Après avoir opéré près d’un an en mode stealth, à l’abri des radars, le projet Mozzeno, positionné sur le terrain des fin tech, livre ses secrets. La jeune pousse, créée fin 2015, se positionne comme une “plate-forme en-ligne qui permet à des investisseurs de participer indirectement au financement des prêts à la consommation de consommateurs belges”.
Après une phase bêta entamée fin décembre, la plate-forme est devenue réellement opérationnelle ce 30 janvier.
Le mécanisme mis en oeuvre est celui du prêt de particulier à particulier, sans passer par une banque ou un organisme financier traditionnel. La relation entre prêteur et emprunteur se fait davantage en direct mais sans que l’intermédiation ne disparaisse totalement puisque Mozzeno joue les relais (titrisation des prêts).
Les prêts visés peuvent servir par exemple à financer une rénovation ou un aménagement, l’achat d’un véhicule, un voyage ou un mariage, des études… “Des produits simples, de type prêts à tempérament. Pas de crédit rotatif [revolving credit] ou de regroupement de prêts…”, souligne Xavier Laoureux, l’un des co-fondateurs de Mozzeno (voir ci-dessous).
“Le plus automatisé possible”
La plate-forme Mozzeno a pour objectif de proposer un processus le plus optimisé possible. Et ce, à plusieurs niveaux.
Première étape, côté investisseurs (prêteurs): la constitution d’une cagnotte (mise de base: 1.000 euros) à partir de laquelle il pourra octroyer des prêts. A noter qu’à cet égard, Mozzeno a mis en place un mécanisme de répartition en catégories et types de prêts devant favoriser une meilleure répartition des risques.
Première étape, cette fois du côté emprunteurs: la demande de prêt se fait elle aussi en ligne. Fourniture d’informations, signature électronique de documents (via l’eID et la solution Connective), téléchargement de pièces justificatives… ces processus sont dématérialisés.
La vérification de ces documents justificatifs, elle, s’effectue encore – très logiquement – de manière manuelle. Idem en cas de vérification ou de correction d’informations erronées introduites par le demandeur.
La gestion des demandes s’appuie sur un dispositif de scoring et l’analyse par Atradius ICP, qui intervient comme assureur des crédits.
Pour l’instant, un emprunteur doit encore s’enregistrer en introduisant lui-même ses données personnelles. A terme (“d’ici quelques semaines”, selon Xavier Laoureux), une fonctionnalité basée sur des techniques biométriques sera activée. Elle permettra de s’identifier via webcam ou la caméra d’un smartphone et la prise de clichés recto/verso de la carte d’identité. A ce potentiel de reconnaissance de visage et de caractères s’ajoutera, bien entendu, en coulisses, une vérification d’identité (pour éviter toute fraude).
Le réapprovisionnement de la “cagnotte” du prêteur et l’octroi de prêts pourront bientôt, eux aussi, se faire automatiquement. Dès la semaine prochaine, une nouvelle fonction agira en lieu et place de l’investisseur (s’il le désire), en se basant bien entendu, non pas sur ses indications et ordres, mais sur son “profil” d’investisseur et ses préférences en termes de types de prêts, pré-encodés dans le système.
L’investisseur déterminera un montant maximal qu’il désire (ré-)investir chaque mois. Le système se chargera de le faire automatiquement, en panachant les prêts selon ses préférences.
Le prêteur aura bien entendu, à tout moment, la possibilité de modifier son profil, ses préférences. Tout comme il pourra clôturer sa cagnotte quand il le désire, en ce compris dès la première tranche de 1.000 euros.
Pas d’aventurisme
La confiance est un élément essentiel dans toute relation financière. Pour rassurer les deux parties (consommateurs et financeurs), Mozzeno a imaginé plusieurs mécanismes:
- une évaluation du profil des emprunteurs et de leur capacité de remboursement “qui s’appuie notamment sur les données de la Centrale des Crédits aux Particuliers et sur l’expérience de l’assureur crédit Atradius ICP”, ce dernier servant par ailleurs d’assureur-crédit (couverture assurée: “entre 60 et 100% du paiement de 3 échéances en retard et du solde restant dû du prêt”)
- le principe de diversification des investissements: ils se font par série de notes (titrisation Mozzeno). Ticket d’entrée minimum de 1.000 euros. Mise de base: 25 euros par prêt avec donc possibilité d’investir d’emblée dans 40 prêts différents. Un autre mécanisme de contrôle fait en sorte que “l’investisseur n’engage pas plus de 5% de son portefeuille dans une même série de notes.” Toujours dans un souci de répartition des risques.
