Meusinvest: une diversification de plus en plus manifeste

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Par · 16/09/2015

Meusinvest tirait, hier, le bilan de son exercice 2014-2015, une année considérée comme réussie avec des chiffres (investissements, sociétés aidées…) qui sont en augmentation. Confirmation d’une accélération intervenue depuis 2010 (voir encadré en fin d’article) et qui s’explique par une triple stratégie engagée en 2009: diversification des investissements avec ouverture à de nouveaux secteurs; partenariats avec les acteurs de l’écosystème et d’autres fonds; plus large couverture du territoire

Que s’est-il passé, récemment, du côté de chez Meusinvest? L’invest a poursuivi sa diversification d’activités et pris quelques mesures pour combler une faiblesse, à savoir: une visibilité parfois trop limitée sur les projets intéressants.

C’est notamment pour cette raison que l’invest publique liégeoise a conclu des partenariats avec divers autres fonds, parfois sectoriels (comme en chimie et sciences du vivant, via un investissement dans l’Innovation Fund lancé par la fédération Essenscia) ou avec des acteurs du financement actifs sur des pré-carrés voisins. C’est le cas de l’accord passé, avant l’été, avec… MyMicroInvest, plate-forme de crowdfunding.

Le partenariat a notamment pris la forme d’une entrée de Meusinvest dans le fonds d’investissement MyMicroInvest Finance (qui investit, en parallèle, avec les crowdfunders). Il ne prévoit par contre pas d’investissement parallèle systématique des deux acteurs dans les dossiers en portefeuille de part et d’autre.

Effet de levier

Gaëtan Servais: “mener une stratégie de développement par partenariats afin de travailler avec d’autres fonds qui, de leur côté, détectent des dossiers intéressants.”

Gaëtan Servais, directeur général du groupe Meusinvest, parle d’une décision qui va dans le sens de la “création d’un écosystème vertueux. Le deal flow de qualité est celui qu’on va chercher. Cela explique notre stratégie de développement de partenariats afin de travailler avec d’autres fonds qui, de leur côté, détectent des dossiers intéressants. C’est le principe, aussi, du co-investissement, de l’échange de bons procédés.

Le partenariat génère aussi ce que j’appelle une capacité 1+1+1+1. Pour un euro investi par le privé, il est intéressant que les banques investissent 1 euro. Idem pour les invests publiques. Désormais, un 4ème euro s’ajoute, venu du crowdfunding. Ce genre de partenariat nous permet en outre de siéger au conseil d’administration du fonds partenaire et donc aussi au comité de sélection…”

Le côté “échange de bons procédés” doit donc permettre à MeusInvest de s’“ouvrir à ce domaine du crowdfunding”, comme le déclare Hughes Danze, porte-parole de Meusinvest. A rebours, MyMicroInvest s’invite dans le cercle des partenaires “nouvelle économie” de Meusinvest – la petite galaxie étant notamment formée de LeanSquare, ID Campus ou encore le fablab Relab. Ce dernier point se concrétise d’ailleurs par le fait que José Zurstrassen est devenu président du conseil d’administration de LeanSquare.

L’avantage qu’en retire Meusinvest? “José Zurstrassen, c’est aussi une connaissance du monde des start-ups, un réseau d’adresses, une ressource utile pour l’accompagnement des start-ups….”

Diversification

La diversification menée par Meusinvest l’a amenée, ces dernières années, dans la nouvelle économie, dans le secteur de la culture ou encore de l’immobilier. “Nous sommes devenu un fonds omni-sectoriel”, se réjouit Gaëtan Servais.

Mais pas question pour autant de renier le passé et ce que les responsables de l’invest considèrent comme son biotope naturel, à savoir l’industrie et la réindustrialisation. Les taux de risques, besoins en financement, durées d’accompagnement et délais de valorisation étant fort variables, d’un secteur à l’autre, Meusinvest a dû apprendre à maîtriser ses interventions. S’il n’y a pas de réelle “stratégie d’équilibrage”, il y a par contre ce que Jean-Michel Javaux, président du conseil d’administration de Meusinvest, appelle “une attention de tous les instants.” Cela passe à la fois par des études de marché, des concertations avec des acteurs de terrain et les réunions trimestrielles du comité d’audit, “qui analyse l’état du portefeuille, prend note de certains indicateurs tels que des retards de paiement, de mauvaises nouvelles du côté du management…, pour adapter les choix.”

Fonds de croissance

L’une des dernières initiatives prises par Meusinvest consiste dans la création du fonds d’investissement Epimède, en partenariat avec d’autres acteurs (SFPI- Société Fédérale de Participations et d’Investissement, Intégrale et Ethias).

“L’objectif est de pousser les PME de la région liégeoise à devenir de grandes entreprises”, explique Gaëtan Servais. “La problématique n’est plus d’arriver à créer des entreprises technologiques mais plutôt de faire évoluer l’écosystème afin de permettre une réelle croissance des plus prometteuses d’entre elles.

