Les initiateurs du programme StarTech (programme d’incubation destiné à pousser les étudiants ingénieur à l’entrepreneuriat) en ont eu l’idée en analysant certains écosystèmes – ou simples réalités – à l’étranger. “Que ce soit en Finlande, autour de Nokia, ou aux Etats-Unis, on ne peut qu’être frappé par l’implication des étudiants dans les processus d’innovation. Ce sont souvent des étudiants chercheurs ou de jeunes diplômés qui ont donné naissance à quelques-unes des sociétés les plus emblématiques, ces dernières années”, explique Slim Sediri, organisateur du StarTech et représentant de l’incubateur WSL à Mons.
Chez nous, la volonté – déclarée comme telle – d’entreprendre, de devenir entrepreneur, gagne du terrain dans les rangs des étudiants mais le passage à l’acte demeure difficile. En cause, un manque (présumé ou réelle) de compétences et d’outils d’acquisition des bonnes “ficelles”.
L’idée fut donc d’instiller le goût de l’entrepreneuriat à des jeunes étudiants ingénieurs en leur permettant, dès le secondaire, de porter un projet et de le transformer – si possible – en jeune entreprise.
Pour cela, certaines nouvelles habitudes pédagogiques ont été esquissées: “plus question de venir aux cours pour être passif et se contenter d’ingérer de la matière. Il s’agit de se former soi-même. Par le biais de vidéos, de documents consultés… Chaque semaine, les étudiants viennent au cours en ayant intégré un nouveau concept. Ils doivent accomplir des tâches et missions chaque semaine. A charge pour eux de les concrétiser.
Les coachs ne sont pas là pour enseigner la matière mais pour les guider, leur poser les bonnes questions, les faire réfléchir.
C’est un changement fondamental de méthode. Les étudiants, qui n’en ont pas l’habitude, sont un peu perturbés au départ. Ils doivent accepter que c’est à eux de se remettre en cause, de douter et de trouver la solution et la voie. Notamment parce que les coachs qui les accompagnent [il y en a deux par école] et les professeurs référents ne sont pas toujours d’accord sur la réponse à apporter…”
Slim Sediri: “L’effet de bouche à oreille est à l’oeuvre. Il y a 4 ou 5 ans, quand je présentais StarTech aux étudiants et demandais “qui a envie d’entreprendre?”, 4 ou 5 étudiants sur un auditoire de 100 personnes se disaient intéressés. L’année dernière, à Mons, de 30 à 40 des 80 étudiants qui participaient à la session d’information ont levé la main…”
L’encadrement
StartTech fait appel à des coachs (2 coachs par école qui accompagnent une école différente, d’année en année) ainsi qu’à des témoignages d’entrepreneurs, de préférence jeunes, ayant eux-mêmes un profil d’ingénieur.
“Nous préférons des jeunes assez fraîchement diplômés, souvent dans la tranche d’âge 30-35 ans, parce que les mentalités ont évolué, tout comme les modèles économiques, les modes de financement… Cela peut également être un entrepreneur plus âgé mais à condition qu’il ait récemment lancé sa société.”
Quelles sont les compétences requises pour qu’un étudiant intègre le programme StarTech?
Slim Sediri: On insiste généralement sur trois skills et une attitude. La première attitude à avoir est de rencontrer des gens, des clients, partenaires, fournisseurs potentiels, parler du projet. Ce qu’on essaie aussi de développer, c’est l’humilité, la ténacité — ou la persévérance —, et la frugalité. Etre capable de vivre avec peu de moyens et accepter le fait qu’on ne roulera pas tout de suite en BMW…
L’étudiant doit-il déjà, au départ, avoir la fibre entrepreneuriale ou peut-on la lui inculquer?
Il est important de conscientiser, de faire comprendre ce qu’est l’entrepreneuriat. Je crois que nombreux sont ceux qui se libèrent en cours de processus. Ce que l’on fait, c’est les mettre dans la peau de l’entrepreneur. Pour savoir si on est fait pour quelque chose, il faut pouvoir essayer, tester…
Comment StarTech sélectionne-t-il projets et étudiants?
Ce qui est important pour nous, c’est l’innovation technologique, le potentiel de véritable valeur ajoutée sur le marché. Le projet est-il suffisamment défendable face à la concurrence, face à de nouveaux entrants potentiels…
On fait également attention à la qualité de l’équipe, à sa motivation, à sa capacité à livrer…
Les écoles, elles aussi, s’adaptent et font plus de place au travail en équipe, sur base de projets.
Quelle part le projet StarTech prend-il dans l’évaluation, la cotation, globale de l’étudiant?
Cela dépend de chaque école, selon le nombre de crédits qu’elle attribue au programme.
Il faut faire une distinction entre la décision du jury, qui évalue les projets, et la cote académique donnée par les professeurs. Cette note dépend du rapport des coachs et de la présentation finale par l’équipe d’étudiants.
Mais cela reste un travail supplémentaire. Dans certaines écoles, les étudiants ont le choix entre un travail purement technologique ou le programme StarTech. Dans d’autres, le programme est intégré au cursus, comme élément d’un cours de management ou d’entrepreneuriat.
Comment collaborent ou se complètent coachs et professeurs?
Là aussi, cela dépend de l’école. Parfois le coach est en première ligne. Parfois un professeur donne des détails, un cours supplémentaire ou plus spécifique. Par exemple sur la comptabilité ou le plan d’affaires. Le professeur intervient aussi en soutien lorsque l’étudiant a des questions ou un besoin d’aide urgente.
L’école apporte aussi une assistance technologique – support, conseils, achat de matériel…
Quel bilan?
En 2017, 8 écoles d’ingénieurs devraient participer au programme StarTech. Pour un total d’environ 300 étudiants.
Lors de son lancement, voici 5 ans, il ne concernait qu’une seule école (Mons) et une dizaine d’étudiants.
Slim Sediri: “Un changement de mentalité, de perception est à l’oeuvre. Longtemps, les étudiants confondaient grands patrons industriels et entrepreneurs… Entrepreneur était un peu synonyme d’exploiteur.”
En 5 ans, quelque 30 projets ont été portés par environ 400 étudiants.
Une dizaine se poursuivent au-delà du programme scolaire. Les responsables du programme StarTech estiment que la moitié d’entre eux ont de bonnes chances de se transformer en entreprise commerciale.Une start-up a d’ailleurs déjà vu le jour en fin 2014. Il s’agit de ShareIf, dont nous vous avions parlé ici.
7 autres projets en sont au stade pré-startup., dont deux aux accent ICT: Sunslice (système miniaturisé de recharge de smartphone, de la taille d’une carte de crédit, fonctionnant à l’énergie solaire) et Tracko (dispositif antivol de géolocalisation pour vélos haut de gamme).
Slim Sediri: “La qualité des projets est en progression. Les étudiants sont par ailleurs plus motivés qu’avant. De notre côté aussi, nous améliorons notre capacité à maîtriser les difficultés. Sans oublier les structures qui se mettent en place pour aider les étudiants-entrepreneurs à développer leurs projets pendant la suite de leurs études – notamment les incubateurs dédiés aux étudiants tels que le VentureLab à Liège ou l’Yncubator à Louvain-la-Neuve.
C’est une évolution récente. Petit à petit, on est en train de structurer l’accompagnement des étudiants-entrepreneurs.”
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