Côté emprunteurs, Mozzeno affirme vouloir éviter les dérives du surendettement. “Nous nous voulons très stricts dans l’acceptation des demandes. Le prêt demandé doit être adapté aux besoins des emprunteurs qui doivent démontrer leur capacité de remboursement.”
Le concept d’“Argent Positif”: “des prêts qui respectent l’emprunteur, simples, sans revolving credit ou regroupement de crédits. Et une sélection soigneuse des emprunteurs. Le prêt demandé doit être adapté aux besoins des emprunteurs qui doivent démontrer leur capacité de remboursement.”
Rendement annoncé des prêts: maximum 3,91% net. Aucun rendement ne pouvant réellement être totalement garanti, la jeune société prend la précaution d’exposer, sur son site, clairement les risques inhérents à la fois à ce type de prêt et à son statut de jeune premier. A consulter via ce lien.
Classes de risques: de A à D.
Durées des emprunts: de 12 à 60 mois.
Un modèle business hybride
Mozzeno se rémunérera en percevant des frais d’entrée côté emprunteurs (“de 0,5 à 3,5% selon la durée du prêt”) et côté investisseurs (“maximum 1% de l’argent investi”).
Aux activités de la plate-forme Mozzeno s’ajoutent celles de l’entité Mozzeno Services qui est l’auteur des outils et solutions électroniques à la base de la plate-forme. Le but est de commercialiser ces modules ou fonctionnalités à “d’autres acteurs fin tech / assur tech ou de la sphère sharing economy”. Plusieurs options sont possibles: soit la réutilisation des modules existants, éventuellement adaptés, soit du co-développement à la demande.
Mozzeno Services “proposera donc des licences sur certains modules ou des bundles. Par exemple, pour la sollicitation des services de scoring”, indique Xavier Laoureux.
Nouveau tour de table à l’été
Créée en décembre 2015, la start-up wavrienne (avec un pied à Bruxelles) levait près de 500.000 euros en juin dernier (voir détails en fin d’article).
Vers l’été, Mozzeno planifie un nouveau tour de table “afin de financer la poursuite du développement de la plate-forme et nos activités tant en Belgique qu’à l’étranger.” Pas de pays cités jusqu’ici mais la société concentrera sans doute ses efforts à l’export sur les potentiels et services visant les investisseurs.
A qui la société fera-t-elle appel pour ce nouveau tour de financement? Le premier sollicité sera le fonds WING, dans l’espoir qu’il repasse les plats. Pour le reste, Xavier Laoureux dit espérer qu’une nouvelle combinaison privé/public sera possible…
Portrait-minute de Mozzeno
Fondateurs: Frédéric Dujeux, consultant spécialisé en paiements électroniques, anciennement directeur technologique d’Ogone, et Xavier Laoureux, orienté marketing digital (ex-TBWA, agence de pub et communications).
Fonds levés en juin 2016:
- 125.000 euros venu du fonds wallon du numérique W.IN.G, sous forme de capital
- 340.000 euros investis par 4 investisseurs privés: Harold Mechelynck et Thierry Pierson, fondateurs d’Ogone ; Arnaud Gillin, fondateur d’Innpact, acteur spécialisé dans le conseil et la structuration de fonds orientés “impact investing” ; et Peter De Caluwe, vice-président Digital Payments chez Telenor Financial Services.
La société a obtenu un agrément comme organisme financier auprès de la FSMA comme “prêteur en crédits à la consommation pour des prêts à tempérament”. Elle est par ailleurs autorisée à opérer comme “sous-agent d’assurances” pour Axa Belgique. [ Retour au texte ]
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