Hackathon mobilité: les lauréats qui cachent la forêt

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Par · 07/04/2014

Deuxième hackathon “e-gov”, fin de semaine dernière à Namur. Cette fois, sur le thème de la mobilité. Organisé par Global Entreprise, en collaboration avec l’AWT, les TEC et la chaire e-gov de l’UNamur (sans oublier le Coworking Namur qui jouait les hôtes), il avait pour but d’offrir l’opportunité à des développeurs, porteurs d’idées et simples citoyens passionnés et/ou concernés, de s’appuyer sur des jeux d’open data (données mises à disposition par divers acteurs publics pour imaginer des solutions innovantes) pour “mettre au point de nouvelles applications en-ligne utiles aux usagers, contribuant à l’amélioration de la mobilité en Wallonie et s’inscrivant dans une dynamique d’ouverture et d’innovation de la part des opérateurs publics”.

13 idées furent ‘pitchées’ le vendredi. Voir plus bas pour plus de détails sur certaines d’entre elles.

Deux lauréats

Deux prix ont été décernés à l’issue du Hackathon: celui du meilleur prototype (en termes de concept abouti, d’utilisabilité, de recours à un ensemble de technologies et de jeux de données) et celui de la meilleure idée (novatrice, originale, utile, porteuse…).

Le prix du meilleur proto est revenu au projet OpenHomeChooser. Il s’agit d’une appli mobile qui permet de sélectionner, via comparaison de différents critères, l’endroit idéal pour louer une habitation ou construire sa future maison en fonction de contraintes de mobilité, non seulement par rapport aux temps de parcours vers son lieu de travail (en voiture ou via transports en commun) mais aussi par rapport aux temps et longueurs de déplacement vers d’autres endroits où l’on se rend le plus fréquemment (pour ses loisirs, ses achats, ses liens de parenté…).

Les critères de sélection peuvent être multipliés: infrastructures de desserte des diverses localités, modes de transport, qualité de l’air, périodes des déplacements… Du moins en principe car il faudra encore notamment (si le projet se poursuit) optimiser l’algorithme développé, consolider l’aptitude aux simulations et calculs sur de gros jeux (multiples) de données.

Le système développé permet en tout cas déjà de sélectionner une vingtaine de localités éligibles en fonction de deux lieux de destinations. Avec possibilité d’intégrer une pondération des choix d’implantation (selon, par exemple, que l’on accorde plus d’importance à une accessibilité aisée à tel ou tel lieu de destination) pour affiner ou comparer les choix possibles.

Penser aux moins mobiles

Le prix de la meilleure idée a été décerné au projet “Charge d’âme”. Il s’agit d’une appli mobile (développée pour iOS et Android) qui vise à faciliter la vie – mobilité et déplacements – de personnes à mobilité réduite (PMR). Non seulement des personnes handicapées mais aussi, potentiellement, des personnes âgées, des mamans avec poussettes…

L’appli identifie, avec géoréférencement et codage couleurs, les endroits où ces personnes désirent se rendre (multiples catégories: magasins, bâtiments publics, stations de taxi, restaurants…), s’ils disposent d’aménagements ou services pour PMR. Un bouton de l’appli permet de filtrer les lieux de destination (de quoi faciliter leur visualisation). Un autre permettra (à terme) de sélectionner les lieux et leur degré d’accessibilité en fonction du type de handicap.

Les bases de données répertoriant les sites “PMR-friendly” sont encore rares. Le projet wallon Gamah apporte un petit bout de réponse. “Charge d’âme” veut aller beaucoup plus loin.

Deuxième catégorie d’informations identifiées: la présence, à proximité du lieu où se trouve la personne ou de son lieu de destination, d’une personne pouvant éventuellement lui porter assistance. L’appli comporte à cet égard un bouton qui permet d’envoyer un message d’appel à assistance (via téléphone ou SMS, par exemple) à un “bon samaritain” se trouvant dans le bon rayon d’action. Qu’il s’agisse d’un simple particulier qui figurerait dans la base de données centrale ou d’une personne dont c’est le rôle (par exemple, au sein des services de transport en commun, d’une administration ou d’une commune).

L’appli permettra à des personnes de s’enregistrer comme “bon samaritain” dans la base de données, avec coordonnées et précisions sur ses conditions de disponibilité.

L’idée a été récompensée pour son caractère social, son intérêt dans une perspective de mobilité, et aussi le fait qu’elle se veut très participative. Non seulement en termes de maillage social mais aussi en termes de réalisation. Le repérage des lieux aisément accessibles aux PMR reposera en effet en bonne partie sur la contribution de tous. Aucune base ne répertorie en effet le degré d’accessibilité des bâtiments (certaines listes existent mais sont partielles et fragmentées). L’appli, elle, veut aussi permettre à quiconque l’a téléchargée d’introduire et de définir un lieu jugé “PMR-friendly” (création d’un marqueur géoréférencé, avec codage couleurs et caractéristiques).

