Lorsque nous vous avions parlé de cette société, en décembre 2014, elle s’appelait encore Visyos et s’apprêtait à muer en 3D-Side à la faveur d’une fusion avec une autre spin-off de l’UCL, active dans un domaine voisin (Centis). Aujourd’hui, 3D-Side a quitté le cocon de l’université, tout en restant à Louvain-la-Neuve, a fait l’acquisition de sa première imprimante 3D (technologie de frittage de poudre par laser), a bouclé une première levée de fonds et démarré ses premières productions.
La société est active sur deux fronts. D’une part, la production d’instruments sur-mesure d’aide à l’acte chirurgical et de moules qui serviront à produire des implants par injection. Domaine spécifique visé: la chirurgie osseuse reconstructrice (par ajout d’allogreffe ou de prothèse) suite à l’ablation de tumeurs osseuses. Un créneau sur lequel la jeune société néolouvaniste estime n’avoir encore que fort peu de concurrents, en ce compris à l’échelle mondiale.
Reconstruction osseuse sur-mesure
Autre axe d’activités: l’aide à l’intervention chirurgicale en maxillo-facial et le design et production de moules qui serviront à la fabrication d’implants crâniens (3D-Side, elle-même, ne produira pas ces implants). “Jusqu’ici, les implants sont encore largement façonnés à la main, par les chirurgiens.” Avec toute l’approximation que cela peut impliquer en termes d’adéquation topographique de l’implant par rapport à la zone à reconstruire.
“Le processus de polymérisation de la matière utilisée n’était en outre pas contrôlé, avec les risques de nocivité que peut constituer l’emprisonnement de solvants… A l’avenir, les clients disposeront de moules et d’instruments de positionnement conçus sur-mesure pour chaque patient.”
Autres exemples d’applications que propose 3D-Side: la fabrication de petits instruments de découpe de l’os ou d’aide au réalignement de membres fracturés ou mal consolidés, ou encore d’instruments permettant de découper les os pour redresser, par exemple, une courbure anormale de la colonne vertébrale.
Une demande de brevet est en cours. Elle concerne les caractéristiques du moule produit en 3D, conçu de telle sorte à faciliter le processus de démoulage de l’implant.
“A plus long terme”, ajoute Laurent Paul, “nous voudrions travailler aussi sur les implants. La maîtrise du ciment orthopédique, par exemple, serait une suite logique de notre spécialisation en dispositifs médicaux…”
En attendant la certification
Produire des moules et implants en réel sur-mesure
Il reste une dernière étape à franchir pour pouvoir réellement commencer la commercialisation de dispositifs médicaux produits en 3D. A savoir, la certification ISO 13485, que 3D-Side espère décrocher au premier trimestre 2016.
Entre-temps, les pièces, modèles de dispositifs médicaux ou d’implants, et objets divers que produit la société sont encore essentiellement destinés à des clients qui les utilisent à des fins de marketing ou de démonstrations lors d’expos et salons professionnels.
Par ailleurs, pour répondre aux sollicitations de ses premiers clients dans le rang des chirurgiens, elle peut toujours s’appuyer sur le Sirris (Liège) qui, lui, est certifié ISO.
Améliorer les processus
3D-Side a décroché un subside auprès de la Région wallonne. Objectif: améliorer la qualité des pièces produites. “Nombre de paramètres sont directement liés aux capacités de la machine. Avec des équipements plus anciens, la qualité des dispositifs médicaux produits est “limite” en termes de résistance, de finesse de couches d’impression, de degré de rigidité ou au contraire de flexibilité de la pièce”, explique Laurent Paul.
Si divers fabricants d’imprimantes en proposent pour le secteur de la médecine, il estime toutefois qu’aucune n’est réellement optimisée pour les contraintes qu’il implique. “La production est une question de paramétrage fin, à la fois de la machine et de l’environnement. L’un des facteurs sensibles est celui de la température. Un demi-degré en plus ou en moins, en température ambiante ou extérieure, peut faire une grande différence dans la qualité ou les caractéristiques de l’objet imprimé.”
La spin-off n’a pas coupé ses liens avec l’université. Au contraire, ils lui permettront comme le souligne Laurent Paul “de travailler plus vite” et de poursuivre dans la voie de projets de recherche.
Le projet de recherche portera donc notamment sur l’analyse et l’optimisation des paramètres afin de pouvoir moduler les propriétés des pièces produites.
Au-delà du médical?
La décision n’en a pas encore été prise mais 3D-Side pourrait ajouter d’autres secteurs à son arc, en plus du médical. Le Sirris ne pouvant plus satisfaire l’ensemble des demandes de production qui lui sont adressées, le centre cherche en effet des sociétés qui pourraient reprendre à leur compte certaines productions.
Laurent Paul: “Si nous nous comparons à Materialise, nous proposons une approche plus personnalisée et une meilleure connaissance des salles d’op.”
“A priori, nous ne travaillerons pas pour tout public mais nous pourrions reprendre certaines demandes de production routinières aujourd’hui adressées au Sirris. Et nous pourrons aider et conseiller le client en matière de paramètres de production à choisir, de positionnement des pièces…”
Mais il est une autre raison à cette possible diversification: la rigidité de la réglementation sur les remboursements médicaux qui freine l’essor potentiel des solutions développées par 3D-Side.
De toute façon, le marché belge sera trop restreint pour supporter la viabilité de la société. Dès ses premiers mois, la spin-off réfléchit donc en termes internationaux. Un responsable commercial sera bientôt engagé (via le programme CXO de la Région wallonne), avec mission de trouver clients et distributeurs. Premiers marchés visés: la France, l’Espagne, la Suisse et, plus tard, l’Italie, le Royaume-Uni, l’Allemagne, les Pays-Bas.
Autre destination plus immédiate, tant en termes d’agenda que d’éloignement géographique: la Flandre.
“Compte tenu du cadre légal, l’Europe sera notre premier périmètre d’extension. Les Etats-Unis sont sans doute plus compliqués mais, qui sait?, peut-être l’envisagerons-nous d’ici un an, forts de notre certification ISO…”
Laurent Paul estime en tout cas que, même si elle est très jeune, 3D-Side dispose d’un atout majeur: “Nous sommes l’un des seuls en Europe à pouvoir offrir la chaîne complète, certifiée, de production, depuis l’analyse d’image, la modélisation et la conception jusqu’à la production et à l’assistance concrète au chirurgien en salle d’opération. Si nous nous comparons par exemple à Materialise et à sa filiale Mobilise, nous proposons une approche plus personnalisée et une meilleure connaissance des salles d’op. Nous travaillons réellement sur-mesure pour le chirurgien, pour lui fournir “son” instrument. Et avec la capacité d’apporter des réponses à des cas plus complexes…”
Carte d’identité de 3D-Side
Création: 2014
Localisation: Louvain-la-Neuve
Effectifs: 5 personnes
Fondateurs: Laurent Paul et Khanh Tran Duy
Spécialisation: conception et production de dispositifs médicaux pour chirurgie osseuse et reconstruction maxillo-faciale et crânienne
Public-cible: secteur médical (essentiellement)
Technologies utilisées: SLM (frittage de poudre par laser)
Financement: prêt Novallia, investissements du fonds Vives II (UCL) et de Nivelinvest, subside R&D de la Région wallonne
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