présentiel, une dimension à ne pas négliger
A Mons, par exemple, le projet Demain Mons (horizon : 2025) n’a pas fait l’impasse sur les réunions en présentiel dans les quartiers et les animations de groupes de discussion sur le terrain.
C’est également le principe que fait sien le Hub Créatif “Creative Valley”, au travers d’ateliers, de conférences, de séances de brainstorming et de co-création.
Son mot d’ordre ? “Partager l’expertise de tous – professionnels, indépendants, artistes, “makers”, enseignants, créatifs… – pour booster la dynamique locale.” Du foisonnement d’idées (divergence) peuvent ainsi naître des projets plébiscités et porteurs d’adhésion (convergence).
Autre exemple de ce genre de structure animée par des citoyens: CitizenClan, une association d’“innovateurs citoyens”, tous bénévoles. “Ils partagent une même ambition: redonner le pouvoir et la capacité aux citoyens de s’approprier, d’imaginer, de concevoir et d’expérimenter des innovations en adéquation avec les problématiques, les besoins et les attentes citoyennes du territoire”, expliquait Ali Benfattoum, président de l’association. L’asbl se veut ouverte à tous – citoyens mais aussi TPE, PME, grands groupes, collectivités, acteurs académiques…
Ali Benfattoum (CitizenClan): “reconnecter des mondes qui ne se parlent plus.”
Le but: remettre l’initiative et les outils entre les mains des citoyens – “ne pas leur vendre du poisson mais leur apprendre à pêcher” – et éviter que les projets soient conçus “hors sol” et aboutissent à des “solutions” qui ont coûté cher et ne sont pas utilisées…
“Cela diminue la frustration du citoyen face à des applis et services généralement pensés comme des usines à gaz qui ne rencontrent pas leurs besoins. Cela fédère les compétences de chacun, rationalise la dépense publique et évite au système économique local de faire des erreurs. Les expérimentations sont innovantes, participatives, frugales, libres et éphémères. Les services imaginés, eux, sont réellement utiles, efficients et pérennes.”
L’initiative vient du citoyen, sur une problématique qu’il a lui-même identifiée. Il s’implique dans la création d’une réponse concrète, sert de cobaye, s’implique avec d’autres au sein de “tiger teams”, prototype l’idée. Vient ensuite, une fois le périmètre clairement défini, la recherche de partenaires commerciaux pouvant l’implémenter voire même en faire bénéficier d’autres communautés.
Exemples de solutions imaginées au sein de CitizenClan ? Une borne interactive sans contact qui déclenche des vidéos explicatives sur du mobilier proposé à la vente, une cartographie des initiatives et projets citoyens, un capteur de présence qui surveille le taux d’occupation de locaux culturels ou sportifs, un chatbot qui renseigne sur les heures d’ouverture des services municipaux, les places en crèche, les bons plans “zéro déchet” et peut faire office d’interface de sondage…
L’ambition de CitizenClan est de pousser encore plus loin le principe de la co-construction citoyenne, jusqu’à faire naître des “citizen entrepreneurship studios”, où naissent de manière plus systématique – et encadrée – des initiatives citoyennes.
Pas de “techno-only”
Nicolas Himmer, Smart City Manager pour la Ville de Namur, estime lui aussi qu’une plate-forme de participation citoyenne ne se limite pas à une solution en-ligne. “Une participation citoyenne effective suppose la mise en œuvre de multiples outils, pas seulement virtuels. Cela inclut aussi d’autres dimensions, telles qu’un soutien aux comités de quartier, l’organisation de réunions citoyennes thématiques et, côté pouvoir local, une interrogation régulière sur ses grands projets.”
Ne pas perdre la dimension humaine de vue. pas plus que l’importance du contact “à l’ancienne”. Source: Urban Practices.
Chimay, pour sa part, est un bel exemple d’entité qui a su impliquer ses citoyens et les associations locales sans pour autant recourir à la technologie.
La commune réserve un budget pour un appel à projets soumis par les habitants et les associations. Leur sélection est faite par les citoyens et eux seuls. Les projets qui l’emportent sont réalisés par la commune. En contrepartie, les citoyens qui ont lancé et défendu les idées retenues s’engagent à en assurer la pérennité.
En l’espace de deux ans, 43 projets ont été financés via ce “budget participatif” et ont déjà été réalisés à plus de 90%.
La technologie n’est donc pas tout. Elle peut même être contreproductive si des bases saines et solides ne sont pas posées au préalable et certaines conditions remplies. Pascal Poty, expert à l’Agence du Numérique, soulignait par exemple l’importance d’obtenir le soutien actif des autorités décisionnaires pour tout projet de participation citoyenne. “Sinon, la technologie ne sera jamais qu’une pièce rapportée. Ajouter une couche numérique sur de vieux processus ne peut que conduire à l’échec. Il faut par ailleurs toujours penser “un coup plus loin” parce que les choix technologiques deviennent rapidement obsolètes.”
Texte extrait du rapport rédigé et publié par FuturoCité
à la suite de son événement
“Smart Gouvernance: comment
mieux interagir avec les citoyens”.
9 novembre 2017.
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