Vincenzo Ruggiero, fondateur de l’agence Web Pepper & Koffee (rachetée entre-temps par Belighted) a continué, ces dernières années, d’initier divers projets et start-ups. Exemples: Shopigram, plate-forme d’e-commerce pour commerces de proximité, ou, plus récemment, Postpone, une appli mobile de gestion de listes de tâches.
Dès le lancement de Shopigram, alors que le projet s’adresse aux commerces locaux, son “modèle” d’expansion était de viser rapidement l’international. D’aller chercher dans les grandes zones urbaines la possibilité de reproduire le concept plutôt que de le reproduire dans chaque ville, village et patelin de Belgique.
Intéressant dès lors de lui demander comment il perçoit le besoin ou l’opportunité de s’expatrier. Qu’il s’agisse de lui-même ou de son projet.
Régional-IT: Pour quelles raisons envisageriez-vous de vous expatrier?
Vincenzo Ruggiero: Essentiellement car j’ai l’impression que ce n’est pas ici que cela se passe. Les investisseurs ne sont pas ici, le marché n’est pas ici. Tout simplement.
Il suffit de se rendre à Londres pour se rendre compte à quel point les principaux acteurs de l’éco-système start-ups (presse, investisseurs, entrepreneurs, …) sont actifs. Même si beaucoup d’initiatives voient le jour en Belgique, je pense qu’on ne sera jamais à la hauteur. Malgré tout le talent qui existe en Belgique, nous n’attirons pas l’attention, voilà tout. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas possible d’entreprendre en Belgique, bien au contraire. Mais les secteurs ainsi que les marchés disponibles ne m’attirent plus du tout (B2B, service…).
Quelle serait votre destination et pourquoi?
San Francisco m’attire beaucoup. Autant pour les aspects purement professionnels que pour des raisons très personnelles (climat, ambiance, histoire…). Israël est également un pays que j’aimerais visiter pour me faire une opinion.
Quels sont les obstacles, freins, difficultés, carences qui vous semblent insurmontables en Belgique?
C’est une question difficile, vraiment. Naïvement, on pourrait dire que notre pression fiscale est trop forte. Mais dans mon secteur, engager un employé aux Etats-Unis est bien plus coûteux que de le faire en Belgique. Je crois que ce qu’il manque réellement en Belgique, et plus généralement en Europe, c’est une véritable mentalité entrepreunariale.
Vincenzo Ruggiero: “la Belgique aurait besoin d’un organe qui mette tout en oeuvre pour conserver ses talents. Ça me fait mal de voir autant de gens talentueux quitter notre pays pour créer de la valeur ailleurs. Quel gâchis…”
Ça va être cliché une nouvelle fois mais nous (entrepreneurs) sommes très mal perçus. Autant par les politiques que par la population de manière générale. Ce n’est pas toujours évident de garder une motivation au plus haut niveau quand on ne se sent pas soutenu, pas compris. Je crois que c’est vraiment mon état d’esprit aujourd’hui: « Vous ne voulez pas de moi? Vous ne voulez pas que j’entreprenne ici, en Belgique? Vous ne comprenez pas tout ce que cela peut apporter à la société? Et bien, dans ce cas, je vais aller là où je serai entendu, soutenu et compris! »
Qu’espérez-vous trouver, ou que savez-vous avec certitude pourvoir trouver, dans votre terre d’accueil que vous n’auriez jamais trouvé en Belgique, en Wallonie?
Du soutien et des encouragements dans ma démarche entrepreneuriale. Un éco-système, un réseau et du financement qui donneront à mes idées et à mon expertise toutes ses chances. Je crois qu’on peut résumer toutes mes attentes avec cette notion de “Pay it forward”…
Pour quelles raisons précises conseilleriez-vous à des start-ups ou à des entrepreneurs de s’expatrier?
Si elles souhaitent se lancer sur le marché C2C. Si elles souhaitent pouvoir lever des fonds sans forcément avoir de revenus. Si elles souhaitent pouvoir lever suffisamment de fonds.
Et pour ce qui est de chercher d’abord à s’établir à l’international avant de tenter leur chance sur le marché local?
Tout simplement parce que notre marché local est minuscule. Même le marché européen est trop fragmenté.
Quelles aides (financières, conseils, support) avez-vous trouvées en Belgique pour votre quête internationale?
L’AWEX et l’ABE semblent être assez disponibles et pro-actifs.
Quels appuis, aides etc. n’avez-vous par contre pas trouvés et conseilleriez-vous de voir mis en oeuvre?
J’ai pris l’habitude de ne pas compter sur les structures et les aides de l’Etat pour avancer dans mes projets. J’associe cela à de l’assistanat. On dit: “Donne un poisson à un homme et il aura à manger pour un jour, apprends-lui à pêcher et il mangera toute sa vie”. Voilà qui résume assez bien le souci dans toutes les aides, primes, incitants de l’Etat. A mon sens, la Belgique aurait besoin d’un organe qui mette tout en oeuvre pour conserver ses talents. Ça me fait mal de voir autant de gens talentueux quitter notre pays pour créer de la valeur ailleurs. Quel gâchis…
Combien de temps vous voyez-vous rester expatriés? est-ce un départ définitif, stratégique, tactique, une étape indispensable avant un retour et/ou pour gagner la stature que vous ambitionnez?
Non, pas un départ définitif. Actuellement, je suis complètement tiraillé entre le fait de vouloir partir pour toutes ces raisons professionnelles et les difficultés que cela engendrerait au niveau familial. Si départ il y a, il ne sera pas définitif.
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