Après avoir passé en revue les Déclarations de Politique Régionale et Communautaire (wallonne, d’une part, francophone, de l’autre) (relire l’article en deux parties), place à l’accord de majorité de la Région de Bruxelles-Capitale et au rôle que ce document réserve aux technologies de l’information et au numérique.
D’un point de vue global, les deux textes présentent quelque axes et thèmes communs. Notamment la place de l’ICT dans les “pôles de compétitivité”, dans l’enseignement, la simplification administrative, la promotion et le développement d’un “territoire intelligent”. Ce dernier axe, compte tenu du contexte bruxellois, correspondant tout naturellement davantage aux défis de “territoire urbain intelligent”.
Au-delà de ces points communs génériques, on semble relever une certaine différence d’approche entre les deux Déclarations de Politique. La Région bruxelloise semble vouloir confier, de manière plus structurelle et structurée, la coordination et orchestration d’une stratégie numérique à un acteur bien précis, en l’occurrence le CIRB (Centre Informatique pour la Région bruxelloise). Cette (apparente) volonté ne transparaît pas côté wallon. Peut-être parce que l’AEI – l’Agence pour l’Entreprise et l’Innovation – n’a pas encore vu le jour (ce devrait être fait début 2015) et parce que le rôle et la mission de l’AWTIC (l’AWT actuelle) doivent encore être balisés. Peut-être aussi parce que les moyens alloués ou disponibles et leur calendrier seront différents de part et d’autre.
Sur ces deux points, il faudra attendre patiemment que les ministres en charge des dossiers se prononcent.
Pôles thématiques
En matière de “pôles de compétitivité”, la Région bruxelloise s’engage en fait dans une nouvelle voie puisque des “pôles territoriaux” thématiques verront le jour, venant compléter et étendre les précédentes intentions de “spécialisation intelligente”.
Le premier de ces pôles avait déjà été décidé sous la précédente législature. A savoir le pôle Communication & Image. Il est confirmé et se déploiera sur le site Reyers. Dès cette année, une “Cité des médias” y verra le jour. La mise en exploitation complète est attendue en 2020. Il sert en quelque sorte de point d’orgue à l’une des stratégies que veut développer la Région en faveur du développement de la production cinématographique et audiovisuelle. Un domaine porteur pour les membres du cluster Screen.brussels.
Ce premier pôle aura droit à un petit (ou grand?) frère, sous la forme d’un pôle de la Connaissance et du Numérique”. Nous vous en avions déjà parlé dans cet article publié récemment.
Il devrait bourgeonner dans l’axe Reyers-boulevard Général Jacques – mais il est aussi question d’un possible pôle de compétence Numérique et Nouvelles technologies dans le futur quartier Léopold III-OTAN “au regard d’une possible complémentarité avec la création de la Cité des Médias à Reyers”. Le boulevard Léopold III étant quant à lui destiné également à accueillir une “nouvelle zone de bureaux à vocation internationale”.
Emploi et entreprise
Ces pôles de compétitivité allieront potentiels de conseils, entreprises, centres de formation, unités de recherche et auront pour objectif de créer de nouveaux pools d’emploi et une attractivité nouvelle pour les investisseurs et porteurs de projet.
Le texte de la Déclaration de Politique bruxelloise, en tout cas, est clair. La volonté (annoncée) est de “tout mettre en oeuvre pour favoriser la création de sociétés et l’embauche de Bruxellois” et pour “stimuler la présence d’investisseurs étrangers”.
Les pôles de compétitivité s’inscrivent par ailleurs dans un contexte général de “poursuite de la spécialisation de l’économie bruxelloise”, notamment dans les domaines du tourisme, de l’environnement et de la santé. Mais cette spécialisation – compte tenu de moyens budgétaires ayant leurs limites – se fera de manière “sélective”. Le gouvernement annonce en effet une “sélectivité accrue des projets, en lien avec les nouveaux pôles de compétitivité”.
La nouvelle équipe gouvernementale dit par ailleurs vouloir accentuer les moyens financiers destinés aux PME et TPE via la mise en oeuvre de “packages entrepreneuriaux” de soutien, avec “mise à disposition de locaux, bourses de démarrage, accès à des crédits fiables, accompagnement personnalisé…” De même, le texte de la Déclaration de Politique Régionale parle d’“optimiser” le soutien financier au développement de sociétés innovantes issues des universités, hautes écoles et centres de recherche et de “favoriser l’accès au crédit pour la valorisation de recherche par les invests régionaux” – un nouveau point commun avec la DPR wallonne.
