La jeune société montoise Drag ON Slide, spécialisée dans le développement de jeux sérieux et de jeux et applis pour mobiles (rappelez-vous l’appli Beer Me), lance un jeu sérieux destiné au secteur de la “supply chain”.
Avec trois ambitions qui définissent en même temps les cibles de clientèle:
- servir de support de formation pour les centres de formation, privés ou publics;
- faire office d’outil de test de connaissances et compétences, à la fois pour des sociétés de recrutement ou des sociétés d’intérim;
- et, enfin, se positionner comme “outil d’évaluation et d’amélioration de processus, de compétences, de performances et de rentabilité pour les entreprises elles-mêmes.”
Développé jusqu’ici entièrement sur fonds propres, le jeu sérieux Supply Chain Gaming comptera cinq modules, chacun dédié à une facette de la chaîne logistique: fournisseurs, approvisionnement, entreprise, distribution, clients.
“Nous nous concentrons tout d’abord sur les activités de logistique pure et de transport mais nous restons ouverts à bien d’autres choses”, déclare Pascal Dehut, consultant associé à Drag ON Slide, spécialisé en gestion logistique. Parmi ces évolutions et volets futurs, il cite potentiellement la vente, le marketing…
Pourquoi cibler le secteur de la logistique?
“Le serious game y est encore peu présent. Or, le secteur est extrêmement diversifié, de par ses activités, et a de réels besoins. Que ce soit en termes de vulgarisation, de rétention de compétences, d’optimisation de la productivité des entreprises”, déclare Pascal Dehut.
Un jugement que confirme Marc Fourny, directeur Formation pour le pôle de compétitivité Logistics in Wallonia: “Nous supportons cette initiative parce qu’elle permet de rencontrer l’un des obstacles majeurs au développement du secteur logistique chez nous, à savoir sa complexité et l’évolution constante des technologies. De très nombreux métiers et activités sont concernés. Il est essentiel d’attirer des jeunes vers ce secteur. Or, l’information manque à cet égard. Dès lors, ce jeu sérieux ou toute autre initiative innovante est la bienvenue pour illustrer les attraits et les ressorts de la logistique.”
Un jeu le plus réaliste possible
Chacun des cinq modules de Supply Chain Gaming permettra de se familiariser, via des scénarios ludiques mais réalistes, à toute une série de processus.
10 processus ont ainsi été conçus dans le module Distribution, couvrant toutes les étapes depuis la réception d’un produit jusqu’à son transport vers le client final.
Nicolas Jura: “Chaque client pourra adapter le jeu en fonction de ses propres données et contraintes.”
Un troisième niveau de détail permet d’aller plus en profondeur dans chaque processus. Ainsi 15 missions spécifiques sont scénarisées dans le volet stockage. “Cela permet de simuler diverses mises en situation, selon une gradation allant du simple au plus complexe. L’apprenant ou la personne testée pour ses compétences peut ainsi se livrer à divers exercices.”
Exemple? Une personne se glissant dans la peau d’un magasinier (plusieurs avatars sont disponibles) doit remplir la mission documentée par un bordereau de préparation. La tâche peut être simple (localiser ou réorganiser les articles dans l’espace de stockage) ou plus complexe (choisir la bonne technologie- terminal de type PDA ou voice picking– ou le meilleur engin de manutention pour la tâche demandée). Et cela, pas uniquement pour le “fun”. A la clé, c’est l’optimisation de la tâche qui est en jeu et qui sera évaluée selon une série de critères: coûts, délais, impact CO₂, distance parcourue, qualité du scénario choisi (par exemple, nombre de préparateurs sollicités mis en balance avec le temps écoulé).
Côté précision, Drag ON Slide a prévu que chaque paramètre du scénario sera personnalisable. En ce compris par exemple la dimension de l’entrepôt, la largeur des palettes… “Chaque client pourra adapter le jeu en fonction de ses propres données et contraintes”. Une personnalisation qui, pour les éléments les plus anodins, pourra être faite par l’entreprise client mais qui, pour les adaptations ayant un impact sur le scénario et/ou sur le graphisme du jeu, sera réalisée par l’équipe de Drag ON Slide.
Pascal Dehut: “nous pouvons aller jusqu’au niveau de la comptabilité analytique.”
Les paramètres de calcul se veulent les plus détaillés possibles. Ainsi le calcul du coût d’une tâche prend en considération le salaire de chaque personne (par exemple en fonction de son ancienneté), sa disponibilité (en fonction de son horaire de travail), le coût des équipements sollicités… “nous pouvons aller jusqu’au niveau de la comptabilité analytique”, souligne Pascal Dehut.
