Trafic: “garder la main sur le contenu des formations”

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Par · 18/10/2012

Trafic est l’une de ces sociétés qui, séduite par l’e-learning, a décidé de prendre en mains la totalité du processus- depuis la conception du scénario jusqu’à la production du contenu.

Bref petit portrait de Trafic. Cette chaîne de magasins, créée en 1983 par les frères Marchandise et toujours détenue en majorité par le groupe familial, se positionne sur le terrain du discount non alimentaire. L’enseigne a connu une forte croissance ces dernières années, multipliant les ouvertures de magasins, tant en Wallonie que dans les zones limitrophes. C’est ainsi que sur les 75 magasins existant aujourd’hui, on en trouve deux à Bruxelles, deux en Flandre, 3 au Grand-Duché et 7 en France.

Cette dispersion grandissante de la couverture géographique a amené la société a repenser son concept de formation à destination de son personnel- des “équipiers”, comme le veut la terminologie-maison.

“Nous avions besoin de former les équipiers des divers magasins de manière la plus rationnelle possible, en faisant passer un message unique”, explique Christian Drochmans, responsable recrutement et formations chez Trafic. Un message qu’il ne faudrait pas répéter à de multiples reprises groupe par groupe, site par site. Ou risquer de le voir dilué si l’on procédait par une formation en deux temps: celle des gérants, d’abord, chargés ensuite de répercuter la formation à leurs équipes.

Les anciennes formations en présentiel souffraient de deux autres inconvénients: les coûts de déplacement imposés au personnel ou aux formateurs, et la manière de vérifier que tous avaient bien suivi les formations et assimilé leur contenu.

Des formules adaptées à la cible

Les contenus d’e-learning sont destinés à former et informer l’ensemble du personnel des magasins (plus de 650 personnes) aux compétences de base: accueil de la clientèle, gestion de clients agressifs, sécurité de l’espace de travail, prévention incendie, utilisation des solutions informatiques, gestion des commandes spéciales… “Tout n’est pas enseigné via l’e-learning. Plus on monte dans la hiérarchie et dans les responsabilités, plus la formation se fait en présentiel”, souligne Christian Drochmans. Exemple: la gestion des clients dits agressifs. Le personnel de magasin, amené à intervenir “en première ligne”, est formé aux techniques d’écoute et de désamorçage du conflit via les modules d’e-learning.

Christian Drochmans (Trafic): “L’e-learning permet de diffuser un savoir. Le présentiel est davantage destiné à l’appropriation d’un savoir-faire.”

Le gérant de magasin, lui, est celui qui, en finale, devra régler le problème, s’il ne l’est pas “en première ligne”. “Son intervention correspondra alors à une réelle prise en charge du client. Et cela s’apprend par des jeux de rôles. La formation se fait donc en présentiel.” Idem pour la formations aux entretiens d’embauche ou à la manière de gérer le stress ou les traumatismes potentiels faisant suite à un hold-up. “Nous mêlons présentiel et e-learning pour tout ce qui touche aux attitudes comportementales”, souligne Christian Drochmans. “L’e-learning permet de diffuser un savoir. Le présentiel est davantage destiné à l’appropriation d’un savoir-faire.”

La distinction entre les deux formations a aussi une raison économique: “l’e-learning a un coût. Un coût qui ne se justifie que sur une grande population [d’apprenants]. Par contre, lorsque la population-cible est plus réduite, le présentiel demeure plus logique et abordable.” Trafic ne rejette toutefois pas l’idée d’avoir recours, plus tard, à l’e-learning pour la formation du personnel administratif, par exemple en matière de compétences linguistiques ou d’utilisation d’outils informatiques. Mais rien, en ce sens, n’a encore été décidé.

“Tout maîtriser”

La raison majeure pour laquelle Trafic a décidé d’internaliser entièrement le processus d’e-learning est celle de l’autonomie. “Nous avons tenu à tout gérer en interne- gestion de la plate-forme, scénarisation, création des unités d’apprentissage, de leur contenu (textes, photos, vidéos, animations…)…- afin de garder la main sur le contenu et pour faciliter les mises à jour et l’évolution des modules”, explique Christian Drochmans. “Certaines procédures évoluent en effet assez fréquemment. Nous avons par exemple modifié récemment notre procédure de remboursement. Il s’agit donc d’adapter les modules de formation le plus rapidement possible afin que tout le personnel des sites puissent se mettre à niveau. Autre exemple: la transformation des magasins, initiée en 2011. Cela signifie que l’environnement de travail se transforme et que le contenu des vidéos, qui expliquent certaines tâches ou situations, doit être adapté.”

Christian Drochmans: “La conception du contenu d’e-learning ne représente que 20% du chemin. Les 80% restants sont de la maintenance, de la mise à jour.

Difficile mais aussi coûteux et trop long de faire appel, à chaque fois, à un prestataire extérieur. “En le faisant en interne, la réaction peut être immédiate.” Christian Drochmans attache une grande importance au volet mises à jour. “La conception du contenu d’e-learning ne représente que 20% du chemin. Les 80% restants sont de la maintenance, de la mise à jour. Le contenu se doit en effet de rester actuel. Il doit vivre, évoluer dans le temps, pour que l’employé se reconnaisse toujours dans son environnement.”

Pour faciliter les adaptations, Trafic a modularisé à l’extrême le contenu: les séquences vidéo sont courtes (max. 1 minute 30), dédiées à un message bien spécifique. De quoi permettre de ne modifier que des passages bien spécifiques. “Cela nous a par exemple évité de devoir refaire tout le module Clients agressifs lorsque nous avons changé notre procédure de remboursement.” Autre moyen de simplifier les mises à jour: l’enregistrement des commentaires. La voix off des différentes capsules est… produite par ordinateur. En l’occurrence, par de la synthèse vocale (fournisseur: Acapela).