Il est aussi question de “simplifier le paysage administratif et institutionnel, notamment en matière de développement économique”. Le mot d’ordre: rationaliser et éviter que les “différents organismes développent leurs activités chacun dans leur coin alors que certaines de ces structures gagneraient en efficacité en fusionnant”. La DPR énumère notamment Brussels Invest & Export, Impulse.brussels, Citydev.brussels, Finance.brussels, Atrium, Innoviris…
Objectif: proposer un guichet unique de servie et de soutien. Un avis a été demandé au Conseil économique et social qui doit se prononcer avant la fin de l’année.
Compétences et enseignement
La création d’emploi et la promotion de la compétitivité des entreprises passent aussi par “le renforcement de la formation et des liens avec l’enseignement”, notamment en “développant l’investissement dans les nouvelles technologies”.
“Le Gouvernement intégrera la réflexion relative aux emplois d’avenir au coeur de sa stratégie, de même qu’il incitera et développera des plans ambitieux pluriannuels de formation, notamment aux métiers des nouvelles technologies…”
L’un des mécanismes mis en oeuvre sera celui des “Pôles de compétences emploi-formation”, où l’on retrouvera l’offre (thématique) de formation (acteurs privés et publics), du “matériel de pointe”, des outils d’identification et de validation de compétences et de sensibilisation aux métiers. L’un de ces pôles devrait être consacré à l’ICT. Tous les acteurs seront sollicités- universités, hautes écoles, écoles techniques…
Une “plate-forme”, placée notamment sous l’égide du pôle de compétitivité Connaissance et Numérique, aura pour mission de faire se développer des partenariats entre enseignement supérieur, technique et professionnel, institutions publiques et monde de l’entreprise. Des “centres de technologies avancées, ouverts à tous ces acteurs” verront le jour. Objectif: “former les jeunes à certains métiers d’avenir à haute valeur technologique”, tout en renforçant et mutualisant les ressources de recherche et de formation.
“Transition numérique”
Le CIRB est chargé de “proposer une stratégie coordonnée commune d’intégration des nouvelles technologies dans tous les champs de la vie collective: gouvernance, école, santé, services numériques des entreprises, mobilité intelligente, sécurité…”
Ce qui suppose, bien entendu, la poursuite – confirmée – du développement de l’infrastructure fibre optique et Wi-Fi. Le réseau Irisnet 2 sera “progressivement” rendu accessible aux entreprises et, dans un deuxième temps, au public (voir par ailleurs plus bas la position du nouveau gouvernement sur la problématique du 4G).
En matière de Wi-Fi, la DPR prévoit l’installation du Wi-Fi gratuit dans toutes les stations de métro et arrêts en surface.
L’Administration, elle aussi, devra poursuivre sa “transition numérique”. Sans que des détails soient apportés, le texte de la DPR bruxelloise parle de poursuite du développement de l’administration en-ligne, un déploiement qui, parallèlement, devra “s’appuyer sur les ressources libres de droits – open source”.
Un peu de tout
D’autres allusions à des projets ICT/numériques émaillent le texte de la Déclaration de Politique. On retrouve ainsi les nouvelles technologies dans les registres suivants:
– poursuite de la mise en oeuvre d’une “plate-forme de vidéo-protection dans l’espace public bruxellois, dans le respect de la vie privée” (relire l’article que nous y avions consacré)
– réseaux 4G et ondes électromagnétiques: “le Gouvernement poursuivra la mise en oeuvre de l’ordonnance 4G qui entend préserver un équilibre entre les principes de précaution visant à préserver la santé, le bien-être et le cadre de vie, et à développer des réseaux performants et accessibles garantissant l’activité économique de la Région. L’impact sur la santé de ces technologies et des antennes émettrices sera évalué de manière continue via le comité d’experts […] Cette évaluation continue permettra une mise à jour des procédures t logiciels de mesure ainsi que la révision des procédures administratives (permis d’environnement, d’urbanisme…)”
– installation, d’ici le 1er janvier 2016, de taximètres numériques dans tous les taxis bruxellois, pour autoriser les paiements électroniques
– toujours dans le domaine des taxis, la Région propose, “vu les évolutions au niveau du transport rémunéré de personnes (taxi, location avec chauffeur, développement des technologies)”, de “veiller à adapter le cadre légal vers un nouveau cadre juridique global”
– enfin, le CIRB sera chargé d’“encadrer techniquement” la stratégie globale de marketing .brussels “comme extension régionale unique”. A cet égard, le gouvernement signale d’ailleurs sa volonté de racheter les droits sur l’extension Internet .brussels.
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