La 6ème édition du Boostcamp (programme d’accompagnement accéléré de projets high-tech) du MIC Bruxelles a livré, hier, son verdict. En pleine turbulence anti-Uber (Région bruxelloise, gouvernement fédéral, chez nous, mais aussi actions engagées dans d’autres pays), le jury du MIC Brussels vient de décerner son Grand Prix à CarASAP, un projet de “transport alternatif à la demande”.
Cela peut paraître étonnant, voire téméraire, mais ce projet a plusieurs particularités qui, d’une part, le distinguent d’autres initiatives (telles que Uber ou Djump) et, d’autre part, en font une solution “parfaitement légale”. L’initiateur du projet – Jonathan Guzy – a d’ailleurs lui-même une formation et un passé d’avocat (droit de protection de la vie privée) et dit avoir scrupuleusement respecté la législation locale, en en exploitant l’une des “finesses”, et avoir préparé la solution en prenant le soin d’inclure dans la boucle les autorités publiques en charge de la mobilité.
Le fait que le Grand Prix du MIC ait été remis par… Didier Gosuin, ministre bruxellois de l’économie et de l’emploi, ne fait qu’ajouter une petite touche acidulée à la chose. Même si ce dernier s’est gardé de tout commentaire, se limitant à souligner que le projet respectait en effet les dispositions légales.
Viser les professionnels
Venons-en à la nature du projet.
CarASAP est une solution de réservation de transport “à la demande”, transport assuré exclusivement par des chauffeurs disposant d’une licence professionnelle. La solution vise essentiellement le monde professionnel (sans toutefois snober une clientèle de particuliers).
Nouvelle solution de transport professionnel “alternatif”, concurrent des taxis et autres navettes…
Elle se définit comme une source de transport “alternatif” dans la mesure où le service vient compléter l’éventail des modes de transport préexistants que sont les taxis et les limousines. Sans parler des nouvelles formes de type Djump, reposant sur des particuliers.
“Si les taxis sont protégés par un monopole exclusif pour les transports requis “à la volée”, ce n’est pas le cas des services de réservation de transport, où taxis et services de transport avec chauffeur (lisez: limousines et navettes privées notamment) se partagent le monopole”, explique CarASAP. C’est dans cette dernière catégorie que la start-up a décidé de se positionner. En concurrence dès lors aux services de limousine jugés encore “artisanaux”.
“Nous visons essentiellement une clientèle d’entreprises, éventuellement comme solution de remplacement partiel des parcs de voitures de société. Nous leur proposons une solution réellement professionnelle qui simplifie leur gestion.” Cela passe par des rapports exhaustifs sur l’ensemble des courses effectuées, une facturation globale mensuelle, des prix concurrentiels et la possibilité de personnaliser, pour les employés, les droits de recours au service. “Pour ses juniors, une entreprise peut par exemple limiter l’accès au service CarASAP à des trajets pour cause de réunion tandis qu’elle permettra à ses cadres d’y recourir pour rentrer chez eux. Elle peut aussi limiter le nombre de trajets autorisés vers l’aéroport à 10 pour une période déterminée, etc.”, explique Jonathan Guzy.
Le centre d’abord
Pour ses débuts, CarASAP peut jusqu’ici s’appuyer sur un parc de 20 véhicules mis à disposition en exclusivité ou à temps partiel par des exploitants de services VTC (véhicule de transport avec chauffeur) ou des chauffeurs indépendants.
Jonathan Guzy (CarASAP): “Contrairement à ce que pratique Uber, nos transactions sont entièrement transparentes. Des impôts et de la TVA sont associés à chacune de nos prestations.”
Le service démarrera début février, couvrant Bruxelles et les deux Brabant. “Pour nous, il est primordial de pouvoir, avant tout, garantir la disponibilité du service. Nous avons donc décidé, au début, de circonscrire le territoire couvert à ce qui est la région la plus importante du pays. Mais nous envisageons d’élargir le service, par après, à d’autres villes belges, comme Anvers ou Liège.”
CarASAP a récemment changé de forme juridique, passant du statut de sprl à celui de s.a. Cinq personnes y travaillent pour l’instant. La société dit par ailleurs avoir réuni “plusieurs centaines de milliers d’euros” essentiellement auprès de business angels. Parmi eux, Julien Pestiaux, associé chez Climact. “Il participera à la définition de notre stratégie multimodale et à l’évolution “verte” de notre solution, afin de permettre aux entreprises clientes de réduire leur empreinte CO2”, indique Jonathan Guzy. Autres investisseurs: Marc Melviez (Luciad) et Jeremy Burdek (uMedia).
