Quel usage du robot dans les musées? Remplaçant des guides, compagnon d’un médiateur humain, assistant discret qui recueille les réactions du public? Ou, comme l’imaginaient des collaborateurs de la société Aldebaran, créatrice du robot Nao, lors d’un atelier organisé en 2013 à la Cité des Sciences de Paris, “curateur de réponses”, mime servant d’interprète pour les malentendants?
Permettre à des personnes ne pouvant pas se déplacer jusqu’au musée de le visiter “comme si elles y étaient” en ayant recours à des robots n’est pas encore chose courante. C’est toutefois un scénario que certains imaginent que ce soit pour servir d’avatars physiques pour des personnes à mobilité réduite ou pour visiter des musées lointains.
En France, Nao a déjà fait son apparition dans certains musées, comme au musée provençal de Château Gombert (Marseille). Voir sur YouTube une petite vidéo d’une démo préalable qui avait été faite de l’usage auquel on le destinait. Qu’on se rassure, des améliorations ont entre-temps été apportées.
Si l’objectif est de faire du robot un accompagnant, un guide pour des visiteurs qui évoluent bel et bien dans l’espace du musée, il s’agira de trouver à ces acolytes robotisés une utilité qui apporte une réelle valeur ajoutée. Comme le disait Céline Dupont de l’association Musées et Société en Wallonie: “Si c’est pour avoir un robot qui déblatère une visite guidée, ce n’est pas intéressant. Si c’est pour susciter le dialogue, ça le devient.”
Le musée la nuit
A Londres, un projet d’un genre nouveau est en train de voir le jour (il faudra toutefois encore patienter près d’un an pour en profiter). Nom du projet: “After Dark”.
L’idée: permettre aux visiteurs – virtuels, installés au chaud derrière leur écran – de déambuler de nuit dans les couloirs de musées. Pour la circonstance, les guides seront des robots spécialement conçus pour cet exercice, équipés de caméras et… de lampes-torche. Les images seront visionnées en plein écran ou sur quatre panneaux juxtaposés, présentant par exemple des angles de vue et des éclairages différents.
Pas question évidemment (évitons une cohue de robots!) de tous s’engouffrer en même temps en un même endroit avec des pôles d’intérêt divergents. Un système de file d’attente serait insaturé pour permettre à chacun de personnaliser une visite en solitaire. Une autre option serait d’organiser des visites réunissant plusieurs personnes, pouvant ainsi échanger en temps réel leurs impressions.
Le projet a remporté le premier prix du concours IK Prize 2014 organisé par la Tate Gallery.
Une petite vidéo expliquant brièvement le projet est disponible sur le site Internet du Tate.
Drones culturels
A Arles, le Museon Arlaten a imaginé faire appel à des drones pour permettre au public de continuer à visiter, virtuellement, le musée pendant les travaux de rénovation, en suivant pour ce faire la piste d’un petit jeu sérieux en réalité augmentée.
Né à l’initiative du poète Frédéric Mistral, le musée Museon Arlaten a été créé pour pérenniser la mémoire de la culture locale et évoque notamment les modes de vie des Provençaux. Ses premières collections furent celles léguées par Mistral, comptant pas moins de 35.000 objets et documents issus du quotidien provençal pré-contemporain: costumes, livres, mobilier, outils de travail, objets de culte…
Aujourd’hui, le musée est en cours de rénovation. Pour une longue durée. Neuf ans de fermeture, au moins partielle [entre 2009 et 2018], c’est évidemment fort long. La direction du musée a décidé de transformer ce handicap en possibilité. “Une occasion de s’en aller “hors les murs”, de rechercher et de toucher de nouveaux publics, d’imaginer de nouvelles médiations et thématiques. l’occasion aussi d’expérimenter, de préfigurer, quitte à rencontrer l’échec”, soulignait Céline Salvetat, responsable du service des publics au Museon, lors d’un exposé à la conférence Business to Museum & Tourism, organisée en mars dernier par l’asbl Musées et Société en Wallonie (MSW).
L’une de ces expériences a pris la forme d’un jeu en réalité augmentée.
“Vol sans effraction” (voir la vidéo sur Vimeo) proposait aux passants de découvrir le site via drone (un Parrot) et caméra interposée. Ce drone, piloté par le curieux de passage, le plongeait virtuellement dans l’espace rénové, l’invitant à en découvrir divers aspects en faisant un carton sur des cibles, elles aussi virtuelles, éparpillées dans l’espace du forum romain et qui figuraient des idées reçues que l’on se fait généralement du musée. Du genre: le musée c’est une simple brocante, c’est petit, poussiéreux, réservé à l’élite… A chaque tir réussi, une vidéo se déclenchait pour livrer des explications.
Au-delà du pur aspect ludique et récréatif et de la volonté de laisser le musée en partie accessible au public, ce jeu sérieux robotisé a aussi permis au musée de récolter quelques informations utiles sur le perçu des participants. Le jeu s’adressait en priorité aux jeunes mais des passants et curieux plus âgés y ont également participé. En fonction des cibles qu’ils choisissaient (et donc des “idées reçues” qui captaient leur attention), le musée a pu “lister les stéréotypes par catégorie d’âge”.
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