Le 23 mars dernier, la mesure 43 du Plan du numérique – le développement des compétences informatiques des jeunes – a fait l’objet d’une réunion avec l’ensemble des acteurs concernés: d’une part, les sociétés et organisations impliquées, telles que le Microsoft Innovation Center, For’J, les Voyageurs du Code, Kodo Wallonie, le Pass ou le Mundaneum ; d’autre part, les universités et les opérateurs de formation, initiale et continue, des enseignants.
La rencontre, organisée par l’Agence du Numérique (AdN), a fait consensus: si des initiatives existent au niveau de l’éducation aux médias et de la littératie numérique [Ndlr: aptitude à comprendre et à utiliser le numérique], la sensibilisation à la logique algorithmique et à l’apprentissage des langages de programmation chez les jeunes fait par contre totalement défaut. L’opération WallCode veut combler cette lacune.
Deux axes
Le projet WallCode repose sur deux axes. Le premier consiste dans la mise en place d’une formation Coding à destination des jeunes [depuis la maternelle jusqu’à la rhéto], grâce à l’implication de quelques figures montantes de la programmation à destination des jeunes: Céline Colas, présidente de Kodo Wallonie et co-organisatrice des clubs de programmation libre et gratuit CoderDojo de Liège, Mons & Charleroi; Chloé Laurent des Voyageurs du Code Belgique; ou encore Daniel De Luca, initiateur des journées Devoxx4kids. Nous vous présentons leurs propres initiatives dans cet autre article.
Concrètement, il s’agit d’organiser des ateliers de programmation à la logique algorithmique dans les écoles.
L’Heure ou… la Semaine du Code?
Histoire de garder les Bruxellois dans le jeu, l’événement se fera sous la bannière de l’Heure du Code, mais à une date jugée plus propice à la participation du corps enseignant et des élèves, à savoir la semaine du 21 novembre au lieu de celle du 5 décembre.
Avec quels moyens? Pascal Balancier, expert edtech à l’AdN: “340.000 euros ont été débloqués [Ndlr: budget libéré dans le cadre du Plan du Numérique]. Il en faudrait trois fois plus mais bon… Ce budget sera essentiellement affecté à la coordination et à la communication. L’idée est de donner des moyens à Kodo Wallonie (sous la forme d’un quart-temps) afin qu’il puisse s’articuler avec les autres acteurs compétents de telle sorte que les activités WallCode couvrent l’ensemble du territoire wallon tout au long de la Semaine du Code.”
Utiliser le bon “langage”
L’initiative est encore en pleine préparation mais ses grands principes ont été esquissés dès la séance de travail de mars dernier.
Pour convaincre, séduire et impliquer la cible – pour rappel, les enfants et adolescents, des 3-5 ans jusqu’aux 17-18 ans -, il faudra veiller à “communiquer de manière claire et sans ambiguïté”, en évitant les poncifs, les slogans faciles – et totalement inefficaces, mettre surtout l’accent sur les atouts et les vertus du numérique (levier de créativité, acquisition d’aptitudes en résolution de problèmes, outil indispensable pour évoluer dans le monde actuel, applicabilité tous azimuts…).
Les vecteurs à utiliser seront donc idéalement des activités concrètes, attractives, voire ludiques: piloter un drone, développer une appli mobile, un jeu sérieux, se plonger dans la réalité augmentée…
Autres préceptes recommandés lors de l’atelier de mars: éviter de mélanger les tranches d’âge, veiller à identifier et mobiliser les bons relais au sein des écoles, ne pas viser ou impliquer uniquement ceux qui sont déjà convaincus des mérites de la formation à la programmation, mettre l’accent sur le partage et la mutualisation des ressources, idées et initiatives – histoire de ne pas devoir toujours réinventer la roue, en évitant toutefois un “copier-coller” qui tomberait dans le piège d’une inadéquation aux spécificités des participants.