Mini”-hackathon

Ce hackathon était légèrement plus modeste (en ampleur et en sponsoring) que le précédent. Il a en fait mis sur pied en mode “100% entrepreneurial, sans subsides”, soulignent les organisateurs. Avec un nombre de sponsors quelque peu réduit par rapport à la première édition. Résultat: une vingtaine de développeurs s’étaient inscrits, soit pour présenter des idées de projets, soit pour prêter main forte à leur mise sur les rails. Assistance réduite, donc, mais dont les organisateurs se disaient malgré tout satisfaits, au vu des conditions d’organisation (“light & speed”).

L’événement était aussi plus modeste en fonction de sa durée: environ 34 heures au lieu des 48 ou 54 habituelles. Si l’expérience fut concluante en termes d’applis imaginées (trois des projets ont atteint des stades de réalisation appréciables), les organisateurs en ont toutefois retiré comme enseignement que la formule était sans doute, malgré tout, trop courte pour la plupart des participants. Trop court pour réaliser des prototypes robustes et pour identifier et travailler sur suffisamment de jeux de données. Le fait de ne pouvoir aller jusqu’au bout de l’idée en a d’ailleurs découragé plusieurs en cours de chemin.

Développeurs et simples citoyens engagés, réunis le temps d’un week-end (et plus si affinités) pour imaginer une autre vie pour les données publiques…

Pour d’éventuelles futures éditions, une réflexion sera donc nécessaire en termes de méthodes: promouvoir davantage la soumission préalable d’idées de projets, faire s’impliquer des participants aux profils plus variés, attirer éventuellement davantage d’équipes ou de personnes venant d’entreprises (et pas uniquement de “simples” passionnés et des étudiants).

Sur le fond, le constat demeure que les jeux de données ouvertes sont rares. Trop rares. Et même lorsque des services publics (encore trop peu nombreux et trop timides) acceptent de les mettre à disposition, ils sont parfois quasi inexploitables (problème de format, voire de qualité des données).

Développer une appli efficace et réellement utile, en particulier sur le thème de la mobilité et de la multi-modalité, demeure donc une gageure.

Autre regret: un manque de participants au Hackathon. Manque d’intérêt sur le principe-même? De visibilité de l’événement? Désintérêt du monde de l’entreprise et des pouvoirs publics? Manque de buzz et de volonté politique? “Un peu de tout” sans doute. Sur quoi il faudra donc encore travailler…

13 idées en piste

13 idées furent ‘pitchées’ le vendredi. Il avait été convenu d’en retenir une demi-douzaine qui pourraient mijoter et devenir prototype au cours des quelque 34 heures réservées à l’exercice.

Outre les deux lauréats, les idées sur lesquelles des équipes de 2 à 5 hackathoniens se sont penchées sont les suivantes:

– Eco-lier: application permettant de déterminer les différents modes de déplacement (à pied, à vélo, en transports en commun…) qui s’offrent à un écolier pour l’amener à son école; le calcul imaginé se basait essentiellement sur le temps de parcours; fonctions possibles proposées: comparaison des temps de parcours entre copains

Arduilo (*): une idée de plate-forme basée sur un module Arduino équipé d’un GPS. Objectif: permettre au citoyen-cycliste de récolter des données sur la qualité des pistes cyclables (d’autres scénarios sont évidemment possibles), de les géoréférencer en temps réel avec identification du problème constaté. Une sorte de mouture Voies lentes des applis du genre Fix My Street ou BetterStreet. L’optique technologique prise était celle des modules Arduilo, qui seraient ainsi sollicités pour offrir une solution économique aux habituels smartphones

(*) Il ne s’agit pas d’une faute de frappe de notre part mais bien d’une orthographe qui est le fruit d’une contraction entre Arduino et vélo.

– BeRoads: la solution BeRoads existe déjà depuis quelques années. Elle s’appuie sur une API libre qui permet de collecter et distribuer les informations concernant les infos trafic en Belgique au départ de plusieurs sources (Mobiris, police fédérale, Trafiroutes, Verkeerscentrum…). Outre le fait que la solution collationne et agrège ces données, elle a pour principal avantage d’être optimisée pour équipements mobiles.

En participant au Hackathon namurois, BeRoads voulait explorer la possibilité de compléter les jeux de données sur lesquels s’appuie la solution ainsi que déterminer si un accord pouvait être envisagé avec la DGO1 (direction générale opérationnelle Trafic & Bâtiments, responsable notamment de la gestion du réseau autoroutier wallon)

– une appli permettant d’identifier et de géolocaliser le parking de délestage qui soit la meilleure solution possible, en termes de temps de parcours par rapport à l’endroit où l’on se situe; l’appli envisageait de s’enrichir de fonctionnalités supplémentaires telles que sélection pondérée en fonction du tarif pratique, de la proximité de transports en commun, d’heures d’ouverture.

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