Inoopa: si tu ne viens pas à Lagardère…

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Par · 02/03/2017

L’été dernier, Inoopa se lançait sur le marché, se présentant comme un “outil de premier diagnostic” destiné à permettre à tout commerçant de décider de l’opportunité de se lancer ou non (d’où le nom “in ou pas”?) dans l’e-commerce ou, à tout le moins, dans des activités de présence et de visibilité en-ligne, et de lieu donner une série de conseils sur la manière de le faire.

La méthode imaginée? Tout simplement un questionnaire en-ligne avec des algorithmes qui malaxent les réponses afin d’évaluer les paramètres de la société et de comparer sa situation et ses perspectives avec les indicateurs-clé du secteur concerné.

Au bout de l’exercice, une évaluation et quelques conseils sur la manière de procéder ou d’aborder les choses: feu vert pour la création d’une e-shop ou, plus modestement, orientation par exemple vers du simplement référencement sur réseau social (afin d’obtenir une meilleure visibilité pour la boutique “en briques”, le lancement de campagnes de fidélisation par e-mail ou celui d’une carte de fidélité virtuelle.

Le service était sensé être démocratique: 100 euros pour ce diagnostic en-ligne. Pas trop cher afin d’attirer un maximum de commerçants.

Moins d’un an après son lancement, la start-up fait le constat que le modèle n’est pas financièrement porteur, par manque d’engouement du côté de la cible.

Inoopa a donc décidé e changer son fusil d’épaule et de miser sur d’autres chevaux – sans pour autant faire une croix sur cette offre de service générique.

Explications.

Simple détour ou changement de cap?

L’idée fondamentale de juger de l’opportunité et des perspectives d’une présence en-ligne (transactionnelle ou non) garde toute sa valeur, estime Inoopa, et intéresse nombre d’acteurs qui participent à la chaîne commerciale. Dès le départ, la start-up avait d’ailleurs proposé des analyses d’opportunité plus fouillées ou personnalisées (positionnement par rapport à la concurrence, analyse SWOT, conseils stratégiques…).

Ces analyses et ces prestations de conseils – plus rémunérateurs – seront donc l’un des nouveaux axes de développement. Inoopa a ainsi démarché des banques, des prestataires de paiement (Ingenico et consorts), des sociétés d’audit (“telles que Deloitte”) ou encore des acteurs publics (fédéraux ou régionaux) “qui pourraient utiliser Inoopa comme filtre et outil de diagnostic pour mieux gérer l’allocation d’aides publiques et vérifier que l’argent est octroyé à des sociétés qui ont un réel potentiel.”

Du côté des banques, l’idée est par exemple de leur “fournir des informations-clé qui leur permettent proposer des solutions adaptées à leurs prospects et/ou clients. Il y a un double avantage : en termes de temps pour la banque, afin de collecter des informations utiles et, pour les entreprises visées, en recevant des offres adaptées à leurs besoins dans un souci de rentabilité.”

Des négociations ont aussi été engagées avec bPost. De manière apparemment plus exotique, un contact a été noué avec… Alibaba. L’initiative vient de ce dernier qui se dit intéressé par l’approche et la solution d’Inoopa.

Voilà qui semble très éloigné du but premier – donner un coup de pouce aux commerçants locaux pour qu’ils se lancent sur la Toile. Et cela peut d’ailleurs paraître antagoniste et potentiellement contre-productif puisque ce qui intéresse le géant chinois est de déterminer dans quelle mesure les outils de screening et d’évaluation d’Inoopa permettent de discerner les potentiels cachés ou ignorés des sociétés qui ne font pas encore affaire en-ligne. Faut-il y voir une volonté de “repérage” d’acteurs locaux qu’Alibaba pourrait recruter et embrigader pour venir enrichir et peupler sa propre plate-forme?

Inoopa devra faire le voyage en Chine et rencontrer cet interlocuteur inattendu pour en savoir davantage. La jeune start-up belge s’en ira avec, dans ses bagages, un rapport riche de quelque 1,1 million de références locales, non anonymisées – “pourquoi le seraient-elles puisqu’il s’agit d’open data”, indique Jean-Pol Boone, co-fondateur d’Inoopa -, agrégées et enrichies par l’algorithme maison. “Alibaba veut qu’on leur démontre l’efficacité de notre outil. Une efficacité qui s’applique à tout pays. Alibaba peut très bien être  en premier lieu intéressé par son marché natal…”

Du gagnant-gagnant (?)

Par ailleurs, Inoopa est allée voir du côté des détenteurs de grosses bases de données (du genre Graydon ou Roularta) si une alliance ne permettrait pas d’amplifier l’exercice d’évaluation pour commerçants. L’idée est simple: au lieu d’imposer à chaque commerçant de remplir un questionnaire en-ligne (“fastidieux”, estime Jean-Pol Boone, même si le questionnaire était réputé “simple et rapide”), il suffira désormais aux algorithmes de la start-up de s’attaquer à des données pré-mâchées venant de ces bases de données.

Jean-Pol Boone (Inoopa): “sortir un vrai baromètre e-business pour la Belgique toute entière et devenir le Woorank de l’e-commerce.”

Le commerçant, de son côté, n’aura plus qu’à décliner son numéro d’entreprise et l’évaluation se fera automatiquement.

Un accord a ainsi été passé avec le groupe Roularta (accord non exclusif): “A partir de juin, grâce à la collaboration de Trends Top / Roularta, nous serons capables de sortir un vrai baromètre e-business pour la Belgique entière, d’identifier les entreprises qui ont le plus de potentiel et de les aider à profiter du numérique de manière rentable.”

Ce “baromètre”, qui “se basera sur un listing complet et non plus sur des échantillons comme le font jusqu’ici les enquêtes orientées e-commerce belge”, pourrait être réalisé en collaboration avec l’UCM, avec qui des contacts ont également été pris. Et l’homologue flamand (Unizo) sera lui aussi approché.

Quel marché Inoopa a-t-il passé avec Roularta?

Contre un accès à ses données, l’éditeur a convaincu la jeune start-up de lui céder une partie de ses gains lors d’exercices de diagnostic. Et non seulement ceux qu’elle effectue pour les PME qui choisissent la formule de base à 100 euros mais aussi pour les clients qui font appel à la société pour des analyses plus fouillées et personnalisées et pour des conseils.

Inoopa a-t-elle ouvert la porte au loup ou au renard? Le poulailler est-il en danger? “Nous avons convenu de faire une évaluation d’ici quelques mois”. Si la convention est déséquilibrée, l’échelle sera retirée… “Notre but”, tient à souligner Jean-Pol Boone, “était de nous donner les moyens de poursuivre notre but premier sans devoir investir.”

Une fois les données Roularta (ou autres) accessibles pour remplissage automatique du canevas d’analyse, Inoopa veut en effet retourner vers les PME et commerçants locaux pour leur proposer son service de diagnostic et de guidance. Et relancer ses services-conseils à plus haute valeur ajoutée… “surtout en Wallonie”.

Ces services, pour l’instant, sont surtout demandés par des sociétés d’une certaine taille active dans la grande distribution ou connaissant des difficultés. “Elles ont besoin d’une aide à la décision pour poser un diagnostic d’opportunité et préciser leurs perspectives e-commerce.”

Ce genre de service est très demandé, selon Jean-Pol Boone: “nous devons refuser des missions, faute d’effectifs.” Raison pour laquelle, la société compte engager “de 7 à 10 personnes d’ici la fin 2017”, à la fois pour des profils techniques (IT, data scientists) et pour des profils de consultants.