Les sociétés wallonnes répondront-elles plus activement à l’appel à projets FP7 qui a été publié ce 10 juillet? Une tendance à une certaine désaffection de ces projets de recherche européens s’est faite jour voici quelques années. A contre-courant de l’engouement du passé.
En effet, alors que les participations d’acteurs wallons avaient connu une augmentation sensible voici quelques années, une tendance inverse s’est manifestée plus récemment. Elle semble toucher nettement plus la Wallonie que d’autres pays ou régions (Flandre comprise). Un constat que déplore Bertrand Herry, responsable NCP Wallonie NCP Wallonie (National Contact Point), organisme qui assiste les candidats dans leur démarche, et qu’il analyse pour nous.
Des projets moins nombreux
Le nombre de projets déposés et ceux ayant été sélectionnés pour un financement avait sensiblement progressé voici quelques années. Quand on compare le bilan du FP6 à celui du FP5, on remarque par exemple un quasi-triplement du nombre de sociétés participantes (tous types de projets confondus) – soit 92 contre 35.
En 2008, à l’issue du FP6, la part des acteurs wallons dans l’enveloppe allouée à la Belgique était de 26%, un chouia au-dessous de ce que la Région représentait en termes purement économiques. Le progrès était sensible par rapport aux 18% relevés au cours du programme FP5.
Et le programme FP7 avait démarré de façon encourageante pour les participants wallons. En 2008, un an après son lancement, le NCP Wallonie notait que “la Wallonie a déjà engrangé plus du quart des résultats réalisés sur l’ensemble du FP6” (tous secteurs d’activités confondus).
Depuis, toutefois, une tendance à la baisse s’est manifestée. “La participation wallonne est légèrement supérieure à celle des acteurs bruxellois, si on fait abstraction des organisations internationales basées sur le territoire bruxellois”, souligne Bertrand Herry. Mais le ratio par rapport à la Flandre a repris de l’ampleur. On en est à du 1 contre 6, voire 1 contre 7. Et la présence de poids lourds tels que la KUL ou l’IMEC, qui écrasent la balance, est loin d’être la seule explication.
Désintérêt relatif
“Toutes catégories de projets confondues, on relève une diminution du nombre de projets déposés et retenus. Le phénomène est encore plus sensible dans la catégorie de projets ICT”, déclare Bertrand Herry. “Or, cette tendance n’est pas une constante, ni à l’échelon belge, ni à l’échelle européenne. La tendance est même diamétralement opposée pour des pays tels l’Italie ou l’Espagne, où le nombre de participations explose littéralement depuis 4 ou 5 ans.”
Il faut sans doute y voir l’effet de la crise, estime Judith Beyeler, responsable projet au NCP Wallonie. “Les sources de financement s’étant taries au niveau national ou régional, les sociétés se tournent vers l’Europe… L’Espagne est par exemple le principal soumissionnaire de projets en NMP (Nanotechnologies et nanosciences, Matériaux et Procédés).”
A quoi peut-on dès lors attribuer cette participation plus faible des acteurs wallons, essentiellement du côté des entreprises? Les responsables NCP y voient un effet probable du Plan Marshall: “les subsides alloués à la recherche sont plus aisés à obtenir au niveau wallon et les consortia à mettre en oeuvre plus aisés à créer.”
Mais Bertrand Herry n’y voit pas pour autant un élément positif: “A long terme, ce n’est pas une bonne stratégie dans le chef des entreprises. Les projets européens sont peut-être moins aisés et plus complexes à monter mais ils ouvrent aux entreprises un réseau de pointe, leur permettent d’optimiser leur veille technologique, d’être en première ligne pour savoir quels sont les besoins et tendances technologiques d’avenir, d’avoir une vue précise sur les stratégies à mettre en oeuvre. Même les projets qui ne sont finalement pas financés par l‘Europe donnent lieu à des partenariats entre entreprises et universités. Au-delà de l’effet de levier financier potentiel, une participation à un projet FP permet surtout à un acteur local de jouer dans la cour des grands, à l’échelon international.”
Fausse complexité?
Bertrand Herry prêche évidemment pour sa chapelle mais, à ses yeux, la critique parfois entendue de projets européens inaccessibles parce que trop complexes à préparer, trop lourds à supporter pour une petite structure, cette critique n’est pas fondée: “Quand vous participez à un projet avec un bon partenaire, un bon coordinateur de projet [parmi eux, par exemple, des centres de compétences tels le Cetic ou Multitel], les temps de préparation ne sont pas excessifs. Et côté complexité administrative, participer à un projet de recherche piloté par la Région est potentiellement plus complexe.”
Son explication? “Dans un projet FP7, les règles sont plus structurées et plus difficiles à appréhender au départ mais le NCP est là pour aider les entreprises. Les règles du jeu peuvent paraître indigestes en raison de leur exhaustivité mais elles facilitent la tâche pour les phases de définition de budget et de réalisation. Avec les projets régionaux, la complexité commence quand on a été sélectionné. Notamment parce qu’il faut davantage justifier chaque dépense, ce qui est ou non éligible…”
Il n’en reste pas moins que la complexité ou l’effort important que représente, pour une petite structure, la participation à un projet FP européen sont confirmés par d’autres observateurs. De même que la place trop limitée que laisse l’Europe pour les PME. Pierre Guisset, ancien patron du CETIC et aujourd’hui accompagnateur (notamment) de projets européens, l’a souvent souligné. Son successeur à la tête du CETIC, Simon Alexandre, ne tient pas un discours différent. L’un des écueils vient des critères de sélection des projets: d’une part, l’Europe mise surtout sur des structures et noms connus; d’autre part, elle ne retient souvent que des projets à forte connotation innovatrice, dont la transposition commerciale s’inscrit dans un avenir relativement lointain- au-delà des 5 ans. Un scénario difficilement compatible avec les contraintes d’une PME.
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