Le dynamisme entrepreneurial de la région n’est plus à démontrer. On a vu se multiplier les start-ups et les spin-offs. Mais il y a encore peu de PME qui affichent une volonté de devenir de grandes entreprises et lorsqu’elles veulent le faire, elles sont confrontées au problème de l’equity gap, de l’incapacité à trouver des financements allant de 2 à 5 millions. C’est pour cela que le fonds de croissance Epimède a été créé.” Pour permettre aux start-ups et spin-offs ayant dépassé le seuil critique du positionnement technologique de passer à la vitesse supérieure ou à des sociétés évoluant par exemple dans le secteur biotech de s’engager dans des programmes de recherche à haut risque mais présentant des potentiels de plus-value très importante.

Le premier fonds constitué (24,2 millions d’euros, dont 4 millions venant de Meusinvest, le plus gros étant apporté par les autres partenaires) “devrait permettre de sélectionner 7 à 9 sociétés en vue d’accélérer leur croissance.”

Les deux premières bénéficiaires sont d’ailleurs déjà connues. Il s’agit des sociétés de biotech Novadip et BioTech Tools.

Intentions futures

Ces 10 dernières années, le principal secteur qu’a exploré et aidé Meusinvest est celui des biotechnologies. Il demeurera, demain, un axe d’action. Mais d’autres s’y rajoutent. Gaëtan Servais cite ainsi celui des “start-ups de la nouvelle économie”, le monde des spin-offs universitaires à connotation sciences de l’ingénieur — “car la Province de Liège fut et reste une terre d’ingénieurs” — “et aussi un secteur qui est naturel pour nous et qui correspond à une volonté de notre conseil d’administration. A savoir tout secteur qui réindustrialise.”

Autrement dit, “toute société qui amène, dans sa stratégie, un processus d’industrialisation qui n’était jusque là pas dans son positionnement.” Il cite deux exemples. D’une part, Mithra qui, avec un projet de construction d’une unité d’industrialisation (production d’hormones et d’injectables) va sextupler ses effectifs, jusque là de type purement bioingénierique. De l’autre, Protoplast, actif dans la production de moules à injection plastique pour le secteur automobile. Aujourd’hui, la société rapatrie ses processus de production (délocalisés jusqu’ici en Asie) en misant sur la robotisation et la production additive (3D printing).

Gaëtan Servais: “Nous sommes disponibles et nous avons les moyens de continuer à soutenir, au même rythme, les PME de la région liégeoise. Même si la route est encore longue si l’on s’en réfère à des indicateurs tels que le taux de chômage…”

Le concept de (ré)industrialisation ne touche pas uniquement l’industrie. Aux yeux de Meusinvest, c’est la perspective d’une industrialisation potentielle de solutions et projets qui justifie en partie certains investissements dans des start-ups made in “nouvelle économie”, dans les secteurs parfois très dématérialisés qui sont les leurs.

C’est en tout cas ce que soulignait Jean-Michel Javaux: “Une petite start-up telle que Student & Go (plate-forme d’offres d’emplois pour étudiants) peut très bien devenir, demain, une belle grosse boîte. Sans doute pas avec 500 personnes mais avec des potentiels, malgré tout, de création d’emplois et de développement à l’international…”

Mieux couvrir le territoire

Ces dernières années, la croissance des activités de Meusinvest est aussi passée par une extension géographique de l’action, tout en respectant le périmètre de la Province de Liège. C’est ainsi qu’une attention plus poussée a été octroyée depuis 2009 aux arrondissements de Huy-Waremme et de Verviers. Et cet effort devra encore s’accentuer. “En 2009, nous avons pris conscience que ces arrondissements étaient largement sous-représentés. Seulement 10% des dossiers en émanaient, ce qui ne correspondait pas à leur poids réel”, déclare Gaëtan Servais. “Entre-temps, cette proportion a été doublée. En 2015, on atteint les 23%. Le but est de pousser à 25 ou 30%.”

Les chiffres

Exercice 2014-2015

– montants investis par le Groupe Meusinvest (8 entités*): 73,5 millions d’euros – dont 35,6 millions en capital, 37,7 millions sous forme de prêts et 230.000 euros en leasing

– nombre d’interventions: 144

(*) Le Groupe Meusinvest se compose des entités suivantes: Meusinvest, Innodem, Innodem2 (financement sur base de fonds Feder), Invest Services (secteur immobilier), SpinVenture (création de spin-offs issues de l’ULg), Start-Up Invest (création de start-ups et spin-offs industrielles), FICI (projets de développement industriel, en partenariat avec ArcelorMittal), LeanSquare (accompagnement de start-ups)

– montants investis par l’invest seule (Meusinvest): 44,724 millions, en progression de plus de 25 millions par rapport à l’année antérieur

Moyens d’action en 2015: 354 millions d’euros

Moyenne annuelle d’investissement au cours des 5 dernières années: 53,2 millions

Bilan sur les 30 ans d’activités: 1.500 dossiers traités et exécutés ; montant total d’investissement: 516 millions d’euros ; près de 600 sociétés soutenues.

Accélération des activités depuis 2010:

– fonds disponibles: passés de 160 à 354 millions d’euros (la moitié de cette augmentation est attribuée au Plan Marshall)

– nombre de sociétés en portefeuille: 180 en 2010 ; 367 en 2015

– montants investis (cumulés): 250 millions en 2010 ; 516 en 2015; “ce qui signifie que nous avons investi autant ces 5 dernières années que pendant nos 25 premières années d’existence”, souligne Gaëtan Servais. [ Retour au texte ]