Le Parlement bruxellois a voté le projet d’ordonnance, approuvé précédemment en commission, qui vise à transposer dans la législation locale la Directive européenne concernant la “réutilisation des informations du secteur public”, plus communément appelée “open data”.
Les passions, nous dit-on, ne se sont pas vraiment déchaînées pour l’analyse et le débat sur ce texte d’ordonnance et le sujet qu’elle concerne. L’open data laisse encore trop indifférent, n’est pas abordé de manière volontariste de la part de la plupart des partis et des députés bruxellois, déplore Ecolo.
Ce parti, rappelez-vous (nous vous en avions parlé ici), avait proposé ses propres propositions et texte… aux assemblées des différents niveaux de pouvoirs. Le fédéral n’en avait pas tenu compte. Les parlementaires wallons, eux, s’étaient montré un rien plus à l’écoute sans pour autant revoir d’office la copie initiale de la proposition de décret mais en laissant entendre que certains aménagements pourraient être faits. La décision finale devrait intervenir dans les semaines à venir.
Qu’en fut-il à Bruxelles? Le texte final de l’ordonnance se contente de transposer la Directive européenne, sans inclure des éléments plus progressistes et volontaristes, regrette Ecolo. Service minimal.
Le parti a toutefois réussi à imposer quelques petites modifications, plus ou moins symboliques…
Un engagement sur le long terme
Première petite concession de la majorité bruxelloise aux demandes d’Ecolo: une légère modification dans le titre de l’ordonnance.
La proposition initiale s’intitulait simplement “Projet d’ordonnance portant transposition de la Directive”. Le titre définitif se lit comme suit: “Projet d’ordonnance visant à l’établissement d’une politique de données ouvertes (Open Data) et portant transposition de la Directive…”
So what?, direz-vous. Disons qu’au moins on sait d’emblée de quoi parle le texte. Ce qui n’est pas tout-à-fait inutile ou superflu.
D’autres modification, en dépit des apparences, sont moins symboliques et bien plus qu’un embellissement de façade, estime Alain Maron, député bruxellois Ecolo, membre suppléant de la commission parlementaire des Finances et des Affaires générales qui a eu à traiter du dossier. Exemple?
Dans le texte soumis à discussion, ses auteurs semblaient faire un petit retour en arrière, ou avoir eu un bref moment d’égarement lors de la rédaction. On pouvait en effet y lire que “le Gouvernement peut mettre en place un portail open data”.
“Peut”. Terme bizarre dans la mesure où le portail existe déjà. Mais, s’inquiétait Ecolo, ce “peut” donne à penser “qu’un gouvernement ultérieur pourrait décider de ne plus mettre en place ce portail”, l’abroger, le laisser dépérir, ne plus l’alimenter… Le groupe PS, lui aussi, s’était interrogé sur la nouvelle formule facultative.
Sur ce point, Ecolo a obtenu raison.
Les regrets
Le parti des Verts regrette plus particulièrement de ne pas avoir été suivi sur deux points: d’une part, “une indication claire dans le type de licence à utiliser, selon le type de jeux de données” et, de l’autre, l’obligation de procurer un accès aux données en format technique ouvert.
Alain Maron: “L’ordonnance [de la Région bruxelloise] est une transposition ad minima de la directive européenne, sans ambition supplémentaire.”
En matière de licences, le texte du gouvernement demeure évasif, signalant simplement qu’elles seront définies dans un futur arrêté d’exécution.
“Il ne faut pas s’enfermer d’avance dans un nombre de licences précis. La gratuité est préconisée. En attente de l’arrêté d’exécution, les administrations peuvent travailler avec la licence bruxelloise existante – Licence ouverte/Open Licence – qui est utilisée depuis 2014 pour la mise à disposition de données régionales provenant de Bruxelles Environnement, de Bruxelles Mobilité et du CIRB”, déclarait par ailleurs Bianca Debaets, Secrétaire d’Etat bruxelloise chargée de l’informatique, devant la commission.
Alain Maron: “La mise à disposition de données politiques permet de raviver la démocratie et la participation citoyenne. En France, des sites Internet analysent les activités parlementaires afin de mieux comprendre le trajet des textes. Qui a voté quoi ? Quel lobby a obtenu quel amendement ? etc. Il ne faut pas que les travaux parlementaires soient des boîtes noires. Ouvrir les boîtes permet de refermer les phantasmes.”
“Chez Ecolo, nous avions recommandé de recourir à un nombre réduit de licences, dont une qui serait l’ODBL. La demande d’amendement avait pour but de limiter l’insécurité juridique qu’entraînerait la multiplication du nombre de licences, et de limiter le risque d’“enclosure”, autrement dit le fait que les données publiques soient ensuite “ré-enfermées” par une licence trop restrictive.
Que choisir parmi les modèles de licences Creative Commons ? Entre autres…
Le gouvernement ne nous a pas suivi mais a toutefois commandé une étude auprès du CRIDS (Centre de recherche Informatique, Droit & Société) de l’UNamur, lui demandant de se pencher notamment sur les types et nombre de licences.” Une décision que le parti juge louable.
L’objectif, ajoutait encore Bianca Debaets, est de veiller à ce que “les conditions d’utilisation relatives à la réutilisation correspondent le plus possible à celles des autres Régions et des pays voisins afin de stimuler la réutilisation des données.”
Le rapport du CRIDS est attendu pour la fin de l’année.
Pour ce qui est de l’utilisation d’un “format technique ouvert”, le texte d’ordonnance de la Région bruxelloise semble rester en retrait d’une obligation de mettre les données à disposition dans des formats directement exploitables par les “machines” (ordinateurs et logiciels). Bianca Debaets défendait par exemple l’idée que certaines données, disponibles en format PDF (notamment ceux du Parlement), “permet déjà au portail de fonctionner”. Reste que ce format n’est pas directement exploitable, réutilisable par les systèmes, rétorquait Alain Maron. “Il s’agit d’aller vers des données ouvertes et non d’un traitement de données basiques par Internet.”
Il regrette qu’en la matière la Région soit nettement moins volontariste que la Ville…
Pas d’Open Data Manager pour Bruxelles
Ecolo regrette également, comme il l’avait fait auparavant lors des décisions prises au niveau fédéral et wallon, que Bruxelles n’adopte pas non plus le principe d’un Open Data Officer.
Ce que le parti désigne par l’appellation “gestionnaire général des données” lui semble pourtant utile, sinon nécessaire, pour “assurer un suivi de la politique open data et de la cohérence”, notamment pour coordonner l’action des autorités et des pouvoirs locaux, et jouer un rôle “d’initiative et de proposition à l’égard du Gouvernements – et pas seulement une mission de mise en œuvre.”
Mais, là non plus, le gouvernement bruxellois n’a pas saisi la perche. Une décision justifiée comme suit par Bianca Debaets, devant la commission parlementaire: “Il est plus important de désigner dans chaque administration une personne chargée pour stimuler l’Open Data au sein de son administration.
C’est plus important que de mettre quelqu’un au-dessus de l’Administration. N’oublions pas par ailleurs qu’un Smart City Manager, chargé entre autres de promouvoir l’Open Data. a été désigné l’année dernière.” Il s’agit en l’occurrence de Céline Vanderborght (relire notre article)
Un raisonnement qui ne rassure pas Ecolo qui craint que ce rôle de “promotion de l’open data” ne soit noyée dans les tâches et les attributions de Céline Vanderborght…
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