Intuitim est une jeune spin-off de l’UCL (voir notre encadré ci-dessous), portée sur les fonts baptismaux en novembre 2012. La société, créée par Vincent Nicolas, chercheur analyste/programmeur au sein du laboratoire de Télécommunications et Télédétection de l’UCL, et François-Xavier Despret, se donne pour objectif de commercialiser les résultats de travaux de recherche menés pendant 3 ans au sein du laboratoire ICTeam (Information and Communication Technologies, Electronics and Applied Mathematics) de la Faculté des sciences appliquées.
Le projet de recherche a tout d’abord débouché sur la création de la solution Mammo-Note, une application d’annotation normalisée de mammographie, permettant au médecin d’apporter remarques et commentaires en les indiquant simplement, via annotation manuelle à l’écran, en recourant à une codification normalisée, reconnue internationalement (BI-RADS). Selon le type de lésion, le système déclenche des menus contextuels, permettant au spécialiste de documenter son diagnostic en sélectionnant les paramètres et indications dans les menus préparamétrés. Le diagnostic se construit ainsi visuellement, par marquages standardisés, sans qu’il doive enregistrer ses commentaires ou prendre de notes. Et, dès lors, sans réencodage.
Les débuts d’Intuitim
Intuitim a vu le jour en 2012, en tant que spin-off de la faculté des sciences appliquées de l’UCL, en bénéficiant d’une aide financière d’Innoviris.
Objectif: “apporter une aide par l’annotation standardisée et structurée des mammographies numériques, dans le cadre du programme de dépistage du cancer du sein”.
Le premier produit commercialisé est le logiciel MammoNote, fruit du projet de recherche en imagerie médicale mené par Vincent Nicolas au sein du labo TELE (Télécommunications et Télédétection) de l’UCL.
MammoNote permet aux médecins de procéder, via écran tactile, à des annotations normalisées de mammographies, en recourant à des annotations normées (thésaurus de caractérisations de lésions BI-RADS). Les annotations remplacent les prises de notes (textuelles ou audio). Ce recours à des icones et symboles normés présente l’avantage de rendre les annotations compréhensibles par tout spécialiste, quel que soit sa langue. Un élément qui a inspiré une idée à trois étudiants de l’UCL (voir le corps de l’article).
Après avoir bénéficié pendant un an des fonds d’Innoviris, la jeune société se met aujourd’hui en quête de nouveaux moyens financiers. Dans un premier temps, un dossier a été déposé en vue d’obtenir un financement public (auprès de la Région bruxelloise). Dans un second temps, sans doute avant la fin de l’année, Intuitim s’adressera sans doute à des business angels. Mais pas avant d’avoir signé quelques premiers contrats, histoire de documenter l’intérêt de sa solution.
A l’origine, la solution de Vincent Nicolas exigeait l’utilisation d’un écran spécifique et d’un stylet. Pour transformer le projet en activité commerciale et spin-off, appel a été fait à François-Xavier Despret, patron de 3GSP, qui fut donc embrigadé comme business developer et pour aider le chercheur à définir un plan commercial. L’idée de départ a dès lors été adaptée de telle sorte à ne plus requérir d’équipement spécifique (lié à la sénologie).
Désormais de simples terminaux tactiles pourront être utilisés et la solution, au lieu d’être obligatoirement installée sur un serveur local, pourra être hébergée et gérée dans un cloud dédié privé. “Cela permettra à plusieurs hôpitaux, opérant par exemple dans une même région, d’accéder à la solution et de partager cette plate-forme applicative, baptisée Medical Studio”, indique François-Xavier Despret. “Outre une utilisation pour diagnostic sur mammographies, d’autres spécialités seront ajoutées- par exemple, pour des diagnostics d’embolie pulmonaire-, à condition que l’on puisse s’appuyer sur marquages standardisés. Pour rendre les activités d’Intuitim économiquement viables, il sera nécessaire de proposer de multiplier les applications potentielles.”
Des développements futurs viseront dès lors à couvrir d’autres disciplines médicales, à définir des thésaurus d’annotation supplémentaires et à enrichir les techniques d’annotation. Une étude d’opportunité est actuellement en cours avec divers hôpitaux en vue d’identifier les types de diagnostic les plus “porteurs”.
Pour être intéressante, aux yeux du monde médical, et viable en tant que telle, Intuitim devra viser l’international.
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Télédiagnostic
C’est dans cette perspective d’internationalisation que se situe le projet de trois étudiants de l’UCL (1) qui, pour les besoins de leur mémoire, réalisé dans le cadre du programme CPME (formation interdisciplinaire en création d’entreprise), ont développé un projet (primé au récent Forum Mind & Market) qui vient ajouter une dimension supplémentaire à la solution d’Intuitim.