Former les profs
Second volet de WallCode: proposer à tous les (futurs) enseignants intéressés une formation qui leur permettra d’organiser eux-mêmes des inititations au code dans leur classe. Cible privilégiée: les enseignants qui organisent déjà des séquences d’initiation à l’informatique et d’éducation à la technologie.
Pascal Balancier (AdN): “Le but est de proposer aux enseignants une sorte de remédiation avec des outils plus orientés vers les sciences informatiques, les algorithmes et la programmation. »
Pascal Balancier: “Les profs qui donnent ces cours n’ont pas été formés. Il y a en effet malheureusement longtemps que l’enseignement de l’informatique a été retiré du cursus. Ce qu’ils enseignent, ce n’est ni de l’informatique ni de la programmation, c’est de la bureautique ou de la littératie. Le but est de leur proposer une sorte de remédiation avec des outils plus orientés vers les sciences informatiques, les algorithmes et la programmation.”
Cursus pour le secondaire
Le projet WallCode se concrétisera en trois phases: l’inévitable inventaire de l’existant, confié à un consortium d’universités et de Hautes écoles, constitué pour l’occasion. Il lui reviendra de déterminer le contenu idéal de la “boîte à outils” qui servira de matière première au cursus, de traduire et de documenter ce qui doit l’être puis de procéder aux tests.
“Une offre de formations à destination des enseignants qui, de préférence, soit insérée dans le cursus.”
Cette phase devrait faire le point sur quelques projets-phare comme le Cyberpack de Numediart, le guide 1,2,3 Codez mis au point en France par la Fondation La main à la pâte dans le cadre du programme de formation Class’Code de l’Inria [qui vise les jeunes de 8 à 14 ans pour les former à la “pensée informatique”], ou la plate-forme Codecademy adaptée en français par Bibliothèque Sans Frontières, l’ONG qui est également à la base de l’initiative Voyageurs du Code.
Pascal Balancier: “Le processus d’une formation à la programmation dans le secondaire est enclenché. Pour moi, tous les signaux sont au vert.”
Pascal Balancier: “A partir de là, il s’agira de construire une offre de formations à destination des enseignants. A minima, elle sera accessible sur base volontaire. Au mieux, les acteurs officiels de la formation comme l’IFC [Institut de la Formation en cours de Carrière] se l’approprieront avec, comme avantage pour le corps enseignant, la prise en charge des frais de déplacement et la valorisation des heures de formation.
Dans un troisième temps, WallCode devrait accoucher d’un programme de formations à la programmation à destination des élèves du secondaire inférieur et supérieur.”
Le timing? Pascal Balancier l’espère comme suit:
- phase pilote dès cette année avec, dans le courant du dernier trimestre 2016, la mise ne place d’une offre d’animations à destination des élèves, le lancement des premiers outils de communication et le début du travail d’analyse de l’existant
- en 2017, la finalisation des outils de communication, du travail d’analyse de l’existant, le lancement “à plein régime” de l’offre de formation des enseignants et une “montée en puissance” de l’offre d’animations à destination des élèves
- vitesse de croisière pour 2018
- 2019: “sur base de l’expérience menée et de l’analyse des retours d’expérience, élaboration d’une proposition cohérente pour l’enseignement des sciences informatiques en 1er cycle du secondaire (1ère et 2ème années).”
Faire bouger les lignes
Reste à faire en sorte que la Fédération Wallonie-Bruxelles emboîte le pas. Pascal Balancier: “Dans le cadre du Pacte d’Excellence, nous avons porté à l’époque cette revendication auprès du Cabinet Milquet et le message est bien passé. Pour moi, tous les signaux sont au vert et les processus sont enclenchés.” Mais, bien entendu, sans préjuger du temps nécessaire et de la suite que la nouvelle ministre de l’enseignement, Marie-Martine Schyns, souhaitera donner pour faire “bouger les lignes”.
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