Mi-2016, la start-up carolo TafSquare (taf, comme… taf, boulot) se lançait avec pour objectif de devenir une plate-forme de gestion de boulots d’intérim, mettant en relation entreprises, de toutes tailles, et professionnels au statut d’indépendant (à titre principal ou complémentaire).
A ses débuts, la société avait deux spécificités: une orientation B2B et un panel de “tafs” dans six catégories sectorielles (web & technologies, économie, commerce, santé, immobilier, culture & divertissement). Relire le portrait que nous en avions fait à l’époque.
Pivot
Deux ans plus tard, le scénario a changé – induit par l’accueil reçu sur le marché. Au fil du temps, ce sont en effet les recherches pour “tafeurs” opérant dans le registre de la construction et des demandes émanant de particuliers (plutôt que d’entreprises) qui se sont avérées les plus nombreuses.
La société a donc décidé de reconcentrer ses activités vers ce domaine et les demandes émanant des particuliers. Sans pour autant se couper totalement d’une vision B2B qui demeure un axe potentiel d’activité et de développement, comme on le verra plus loin.
“Le secteur de la construction est clairement celui qui a réagi le plus positivement à notre positionnement”, explique Antoni Fasullo, co-fondateur de TafSquare. “Comme il est déjà, en soi, un secteur à haut potentiel, avec quelque 100.000 entreprises et professionnels en Belgique, nous avons décidé de le privilégier”.
Qu’en est-il devenu de l’ambition de “jouer les intermédiaires entre donneurs d’ordre – des entreprises, de toutes tailles et de tous secteurs – et professionnels au statut d’indépendant”?
“Au fil du temps, nous nous sommes rendu compte que des sociétés ont pour habitude de traiter avec de grosses structures. Par contre, les acteurs de petite et moyenne importance préfèrent travailler avec et pour des particuliers.
En mars 2018, nous avons dès lors ouvert la plate-forme Tafsquare aux particuliers. Ces derniers représentent désormais 85 à 90% des tafs. Pour des travaux de réparation, d’entretien, de rénovation, mais aussi des travaux plus conséquents.”
Ce qui n’a pas changé…
En changeant de cible et d’optique, TafSquare rentre en concurrence avec d’autres plates-formes du même genre, qui se sont multipliées à l’heure de l’économie “collaborative”.
TafSquare conserve toutefois l’une ou l’autre caractéristique dont elle veut faire des différenciateurs. A commencer par des tafs qui sont effectués par de vrais professionnels, pouvant faire état d’un numéro d’entreprise ou d’un numéro de TVA. Ensuite, en misant sur la “qualité” des projets postés, avec vérification largement humaine pour valider leur sérieux et, côté offre, pour valider les profils des tafeurs. “Nous filtrons les tafs qui nous parviennent. Un contact est systématiquement établi avec le créateur du taf pour bien définir le projet et garantir un véritable contact concret avec l’entreprise qui l’effectuera.”
Antoni Fasullo (TafSquare): “L’étape du devis n’est pas chose aisée pour les professionnels. Nous voulons leur faciliter cette étape, leur permettre de l’externaliser et de se concentrer sur ce qui est réellement leur métier, à savoir la réalisation technique.”
Méthode suivie pour “qualifier” les tafs? TafSquare a constitué une sorte de base de référence, répertoriant une centaine de processus par métier (menuisier, carreleur, sculpteur bois…). “Lorsqu’un client propose un taf, par exemple la pose d’un carrelage, nous affinons tout d’abord la teneur exact du projet en lui demandant de le préciser via une série de questions: quel est le délai de réalisation désiré? un devis a-t-il déjà été proposé? pourquoi n’a-t-il pas déjà choisi un prestataire? un devis d’assurance existe-t-il en cas de sinistre? quel est le métré exact?…
Ce faisant, TafSquare dit disposer de critères plus concrets à soumettre via son site aux professionnels potentiellement intéressés – “le taux de conversion est de 90%”, affirme Antoni Fasullo.
Une fois la description de taf affinée avec le client, TafSquare publie le taf, réceptionne les propositions des professionnels et termine son intervention en sélectionnant cinq professionnels qui pourront remettre offre au client. Pourquoi limiter à cinq offres?
