NRB a ceci de particulier que la société concentre actuellement trois espaces de datacentres dans un même périmètre (les distances entre les 3 centres se mesurent en dizaines de mètres). Le site? Celui des Hauts-Sarts près de Liège. S’y ajoute encore un espace qu’elle occupe à plus longue distance (environ 30 kilomètres), à Villers-le-Bouillet. A savoir un espace loué au WDC (Wallonia Data Center). Ce qui lui permet de répondre aux exigences de clients bancaires, par exemple.
Cette concentration d’infocentres sur un même site s’explique par des raisons historiques, les législations et exigences d’un passé un peu lointain déjà n’imposant pas de distances minimales (se chiffrant parfois en dizaines de kilomètres pour des raisons de sécurité et, donc, de restauration après désastre majeur).
Les choses pourraient évoluer à l’avenir. Dès que les sites actuels viendront à saturation, NRB prévoit en effet d’inaugurer un nouvel infocentre situé à distance. Le projet en a été décidé mais aucun site d’implantation n’a encore été choisi. Les critères de choix seront multiples- et classiques: espace au sol, coût du terrain, puissance électrique disponible, accès aux réseaux de télécommunications haut débit, possibilité de solliciter deux fournisseurs de fibre noire “de quoi garantir la redondance et donc la fiabilité des connexions”…
L’implantation devrait en princie se faire quelque part le long d’un des trois axes autoroutiers qui mènent respectivement vers Bruxelles, vers Anvers et vers Namur. Le futur site pourrait donc se situer aussi bien en Wallonie, en Flandre ou en région bruxelloise (même si cette dernière offre désormais peu de perspectives en termes de puissance électrique encore livrable pour ce genre de projet).
Scénario possible (mais non confirmé): un investissement qui ne serait pas fait en solo mais plutôt en partenariat. Un certain voisin liégeois pourrait y trouver sa place (entre autres scénarios possibles).
Pas de saturation
Le besoin de bâtir un nouvel infocentre ne se fait pas immédiatement sentir, souligne Peter Hellemans, directeur Managed Operations chez NRB. Les salles actuelles ne sont pas à saturation. A l’exception du datacenter le plus ancien (600 m²) qui, d’ailleurs, en raison de son âge, n’accueille plus que des systèmes technologiquement un rien désuets.
Les deux autres infocentres (400 m² chacun) ne sont encore occupés qu’à 50%. Ils opèrent en miroir l’un de l’autre, en mode actif-actif. La plupart des clients, vu le côté critique des applications gérées- par exemple, de l’ERP- bénéficient de ce fonctionnement en duo. Pour optimiser les performances de ces deux espaces, NRB maintient un maximum de cohérence systèmes et structure l’espace en zones isolées, plus faciles à optimiser, en termes énergétiques. Voir également notre encadré.
Tout nouvel investissement dans un nouveau site n’interviendra que lorsqu’un seuil spécifique de saturation sera atteint. “Notre philosophie est d’investir quand le besoin se fait réellement sentir et en phases de telle sorte à investir dans les technologies les plus modernes.”
Outre le critère de la saturation physique, un autre indicateur est celui de la saturation de la puissance électrique. “Or, nous n’utilisons encore que 60% de la puissance maximale qui, pour l’ensemble du campus, est de 4 kWh. Nous avons donc encore de quoi accueillir des clients, et même un gros client.”
“Le marché demande désormais du “Tier III minimum”. Nous avons donc amélioré les capacités Tier III en y ajoutant quelques potentiels de type Tier IV.”
Si un nouvel infocentre devait être construit, il pourrait aussi permettre de décommissionner l’infocentre le plus ancien. Surface envisagée pour ce futur site: “de 300 à 500 m² utiles dans un premier temps, avec possibilité de monter jusqu’à 2.000 m².”
Il s’agira en tout cas d’un infocentre Tier III+ à PUE optimisé “sans doute avec un PUE de 1.35, peut-être 1.3. Pour pousser plus loin, jusqu’au 1.2”, précise Peter Hellemans, “il faudrait utiliser des technologies plus évoluées, qui ne sont pas validées, plus onéreuses et/ou qui ne bénéficient pas d’un support local. Autant d’obstacles, à nos yeux. Le tout est toujours de trouver le juste point d’équilibre entre PUE et hauteur de l’investissement…”
Confirmation par la bouche de Thierry Engels, conseiller technique Datacenter chez NRB: “Nos infocentres dépassent les spécifications TIER III dans la mesure où l’ensemble des infrastructures critiques sont redondantes et où notre gestion technique centralisée est capable de détecter et d’isoler un élément en cas de défaillance. Nous n’atteignons cependant pas l’ensemble des spécifications Tier IV. La raison en est le coût exorbitant de mise en œuvre de l’ensemble de ces spécifications qui ne se justifie pas dans le cadre de notre business. Nous préférons de loin proposer à nos clients une solution “géo-résiliente” [duplication de sites] qui répond à la fois à la problématique de disponibilité de la solution IT end-to-end et de ségrégation des risques (de désastre). C’est exactement ce que propose Google dans ses data centers, à une échelle mondiale. Je qualifie donc nos infocentres de “Tier III+”, même si cette nomenclature n’est pas reconnue par l’Uptime Institute.”