A savoir une plate-forme d’échanges d’images médicales annotées permettant à des médecins de solliciter, à (très longue) distance, l’avis de confrères spécialistes, opérant éventuellement sur d’autres continents. L’encodage normalisé, graphique, du diagnostic évite en effet de devoir procéder à des traductions.
Les images sont envoyées (ou mises à disposition, selon les scénarios envisageables), annotées ou non, au spécialiste sollicité qui peut émettre un second avis et procéder lui-même à ses propres annotations standardisées. Intuitim estime qu’une bande passante de 3 Mbps est suffisante pour garantir un transfert efficace.
Avantages de la solution: transfert rapide, intervention tout aussi rapide du spécialiste consulté, annotation et diagnostic immédiats, compréhension immédiate grâce à la normalisation BI-RADS.
Le service sera facturé par Intuitim selon un scénario encore à déterminer. La spin-off pourrait choisir de pratiquer des tarifs fixes, par spécialité, soit prélever, pour chaque consultation, un pourcentage sur le tarif appliqué par le spécialiste.
Destination: Chine
Le scénario “business” imaginé par le trio d’étudiants repose sur le constat que l’un des marchés demandeurs de services de télédiagnostic (pour second avis, notamment) n’est autre que la Chine. Et, plus spécifiquement, des patients appartenant aux couches privilégiées qui estiment ne pas trouver, dans leur pays, même dans les hôpitaux privés, la qualité de service qu’ils espèrent.
“Actuellement, les solutions de recherche d’un diagnostic complémentaire, provenant de spécialistes étrangers, qu’ils peuvent trouver sont trop difficiles à mettre en oeuvre, onéreuses, et reposent sur des processus longs”, souligne Edouard Delvaulx, l’un des trois étudiants impliqués dans le projet.
Lixia Yan, Edouard Delvaulx et Laurent Brichet: faire d’un mémoire un projet business ouvert sur la Chine.
“Divers opérateurs privés ont mis en oeuvre de sites Internet qui se proposent de mettre en relation patients et spécialistes, d’organiser les rendez-vous, etc. Mais le processus est encore classique, avec envoi des radios, échanges s’effectuant par courrier postal par e-mail. Les délais pour identifier un spécialiste à l’étranger et obtenir le second avis sont souvent longs. Nous avons donc imaginé une solution qui accélère sensiblement le processus.”
Le projet devra agir à un double niveau. Le premier est de constituer un réseau de spécialistes (belges, dans un premier temps) à qui les médecins chinois pourront faire appel pour un second avis. Des contacts en ce sens ont d’ores et déjà été engagés.
L’autre niveau est évidemment technologique. Le socle en sera la solution Mammo-Note/Medical Studio. Dans l’état actuel des choses, le prototype de la solution de transfert d’images a déjà été testé. Reste à tester les échanges d’images à partir de la Chine. Point d’interrogation, notamment: les vitesses Internet dans ce pays.
La question réglementation (vie privée, exportation de données médicales) devra également être précisée. “A priori, nous ne devrions pas rencontrer d’obstacle”, estime Edouard Delvaulx, “dans la mesure où nous ne transférons que des données médicales dûment anonymisées. Par ailleurs, des échanges de données médicales ont déjà cours sur le territoire chinois, mais encore sous forme de courrier postal ou d’envois électroniques basiques.”
A priori, le scénario le plus probable sera que le spécialiste chinois octroie, pour un temps déterminé, un accès- dûment sécurisé- aux images à diagnostiquer, sans qu’elles soient “exportées” vers un espace cloud extérieur à l’établissement hospitalier. Mais on peut également imaginer, à codition que toutes les garanties de sécurité et de confidentialité des données soient apportées, que des “clouds privés” externes aux établissements se constituent. Sur le sol chinois ou ailleurs.
Créer un partenariat international
Au mois de mai, Edouard Delvaulx, accompagné du professeur Benoît Macq (du laboratoire TELE de l’UCL), ira présenter son projet en Chine, dans le cadre d’un déplacement organisé par l’Awex et BioWin. Un jury local, composé de spécialistes médicaux et d’investisseurs, tiendra sans doute entre ses mains le sort du scénario imaginé par le trio et par Intuitim.
L’espoir est d’identifier un partenaire local qui puisse servir de relais et de sésame vers le marché chinois. Convaincre un investisseur chinois serait essentiel pour pénétrer le marché. Mais Intuitim ne considère pas ce premier contact comme un examen qu’il faudra absolument réussir. Quoi qu’il arrive, les contacts seront maintenus, quitte à ne pouvoir concrétiser cet axe Belgique (ou Europe)-Chine qu’à plus long terme. Mais, il est évident que l’ouverture du marché chinois pourrait accélérer sensiblement les perspectives de viabilité de la société.
(1) Edouard Delvaulx et Lixia Yan, cette dernière étant de nationalité chinoise, sont tous deux étudiants en management au sein de la LSM (Louvain School of Management). Laurent Brichet, pour sa part, est étudiant en droit.
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