Trois jeunes étudiants, aux profils variés (sciences économiques et commerciales, affaires européennes, sciences politiques, sociologie) planchent actuellement sur un projet de “job board” destiné spécifiquement aux jeunes en quête de stages et/ou de premier emploi. Et ce, à l’échelle européenne. Deux objectifs: permettre aux jeunes de trouver des stages dans n’importe quel pays de l’Union mais aussi et surtout tenter de faire émerger les meilleurs pourvoyeurs de stages.
Haro sur les mauvais stages
“Nous voulons changer la culture des stages”, déclare Régis Pradal, l’un des membres du trio. “Notre site d’emploi permettra d’évaluer la qualité des stages et donnera une bonne visibilité à ceux qui recueillent les meilleures cotations de la part des stagiaires eux-mêmes. Cela permettra d’identifier les “bons” employeurs, ceux qui permettent aux jeunes de faire des stages intéressants, au cours desquels ils apprennent réellement quelque chose, auprès d’employeurs qui les encadrent et forment.”
C’est potentiellement du win-win, estime Régis Pradal: les jeunes peuvent mieux identifier les sociétés aptes à leur procurer l’expérience dont ils ont besoin pour postuler utilement par la suite et les “bons employeurs” y gagnent une réputation et dès lors un potentiel non négligeable pour attirer les meilleurs talents.
Non seulement InternsGoPro se propose de mettre en exergue les “bons” mais compte aussi faire oeuvre utile en pointant du doigt les employeurs dont les pratiques de stage sont douteuses, déplorables voire carrément illégales (du genre, stagiaires sous-payés).
Très international puisqu’il est composé d’un Belge, Pierre-Julien Bosser, d’un Français, régis Pradal, et d’un Italo-Allemand, Nicholas Wenzel), le trio espère apporter sa petite pierre à la professionnalisation des stages: “Alors que le principe de stage devient obligatoire, il n’existe encore aucune législation européenne, aucune liste de droits, aucune protection pour les stagiaires. Et si un début de cadre européen se fait jour, les différences demeurent entre les pays…”
Régis Pradal: “Il y a là un cercle vicieux à briser: les jeunes se retrouvent souvent dans des stages où ils n’apprennent rien. Ils n’y gagnent donc aucune expérience et n’ont aucune chance de convaincre un futur employeur.”
Le trio a commencé à nouer des contacts avec les milieux publics, voire politiques. Espérant en faire un relais et un support pour l’initiative. Quelques parlementaires européens auraient déjà prêté une oreille attentive. Tout comme – à titre personnel – un collaborateur du cabinet Onkelinx. InternsGoPro compte bien continuer à solliciter les pouvoirs publics- européens, nationaux et régionaux. “Le soutien du politique est nécessaire pour faire bouger les choses, pour montrer que c’est possible de les faire évoluer, pour pousser les moins bons employeurs à modifier leurs pratiques…”
La cible
InternsGoPro ambitionne de se positionner comme plate-forme européenne, où les jeunes de toutes nationalités puissent trouver des stages intéressants dans tous les pays. La cible première est donc la masse des jeunes “mobiles”, par exemple ceux qui participent aux programmes Erasmus. Tel qu’ils l’ont imaginé, le projet vise aussi en priorité les grandes entreprises. Toutefois, le jury du MIC Boostcamp a conseillé aux trois porteurs de projet de ne pas se limiter à cette clientèle possible: “Ne vous limitez pas aux seules grandes sociétés. C’est certes intéressant de pouvoir aligner quelques grands noms mais les PME sont aussi des utilisatrices potentiellement intéressées.”
Label
Pour épingler bons et mauvais pourvoyeurs de stages, InternsGoPro s’appuiera largement sur le concept social, le pouvoir potentiel de la communauté. Les cotations données par les stagiaires permettront aux bons employeurs de se voir décerner un label de qualité, soit pour certains pans d’activités, soit pour l’ensemble de la société.
Les critères d’évaluation que les stagiaires utiliseront pour évaluer la qualité de leur stage et de l’employeur sont empruntés à la Charte européenne pour la qualité des stages et des apprentissages. Parmi ces critères: existence d’un contrat, rémunération décentes, tâches en correspondance avec l’apprentissage concerné…
Confidentialité assurée
L’une des règles que la (potentielle) future start-up compte respecter est celle de l’anonymat des cotations données par les stagiaires. “Les évaluations seront publiques mais anonymes.” Et ce, afin d’éviter les retours de flamme pour les stagiaires. Pour que l’origine d’une évaluation ne puisse être “tracée”, un stagiaire pourra demander que son commentaire n’apparaisse pas sur la plate-forme si elle ne fait pas partie d’un lot d’évaluations.
Pour garantir, par contre, l’honnêteté des évaluations, les stagiaires devront obligatoirement ouvrir un compte reprenant toutes leurs coordonnées. Mais ces données ne seront accessibles qu’aux seuls administrateurs du site.
Modèle business
Le scénario de monétisation d’InternsGoPro n’est pas encore totalement défini mais l’idée est d’offrir la gratuité aux jeunes recherchant des stages ou un premier emploi, de permettre aux employeurs de poster gratuitement les stages proposés mais de les faire payer certains services et avantages.
D’une part, l’octroi du label serait payant. Ou, du moins, monnayé. Risque de perte de crédibilité? Régis Pradal s’en défend: “Le label, de toute façon, ne sera octroyé que si l’entreprise récolte suffisamment de bonnes évaluations, en accord avec les critères de la Charte de qualité européenne. Elle doit s’engager à les respecter. Mais le label lui apportant une visibilité et étant en fait une récompense, il sera payant. Et valable un an.”
Les annonces de stages par les entreprises seront gratuites mais, par contre, celles d’emplois (premiers emplois pour jeunes), elles, seront payantes.
Autres sources de monétisation potentielle pour le projet: un volet Premium. Les entreprises devraient payer l’accès à des filtres pour sélectionner des CV, pour pouvoir publier davantage de détails sur elles-mêmes, pour publier des publicités ciblées, des annonces spécifiques pour profils bien précis…
Prochaines étapes
Hormis la promotion du concept proprement dit, auprès d’associations de jeunes ou encore des sphères publiques, InternsGoPro compte franchir plusieurs étapes à court terme: constitution d’une structure juridique (selon le principe d’une entreprise sociale), tournée européenne des universités pour recueillir du soutien et des “membres” pour la communauté, recherche de sponsors “parmi des sociétés de qualité”, appel à des dons publics pour lancer la plate-forme (un appel à crowdfunding devrait intervenir d’ici la fin de l’année). “Pour le développement de la plate-forme, nous avons besoin de 15 à 20.000 euros. Plus sans doute 40.000 euros pour la promotion, le marketing…”, déclare Régis Pradal.
Le projet InternsGoPro a décroché le Prix de la Région Bruxelles-Capitale lors de la 4ème édition du MIC Brussels Boostcamp (voir les autres lauréats).
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