Un suivi plus efficace

Trafic s’est trouvé une petite mascotte virtuelle pour accompagner son personnel tout au long des formations… “Trafix” se veut résolument ludique

Aux yeux de Christian Drochmans, l’e-learning favorise aussi un suivi plus précis des compétences acquises. “Chaque module de formation est ponctué par une évaluation ou une validation de l’acquis. Toutes les formations sont obligatoires. Et chaque module doit être suivi avec succès avant de pouvoir passer au suivant.” Le taux de réussite exigé est de 80% pour chaque module (voire 100% pour la connaissance du règlement interne). Si l’employé échoue mais dépasse un score de 50%, il doit recommencer le questionnaire d’évaluation. En-dessous de 50%, il doit refaire la formation.

Et toutes les sessions de formation individuelles font l’objet d’un suivi. Avec rapport mensuel au gérant, qui peut ainsi déterminer qui a suivi quelle formation. De même, un rapport bimensuel est envoyé aux responsables régionaux. Et, tous les deux mois, les employés doivent compléter un petit questionnaire testant leur bonne connaissance des procédures éventuellement mises à jour.

“Nous disposons en outre de tous les outils et statistiques nécessaires pour déterminer non seulement le niveau de compétences du personnel mais aussi pour vérifier que le contenu de l’e-learning est adapté et répond aux objectifs”, souligne Christian Drochmans. “S’il s’avère par exemple que tout le monde obtient partout un score de 95%, cela pourrait éventuellement dire que les questions sont trop faciles. A contrario, si tout le monde se situe en-dessous des 80%, peut-être les messages passés ne sont-ils pas suffisamment explicites ou peut-être la forme pédagogique n’est-elle pas la bonne…”

Un long processus

Les formations e-learning ont commencé en ce début octobre 2012. D’ici la fin de l’année, tout le personnel devra avoir suivi les 4 premiers modules (introduction aux principes de l’e-learning, apprentissage du règlement interne, des procédures pour maintenir un magasin en ordre pour accueillir le client…). Histoire d’être “à son maximum” pour le rush de fin d’année.

Christian Drochmans: “Now.be nous aide à faire des choix simples. Inutile de produire des contenus du genre Guerre des Etoiles. Il nous faut des choses simples, dont on garde toujours la maîtrise.”

Le processus d’appropriation de l’outil e-learning par ceux qui avaient la charge de l’implémenter dans la société fut un long trajet. Les premières réflexions sur la manière d’appréhender et de déployer la formation à distance ont commencé en janvier… 2011.

Plus de 18 mois pour obtenir un résultat peut paraître long mais la décision de tout internaliser impliquait d’acquérir de nouvelles compétences: apprentissage de l’e-learning, réflexion sur les contenus à développer et enregistrer, scénarisation, tests de pertinence avec les magasins-pilote, production des contenus (textes, photos, vidéos, animations)… Sans compter… une mise à niveau des infrastructures. “Nous avons dû postposer le lancement, le temps de renforcer le débit dont nous disposons sur nos lignes téléphoniques.” En cause: un trafic (intranet, e-learning…) qui les avait menées à saturation.

Six gérants de magasin, qui avaient déjà la charge des formations du personnel, se sont donc mis à l’e-learning et ont appris le maniement du LMS (learning management system, fourni par e-Doceo). Ce sont eux qui ont “amené le contenu, les messages”. Ils ont élaboré le scénario, les storyboards, proposé les types d’animation qu’ils désiraient…

Une personne a elle été désignée pour valider et coordonner ces demandes et pour assurer la mise en forme (autrement dit, la production des contenus proprement dits).

Bien entendu, Trafic ne s’est pas lancé dans cette aventure sans avoir pris conseil auprès de personnes connaissant l’e-learning. Embûches comprises. Pour ce faire, Trafic s’est tourné vers Now.be. “Ce sont eux, à l’occasion notamment d’un séminaire organisé par l’AWT, qui nous ont fait connaître l’e-learning. Ils nous ont fait comprendre quels en sont les tenants et aboutissants, nous ont évité de nous engager dans de mauvaises voies. Encore aujourd’hui, ils nous accompagnent pour les paramétrages, pour le choix des points essentiels à inclure dans le storyboard. Ils nous aident aussi à faire des choix simples, à privilégier les processus qui simplifient la vie de nos employés. Inutile de produire des contenus du genre Guerre des Etoiles. Il nous faut des choses simples, dont on garde toujours la maîtrise.”

A partir de ce mois d’octobre 2012, le personnel des magasins peut donc suivre, sur son lieu de travail, les premières formations disponibles. Ils pourront ensuite se former à leurs rôles respectifs (magasiniers, responsables textile, gérant, caissière/réassortisseuse…).

Les employés ont certes la possibilité de se former à partir de leur domicile mais, pour l’instant, la formation est prise en charge sur le lieu de travail.

Outre les formations obligatoires (liées à leur rôle au sein de l’équipe), les employés ont aussi la possibilité de suivre des modules de formation portant sur d ‘autres métiers (mais, cette fois, sur leur temps personnel).

Trafic a en outre décidé d’ouvrir sa plate-forme d’e-learning aux agences d’intérim qui travaillent pour la chaîne. “Nous faisons en effet souvent appel à des intérimaires, notamment pendant les périodes de congés et les week-ends, ou pour remplacer des personnes malades. Il est essentiel qu’eux aussi soient formés à nos procédures.”