“Généralement, nous constatons que nous obtenons une ou deux propositions par tafs. Comme il y a beaucoup de tafs postés, il est rare de recevoir cinq réponses. Mais le chiffre n’est pas forcément définitif. Nous continuons de réfléchir à la formule sur base des réactions reçues. Certains clients trouvent que c’est déjà trop. Et d’autres particuliers ne le désirent pas…”
Côté professionnels (prestataires potentiels), la vérification des profils et de la qualité repose sur deux éléments: d’une part, la vérification de non situation de faillite et un contrôle d’inscription à la BCE et auprès de l’Administration de la TVA et, de l’autre, l’évaluation (en étoiles) qu’effectuent les clients. Viendra bientôt s’y ajouter un contrôle pour vérifier que le professionnel est en ordre auprès des autorités fiscales et de l’ONSS.
A ce jour, la base de données de TafSquare comporte quelque 9.000 professionnels francophones (entreprises ou indépendants). “Nous en ajoutons entre 20 et 30 par jour”, affirme Antoni Fasullo. “Mais le potentiel est énorme: quelque 100.000 sur toute la Belgique.” D’ici “9 à 12 mois”, l’intention est d’ailleurs de s’attaquer au marché flamand.
Croissance endogène
Le modèle économique qu’a choisi TafSquare consiste à ne faire payer que les professionnels (tafeurs) pour ses services. La création d’un taf est gratuite pour le client, de même que l’inscription sur la plate-forme pour le professionnel et la consultation des tafs postés. Par contre, pour pouvoir remettre offre, le professionnel doit acheter des crédits (“taf coins”). En packs: 142 euros pour avoir accès à 15 tafs ; 450 euros pour 50 ; 1.275 euros pour 150.
Ce modèle économique n’est pas forcément celui qui subsistera à terme. La start-up continue en effet d’évaluer d’autres formules, telles qu’une rémunération à la commission ou un panachage abonnement+commission, mais reste pour l’instant fidèle au principe du “coût par lead”.
La manière dont TafSquare compte asseoir sa viabilité à long terme est, elle aussi, un scénario en devenir. Pour l’heure, le but est de “bootstrapper”, autrement dit de financer la croissance sans recours à des investisseurs externes. La start-up se contente du financement obtenu de Sambrinvest (rappelons qu’elle fut l’une des toute premières à intégrer le programme d’accélération hennuyer Digital Attraxion). “Nous voulons développer la société au maximum sur le marché wallon et bruxellois, afin de pouvoir réaliser une importante levée de fonds. Lorsque nous aurons démontré une importante courbe de croissance, nous passerons à un tour de table important pour nous attaquer au marché européen.”
Mais Antoni Fasullo ne rejette pas pour autant un autre scénario éventuel, au cas où l’attaque du marché flamand exigerait d’en passer par une levée de fonds intermédiaire, “histoire d’accélérer”.
Le B2B toujours sur le radar
TafSquare n’a pas tiré un trait sur la mise en relation entre entreprises et tafeurs et le B2B. “Nous continuons d’enregistrer des inscriptions d’architectes, de syndics, d’agences immobilières… Nous venons ainsi de décrocher un gros projet pour 9 maisons et 25 appartements.
Le secteur des agences immobilières est intéressant pour nous dans la mesure où environ 50% d’entre elles font effectuer des travaux au moment de l’achat d’un bien. Leur métier évolue et nous avons là une carte à jouer.”
Côté entreprises de construction, TafSquare espère les intéresser, non seulement pour leur servir de plate-forme afin de dénicher des sous-traitants mais aussi pour de la mise en relation sur des projets de rénovation, par exemple.
Par ailleurs, la start-up a récemment déménagé pour s’installer au Co.Station de Charleroi où elle côtoie certes d’autres jeunes pousses et des porteurs de projets dans le domaine du numérique mais aussi des “corp” qui sont l’une des cartes dont veulent jouer Co.Station, l’accélérateur Digital Attraxion et son “parrain” financier Sambrinvest pour favoriser le décollage des start-ups.
Le fait d’y avoir établi ses quartiers ouvre la perspective de contacts intéressants avec de grands acteurs du monde de la construction et de l’immobilier. Parmi les noms qui viennent spontanément à l’esprit d’Antoni Fasullo, on trouve des enseignes connues telles que Thomas & Piron (qui utilise d’ailleurs déjà, ponctuellement, la plate-forme TafSquare pour trouver des sous-traitants), HS Construct, De Cock, Cobardi ou Besix – tous acteurs que les initiateurs du Co.station carolo pourraient mettre en relation.
Le fait d’avoir élu domicile au Co.station permet aussi de côtoyer d’autres grandes entreprises, opérant dans d’autres secteurs – Alstom, par exemple, y a délégué une équipe. “L’environnement Co.Station est propice à une belle dynamique entre start-ups mais aussi pour du partage de bons plans et du feedback venant des entreprises qui y sont installées ou qui y viennent. L’un des buts est bel et bien l’établissement de relations avec les grandes entreprises.”
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