Un brin de technique
La solution CarASAP est disponible via Internet ou sur mobile (plates-formes iOS et Android). La technologie (notamment des algorithmes d’allocation dynamique) est d’origine britannique, CarASAP ayant passé un accord avec Addison Lee/Haulmont qui a déployé un parc de 4.600 véhicules en région londonienne et qui a conclu un accord similaire avec LeCab à Paris.
Une solution IT imaginée par Addison Lee (Londres) et adaptée au contexte local
CarASAP s’est chargé d’adapter la solution aux spécificités locales: modes d’utilisation de véhicules, caractéristiques de trafic et de mobilité à Bruxelles (notamment), adaptation de l’algorithme permettant de positionner les véhicules disponibles sur la zone à couvrir…
Particularité de la solution: le client connaît le prix de sa course dès l’instant où il réserve son trajet (contrairement à un transport en taxi). “Nous avons analysé les données de trafic de TomTom afin de pouvoir prédire les tarifs pour un “jour normal” en fonction de ce qui influence le trafic selon les jours de la semaine. Nous pouvons y ajouter des critères variables tels que des jours de grève…”
Le tarif sera fixe (quelles que soient les conditions de trafic ambiantes) pour des trajets à destination connue (gares, aéroport). Pour les autres, le tarif est calculé lors de la réservation, sur base de l’adresse de départ et de destination que rentre le client. CarASAP dit accepter à la fois les commandes immédiates et les réservations (les délais max. n’ont pas encore été fixés mais pourraient aller jusqu’à 2 semaines).
“Pour une prise en charge à l’aéroport, un client peut aussi réserver un transport en indiquant simplement l’heure d’arrivée de son vol, voire le numéro de celui-ci. Nous sommes connectés aux systèmes de Zaventem et sommes donc avertis par exemple des retards de vol, afin d’adapter automatiquement l’envoi d’un véhicule.”
Les deux autres lauréats
Le Prix de la Région de Bruxelles-Capitale est allé à Hozint (Horizon Intelligence), un projet de plate-forme de veille et de conseils dédiée à l’analyse de “risques pays”.
Via la collecte, la surveillance et un travail de synthèse de multiples sources d’informations (organes de presse, publications d’organismes officiels, réseaux sociaux…), il ambitionne d’informer ses futurs utilisateurs sur les instabilités politiques, sociales, économiques… de certains pays, sur les zones à risque, sur les pays où la cyber-criminalité règne en maître, sur les situations énergétiques… Clientèles prioritaires visées: le monde universitaire, des organismes travaillant à l’international et des analystes géopolitiques indépendants qui ne disposent pas forcément de beaucoup de moyens financiers pour s’abonner aux services traditionnels. Le trio derrière Hozint (Edoardo Camilli, Blaise Ortiz et Matthieu Baudoux) dit s’adresser essentiellement à des analystes spécialisés dans les domaines de l’énergie et des exploitations minières mais affirme que la méthodologie de collecte et d’analyse développée peut aisément s’appliquer à d’autres domaines.
Le projet en est actuellement au stade du prototype mais devrait bientôt faire ses débuts commerciaux.
Le troisième prix (Prix des Experts) a été décerné à Odyseed, un projet de serre connectée pour intérieur, porté par un quatuor d’étudiants de Solvay (Brieuc Thoumsin, Vasielos Vallas, Hervé Eerebout, Hassan Jafieddine). Objectif: permettre à des citadins (notamment) de s’essayer aux joies du jardin d’intérieur en faisant pousser légumes et arbres fruitiers dans un habitacle semi-piloté par la technologie: gestion et contrôle à distance de la serre via smartphone, tablette ou PC, conseils et informations utiles pour se découvrir la main verte, bons plans pour les consommer…
Le projet a retenu l’attention du jury à la fois en raison de la démarche lean adoptée pour l’élaboration du prototype et de l’étude de marché et par son côté innovant (un lien avec la tendance très en vogue de l’Internet des Objets).
L’équipe Odyseed vise en principe davantage un public de jeunes et de familles avec de jeunes enfants pour qui un jardin d’intérieur connecté et source d’informations pourrait être revêtir un certain intérêt pédagogique.
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