“Le développement de la télémédecine est incontournable en Belgique” en raison des défis que doit relever le pays: changements démographiques, croissance du nombre de maladies chroniques, mobilité des patients. “L’introduction de la télémédecine doit se faire progressivement et répondre prioritairement à des besoins clairement identifiés.”
En la matière, Agoria pointe divers obstacles qui entravent ce déploiement: freins à l’investissement, manque de “business model”, manque de leadership “pour faire bouger les choses”. “Il faut obtenir un accord entre les différents acteurs: INAMI, corps médical, Communautés et Régions. Cet accord n’existe pas encore.”
Pas d’e-santé sans “business model”
Aux yeux d’Agoria, une refonte en profondeur non seulement des mécanismes de financement mais aussi des mentalités sera nécessaire.
“La télémédecine (et les prestations de service du personnel soignant) n’est pas encore inscrite dans le système de tiers-payants. La Sécurité sociale, un important bénéficiaire, ne contribue pas encore au financement, si bien que le business model est déséquilibré”, peut-on lire dans le mémorandum.
Baudouin Corluy, directeur d’Agoria ICT, précise: “Le business model repose aujourd’hui sur les épaules du patient. Or, ce n’est pas lui qui bénéficie véritablement de la réduction de coûts qui pourrait être générée. Le véritable bénéficiaire, c’est l’Etat. L’usage des technologies réduit le taux d’hospitalisation et, donc, le coût final. Il manque donc sans doute un courage politique. Le corps médical freine sans doute aussi encore ne sachant pas à quelle sauce il va être mangé. Quel modèle économique impliquerait en effet un patient qui rencontrerait moins son médecin?”
Thierry Castagne, directeur d’Agoria Wallonie, abonde, lui aussi, dans ce sens: “Les résistances viennent du fait que le statut et le rôle du médecin – comme d’ailleurs celui de l’enseignant en matière d’éducation – est remis en question [par l’arrivée des nouvelles technologies]. On se dirige vers un autre enseignement, une autre médecine. Mais tant qu’on n’a pas redéfini, précisé le rôle, il y a une forme de résistance qui s’installe.”
Agoria imagine dès lors une approche selon le principe du retour sur investissement. “Les projets de l’Etat et de l’industrie doivent être partiellement préfinancés (et non pas subsidiés) de sorte que les coûts engagés soient plus facilement récupérés lors de l’exécution du projet.”
L’approche doit également se faire, selon la fédération, selon le double principe de l’opportunité et de la valeur générable. Elle recommande donc la création d’un “groupe de pilotage, composé des principaux acteurs de la télémédecine, tant aux niveaux fédéral, régional et communautaire qu’au niveau de l’industrie, en vue de mieux identifier les pathologies pour lesquelles la télémédecine peut apporter une réelle valeur ajoutée.”
A cela s’ajoute encore le principe du “meaningful use”: “les institutions de soins devraient être mesurées et graduellement recevoir des incitants en fonction des objectifs (étapes) atteints, sur base de leur bonne utilisation de l’informatique.”
Pour elle, il y a lien naturel entre retour sur investissement et meaningful use. “Il faudrait faire en sorte que les hôpitaux augmentent en efficience en fonction des résultats”, explique Baudouin Corlùy, qui cite en exemple les critères HIMMS [Healthcare Information and Management Systems Society]. “Plus les hôpitaux rencontrent ces critères, organisés en paliers, plus le ROI est au rendez-vous. Aux USA, les hôpitaux reçoivent davantage de moyens financiers en fonction des efforts qu’ils font en matière d’efficience [de processus]. Il ne s’agit donc pas de donner des subsides pour en donner. On encourage en fait, en les récompensant, les hôpitaux à poursuivre leurs efforts d’investissement en vue d’une plus grande efficience…”
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