Les paramètres sectoriels qui turbinent derrière l’écran pour calculer l’impact des choix de l’apprenant ont été puisés auprès d’experts du secteur logistique, de la littérature spécialisée, de sociétés d’analyse de marché, etc.
Les résultats des exercices, qu’un apprenant peut répéter à l’envi pour s’améliorer, sont historicisés afin de générer des statistiques et des rapports (qui pourront être imprimés). Drag ON Slide a également prévu que les utilisateurs puissent constituer et imprimer le dossier complet de l’exercice ou du test, en ce compris les documents spécifiques (bordereaux, bons de prélèvement…). “Ce genre de documentation peut également servir pour fixer des objectifs aux collaborateurs et les évaluer en fin d’année.”
Côté graphisme et immersion, le sens du détail prendra à terme la forme d’une simulation 3D, avec possibilité pour l’apprenant de se plonger dans l’univers simulé, de s’y mouvoir et d’effectuer certains opérations “comme s’il y était”. Par exemple (c’est déjà le cas en 2D), simuler l’opération de scanning d’un code-barres: l’écran affichera les détails du produit, à la manière de ce qu’il visualiserait sur son PDA logistique.
Financement propre… pour aller plus vite
Une étude d’opportunité a bien entendu été faite et l’éclairage du pôle de compétitivité Logistics in Wallonia a été utile, à cet égard, mais la petite société Drag ON Slide (deux ans d’existence, 5 personnes) a préféré se lancer dans l’aventure de la logistique gamifiée par ses propres moyens. “Nous n’avons pas recherché des subsides parce que les délais auraient été trop longtemps. Or, nous souhaitions saisir l’opportunité avant que d’autres ne s’en emparent”, explique Paul Attia, chargé du business development.
Deux premiers modules (volet Distribution) ont d’ores et déjà été développés. Un troisième viendra s’y ajouter d’ici la fin de l’année. La commercialisation commencera début 2015.
“Pour la suite”, indique Nicolas Jura, gérant de Darg ON Slide, “nous nous alignerons sur la demande des clients. Mais nous avons voulu disposer déjà de 2 ou 3 modules afin de pouvoir satisfaire de premiers clients et ainsi obtenir les budgets nécessaires pour financer la suite des développements.”
“Nous avons encore, devant nous, au moins un an de développement. Il est clair que nous ne pourrons pas continuer uniquement sur fonds propres”, ajoute de son côté Paul Attia. “Mais avec les premiers contrats et selon l’engouement rencontré, nous pourrons introduire des dossiers de financement, en ce compris éventuellement du côté des projets européens Horizon 2020.”
Le financement futur et/ou les revenus de la commercialisation viendront également à point pour développer pleinement le graphisme 3D.
Le prix auquel le jeu sera proposé n’a pas encore été fixé. L’équipe de Drag ON Slide attend pour ce faire les premières réactions du marché. “La tarification sera personnalisée par type de client”, déclare Nicolas Jura, sans doute sur base d’une licence. “Le tarif aux clients dépendra aussi de leurs besoins: modules individuels pour de petites PME, solution complète pour un grand groupe, services d’accompagnement (formation, conseils, personnalisation), services de maintenance, offre d’un référentiel…” Il est par exemple déjà prévu que les agences de recrutement bénéficient d’un tutoriel qui permette à chacun de leurs collaborateurs de pouvoir déterminer quels exercices utiliser pour tester telle ou telle compétence nécessaire pour un job que l’on propose à un futur employé ou intérimaire.
Des projets plein la tête
Dans l’immédiat (avant la fin de l’année), le jeu sera traduit dans deux langues supplémentaires (néerlandais et anglais). D’autres langues pourront être ajoutées au catalogue, en fonction de la demande.
Au printemps 2015, il devrait débarquer sur tablette (pour environnements iOS, Android et Windows). D’ici un an, l’espoir est par ailleurs de proposer le jeu sérieux sur une plate-forme d’e-learning.
D’autres scénarios, mises en situation et avatars devraient également venir enrichir le jeu. Et la société se dit ouverte à tous les scénarios et demandes. “Jusqu’à de la livraison de colis par drones.” Et ceci n’est peut-être pas une boutade. La société montoise a par exemple déjà repéré un partenaire potentiel (français) disposant des connaissances nécessaires en la matière pour l’aider dans la scénarisation réaliste éventuelle.
A plus long terme, Drag ON Slide imagine de transposer les scénarios et bonnes pratiques spécifiques au monde de la logistique à des univers nettement plus “conso”. Objectif: proposer des jeux sérieux grand public dans divers contextes. “Il est parfaitement imaginable de transposer les techniques de rangement d’un entrepôt pour encourager ou apprendre à un adolescent de ranger sa chambre…” On sera alors là, pleinement, dans le monde de la gamification…
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