A noter que le futur infocentre éventuel s’alignera sur les exigences et directives les plus récentes en termes de consommation énergétique (ISO 14000, European Code of Conduct…).
Stratégie de “valeur ajoutée”
“Notre stratégie est celle d’une offre de services et de prestations qui vient s’appuyer sur l’offre d’un espace d’hébergement. Il ne s’agit donc pas d’une stratégie de colocation (housing). Nous acceptons certes des dossiers de housing”, déclare Peter Hellemans, “mais uniquement si cela peut évoluer vers du cloud ou des services gérés.” L’approche peut donc être progressive. Dans un premier temps, le client peut se contenter de placer simplement ses propres serveurs ou d’exploiter des serveurs virtualisés appartenant à NRB dans l’infocentre de la société liégeoise.
Peter Hellemans (NRB): “Nous acceptons des dossiers de housing mais uniquement si cela peut évoluer vers du cloud ou des services gérés.
“Il peut continuer à utiliser les équipements qu’il n’a pas encore totalement amortis tout en commençant déjà à utiliser des ressources partagés, fournies par NRB. Il continue de les gérer lui-même mais réalise des économies en gestion et coûts, bénéficie de technologies plus avancées… Plus tard, il peut évoluer vers un environnement partagé, vers du pay as you use.”
NRB compte donc essentiellement s’appuyer sur ses infocentres pour proposer des services gérés (ERP, bases de données, serveurs, téléphonie, gestion réseau…) et également des offres SaaS, notamment dans le domaine des applications mobiles.
Et de poursuivre: “nous investissons afin de nous différencier des offres de type public cloud. Notre but n’est pas de devenir le futur Amazon, nous n’aurions d’ailleurs pas les moyens. Nous nous positionnons clairement dans l’axe cloud privé”, pour tous ces clients qui par obligation (légale notamment) ou par choix, décident de maintenir leurs données et leurs systèmes sur le sol belge.”
NRB dit également vouloir se positionner en “cloud broker”. Un terme qui, dans son vocabulaire, fait référence au fait que le client pourrait diversifier les prestataires auxquels il s’adresse, potentiellement en chargeant NRB de jouer les intermédiaires. Mais la nature exacte du rôle que la société pourrait jouer en la matière n’a pas encore été déterminée.
“Un client pourrait par exemple gérer son environnement de développement, test et validation sur un cloud public alors que l’environnement de production tournerait dans un cloud privé. Autre exemple: utiliser Microsoft Office 365 dans un cloud public et des systèmes critiques dans notre data center. Ce rôle de “cloud broker” est encore en phase d’élaboration. Les rôles et responsabilités exacts n’ont pas encore été totalement définis dans la mesure où le modèle et l»écosystème sont encore en pleine évolution. Une chose, toutefois, est d’ores et déjà claire: NRB est intéressé à devenir le “single point of contact” pour ses clients, que l’environnement soit basée sur les équipements du client, sur notre cloud privé ou sur le cloud public.”
Peter Hellemans (NRB): “PRISM agit comme un élément de réflexion supplémentaire, dans le chef des entreprises. Mais il n’a pas encore eu d’impact sur la formulation des contrats ou sur les exigences posées en termes de garantie.”
La clientèle de l’infocentre de RB est à l’image de celle de la société en général: acteurs du secteur public (niveaux régional, provincial et communal- en précisant toutefois que les clients communaux hébergés sont essentiellement flamands), établissements financiers (banques et assurances, parmi lesquels Ethias, Optima et P&V) et des industriels (en ce compris dans le secteur des services d’utilité publique: Magotteaux, Tecteo, Cile, EDF Luminus, Eneco…). Côté secteur public, citons le SPW, l’ETNIC, la Province de Liège ou encore le CHR de la Citadelle (Liège).
Les atouts d’un prestataire local
En comparaison des données et applications non critiques qui peuvent se contenter d’un scénario de type cloud public (avec notamment des données qui se baladent un peu partout sur la planète, sans contrôle possible de la part du client), “choisir un hébergement en Belgique peut avoir un coût supplémentaire mais apporte aussi un certain nombre d’avantages: garantie que les données restent en Belgique, possibilité de procéder à un audit, voire être en mesure de se rendre sur le site d’éherbegement… On relève parfois dans certains contrats ou cahiers de charge des clauses indiquant que le client doit avoir la possibilité de se rendre sur place en moins de 3 ou 4 heures en partant de Bruxelles… Autre exemple: la possibilité pour le client de dialoguer directement avec un ingénieur qui identifiera le problème et sa source: réseau de télécommunication, équipement ou procédure relevant de l’infocentre, défaillance de l’application…”
Sous-entendu: essayez toujours de demander ce genre de chose à un prestataire lointain, surtout s’il opère selon les principes du cloud public… “Un bon point de repère est de vérifier si le client a la possibilité de parler directement au directeur, au directeur opérationnel, à un ingénieur…”
“En s’adressant à un infocentre local, une PME, par exemple, a un poids vis-à-vis de son prestataire”, là où elle est quantité négligeable et inaudible pour un fournisseur de cloud public (voire même un géant étranger). Ce qui ne veut par contre pas dire que les différents acteurs locaux- qu’il s’agisse d’un NRB ou d’un autre- s’adressent forcément à toutes les catégories et tailles de PME. Souvent une envergure minimale est requise pour qu’un client potentiel soit pris en considération… L’effet d’échelle et la perspective de rentabilisation des prestations jouent également dans leurs calculs.
“Le cloud public a aussi ses limites”, poursuit Peter Hellemans. “Par exemple, pour des charges de traitement à forte complexité et criticité- ERP, gestion de bases de données, gestion de très gros volumes de données sur des disques haute vitesse…-, ou pour une fonctionnalité, de plus en plus demandée, qui est celle de l’advanced analytics en temps réel. Passer par Internet implique parfois des lenteurs et latences inacceptables. Or, le client a besoin d’un SLA clair et précis. Du public cloud ne fonctionne que selon le principe du best effort…”
La pression du cloud public
Un argument, par contre, qui a priori joue en faveur des clouds publics est celui des tarifs appliqués et de la facilité avec laquelle il est possible de réserver et de payer des ressources mises à disposition. Face à l’effet d’échelle sur lequel les prestataires de cloud public peuvent jouer pour proposer des prix plus intéressants, un acteur local tel NRB se doit malgré tout de rester concurrentiel. “Il nous faut donc sans cesse investir pour optimiser nos propres performances.” A commencer par les performances techniques et énergétiques du datacenter lui-même.
Toute la difficulté est de justifier la différence de prix pour le client, “faire en sorte que le différentiel de prix ne soit pas trop important et pousse le client à choisir une solution de cloud public.”
Face aux formules aisées d’achat de ressources que proposent les prestataires de cloud public, un opérateur d’infocentre proposant du cloud privé doit en outre insérer un maximum de flexibilité opérationnelle et contractuelle dans sa manière d’opérer. “Notamment une grande réactivité pour la mise à disposition de nouveaux serveurs. Dans les deux jours, par exemple. La seule limitation est en fait le nombre de serveurs qu’un même ingénieur peut gérer… Ce qui, une fois encore, implique des investissements, dans des outils de gestion ou dans des infrastructures convergées. (voir notre article Concepts et références)
La justification d’un tarif plus important peut également venir de solutions plus spécifiques ou spécialisées. Le scénario est à l’étude par exemple chez NRB. Mais des investissements, par exemple dans des solutions “purpose built”, telles un ExaData d’Oracle (simple exemple) qui servirait pour des solutions d’analytique évolué, “n’interviendront qu’à condition que les volumes concernées et la demande des clients soient suffisamment importants. Cela nous permettrait alors d’offrir un levier pour un ou plusieurs clients.”
Tous les équipements sont soigneusement dédoublés: connectivité télécom (plus d’une dizaine de fournisseurs desservent le site), arrivées de puissance énergétique, générateurs sur chaque ligne, UPS, groupes de refroidissement… jusqu’aux pompes à eau qui sont chargées d’entrer en action en cas d’infiltration d’eau.
Le système de refroidissement des salles repose sur des techniques de climatisation par air: une partie en free chilling (utilisation de l’air extérieur s’il ne dépasse pas 15°C), une partie par injection d’air froid par circuit interne, l’air étant refroidi par des circuits d’eau froide situés en dehors des salles. Le recours à une technologie de refroidissement par eau des systèmes n’est pas exclu, en théorie, mais n’est pas envisagé dans l’état actuel des choses.
Des adaptations seront probablement nécessaire “lorsque la demande d’un potentiel HPC-High Performance Computing se dessinera en Wallonie, mais ce n’est pas encore le cas”, déclare Peter Hellemans. “Toutefois, nous restons aux aguets, prêts à investir si nécessaire.” Retour au texte.
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